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Francophonie : face au Covid-19, soyons solidaires… même par égoïsme ! (Par Louise Mushikiwabo)

Publié le mardi 11 janvier 2022  |  Jeune Afrique
Faure
© Autre presse par Presidence du Togo
Faure Essozimna Gnassingbé a reçu, ce 17 décembre 2019, une délégation de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) conduite par la SG, Louise Mushikiwabo
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Par Louise Mushikiwabo, Ancienne ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo a été élue Secrétaire générale de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en octobre 2018. Une fonction qu'elle occupe depuis janvier 2019.

Équité vaccinale, migration, transition énergétique… Alors que les défis se multiplient, le Sommet Europe-Afrique de février 2022 doit permettre de transformer la relation entre les deux continents, en misant sur davantage d’entraide.

Depuis deux ans maintenant, la pandémie de Covid-19 secoue le monde, ébranlant nos certitudes et contraignant les dirigeants à revoir leurs priorités. Tous les pays sans exception, petits et grands, subissent les conséquences de l’une des plus grandes pandémies de l’époque moderne. Exacerbation des rivalités internationales, alliances inédites, conflits diplomatiques, récession économique, excès de communication et frustrations populaires…
Cette crise aura bouleversé durablement le monde, bien au-delà des aspects sanitaires. Dire que la pandémie a infligé plus de dommages sociaux, économiques et structurels que toutes les guerres récentes serait un euphémisme.

Instincts primaires

À l’heure de la mondialisation, cette crise a été la première à affecter simultanément l’ensemble des sociétés et des économies, au Nord comme au Sud. Dans ce contexte, la tenue en février 2022 du Sommet Europe-Afrique m’inspire quelques réflexions. En tant que secrétaire générale de la Francophonie, une organisation multilatérale rassemblant 88 États et gouvernements membres, dont 30 d’Afrique et de l’Union européenne, il m’apparait comme un moment clé pour redéfinir en profondeur la relation entre les deux continents.

Pour beaucoup d’observateurs, la pandémie a été l’occasion d’une prise de conscience. Elle nous a mis face à nos instincts primaires. Alors que le monde ne cesse de parler de solidarité, très vite, nous avons vu les nations se replier sur elles-mêmes, réagir dans la panique et au détriment de toute stratégie collective. Le temps semble donc venu de revoir la notion même de solidarité.

La solidarité, cette valeur au cœur de la plupart des organisations internationales comme la Francophonie, est devenue au fil des ans un leitmotiv qui peine à se traduire par des actions concrètes et mesurables. Et si tout était une question d’approche ? La solidarité est associée à la notion d’aide, souvent perçue comme condescendante. Peut-être devrions-nous abandonner cette approche au profit de celle d’«intérêt partagé». Soyons solidaires, soit, mais soyons-le par égoïsme et par intérêt ! Voyons dans les efforts de solidarité, une chance pour nous aider nous-mêmes. Car ce n’est que collectivement, que nous trouverons des solutions durables.

L’actualité de ces derniers mois illustre bien mon propos. D’abord, la question de l’équité vaccinale a suscité des élans de solidarité internationale, malheureusement entachés de tendances égoïstes et d’un manque total de transparence, y compris autour de l’initiative Covax et de la question du partage des brevets. Les chiffres sont parlants : « sur les 832 millions de doses de vaccin administrées, 82 % sont allées à des pays à revenu élevé ou intermédiaire, tandis que seulement 0,2% ont été envoyées aux pays à faible revenu ». C’est l’OMS qui le dit.

Et on s’étonne de voir des variants émerger de ces continents où les populations n’ont pu avoir accès aux vaccins ! On continue à fermer les frontières, à isoler les États, en sachant pertinemment que c’est là le meilleur moyen de réduire à néant tous les efforts déployés en matière de vaccination

Immigration et changements climatiques

Autre sujet brûlant au sommaire des discussions entre l’Europe et l’Afrique : les migrations. Quand admettrons-nous que cette question est la conséquence directe des réalités démographiques opposées de ces deux continents, l’un vieillissant et l’autre rajeunissant ? Le problème de l’immigration est en réalité une question d’emploi et de mobilité. Nous devrions privilégier une discussion franche et mettre en place ensemble des mécanismes légaux et régulés pour faire face à cette réalité qui ne fera que s’amplifier.

Enfin, et ce sera mon dernier exemple : la transition énergétique en réponse aux changements climatiques. Selon un rapport de la Banque mondiale en 2020, 42,8 % seulement de la population avait accès à l’électricité en Afrique en 2016. Ce qui représente 600 millions de personnes vivant sans électricité, en majorité dans les zones rurales. N’y a-t-il pas une incohérence profonde à demander à un continent d’améliorer un produit dont il manque, pour prévenir les conséquences d’un problème dont il n’est pas, ou très peu, responsable ? En d’autres termes, comment parviendrons-nous à relever le défi collectif de la transition énergétique sans pour autant contraindre des États à renoncer complètement aux énergies fossiles et durables dont ils ont cruellement besoin ?

L’avantage dont l’Afrique dispose aujourd’hui, c’est cette occasion unique, dans sa marche vers le développement, de ne pas commettre les mêmes erreurs que les pays développés et de privilégier une approche de développement plus attentive aux enjeux climatiques globaux. Sur cette question cruciale pour les générations à venir, je prône une transition progressive et adaptée aux réalités socio-économiques de chacun.

Des paroles aux actes

Ces réflexions entraînent une remise en question de la plus-value de nos organisations internationales. Quel avenir pour le multilatéralisme ? Cette interrogation est au cœur d’une multitude de tables-rondes et de groupes de réflexion.
Mais les citoyens sont les premiers à se la poser, et avec raison. Nous assistons depuis quelques années à une augmentation croissante des «grands rendez-vous mondiaux», de sommets, de conférences de haut niveau, de forums, etc. Nous passons d’annonce en annonce et de résolution en résolution. La communication, amplifiée par la montée en puissance des réseaux sociaux, est malheureusement de plus en plus superficielle, et les médias s’intéressent davantage aux aspects « people », qu’au contenu réel des discussions. Quant à ces discussions, on peine à en voir la concrétisation, tant la succession des annonces est rapide
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