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Charles Michel: «En Afrique, la Russie utilise le mensonge comme arme de guerre»

Publié le lundi 18 juillet 2022  |  Jeune Afrique
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À la veille d’un sommet de l’Union africaine qui se tient à Lusaka, en Zambie, à partir du 17 juillet, le président du Conseil européen est revenu pour Jeune Afrique sur les conséquences de la guerre en Ukraine dans les relations entre les deux continents.

Par Manon Laplace et Romain Gras

Le 18 février, l’Union africaine (UA) et l’Union européenne (UE) bouclaient, à Bruxelles, la sixième édition de leur sommet conjoint. Au programme : zone-libre-échange, lutte contre le Covid-19, insécurité, l’initiative Global Gateway… Mais une semaine plus tard, à plus de 2 000 km de la capitale belge, le lancement d’une offensive russe en Ukraine est venu bouleverser le contexte diplomatique. Lors de la prochaine rencontre de l’UA, à partir du 17 juillet à Lusaka (Zambie), le président du Conseil européen, Charles Michel, prendra la parole en ouverture du sommet.

Bousculée par la montée de l’influence russe sur le continent, l’Union européenne est aujourd’hui confrontée aux conséquences, sur le continent africain, de la guerre en Ukraine. Le diplomate de 46 ans, ancien Premier ministre de la Belgique, est revenu pour Jeune Afrique sur cette nouvelle donne diplomatique et ses répercussions.

Jeune Afrique : Vous prononcez un discours, ce 17 juillet, à l’occasion de l’ouverture du sommet de l’Union africaine qui se tiendra à Lusaka. Quels seront les enjeux de ce sommet et de la coopération avec l’Union européenne ?

Charles Michel : Le sommet qui s’est tenu à Bruxelles en février a marqué un tournant dans la relation entre l’Europe et l’Afrique. Nous avons mis en place un nouveau paradigme avec une relation basée sur l’écoute mutuelle. Coïncidence piquante : quelques jours après, s’est déclenchée une guerre sur le sol européen. Elle a brutalement ébranlé le droit international, mais aussi induit des effets en matière de sécurité alimentaire, d’inflation, d’énergie. Ce sommet nous permettra notamment d’envisager comment réduire ensemble les effets néfastes de cette guerre.

Quels projets concrets pouvez-vous mettre en avant dans le cadre de l’initiative Global Gateway?

Cent cinquante milliards d’euros sont mobilisés pour l’Afrique. Il faut désormais transformer tout cela en projets réels. Nous avons enclenché un partenariat pour la production de vaccins contre le Covid-19. Quelques mois plus tard, les premiers projets étaient lancés au Rwanda, en Afrique du Sud, au Sénégal et au Ghana.

Nous travaillons à présent à nous assurer que les grandes plateformes, comme Gavi ou Covax, viendront bien acheter les vaccins produits en Afrique. Lors de mes échanges avec [le président sénégalais] Macky Sall et [le Sud-Africain] Cyril Ramaphosa au G7 en Allemagne, nous sommes convenus de nous inspirer de ce que nous avions fait en matière de vaccins pour lutter contre l’insécurité alimentaire. Cela apparaît vital.

Cette volonté de remodeler la relation Europe-Afrique s’inscrit néanmoins dans un contexte où les pays africains se tournent de plus en plus vers d’autres partenaires, comme la Turquie, la Chine ou la Russie…

Les responsables africains sont souverains et libres de choisir leurs partenaires. Il appartient aux Européens de montrer que le projet qu’ils portent est attractif. Une dynamique sincère de respect mutuel a été instaurée. Est-ce que pour autant tout est résolu ? Bien sûr que non.

Comprenez-vous cette envie de se choisir des partenaires jugés moins «contraignants», notamment sur le plan de la démocratie ou des droits humains?

Mon propos ne vise pas à juger la qualité des partenariats que l’Afrique conclut avec d’autres acteurs, mais à montrer celle de l’Union européenne et sa valeur ajoutée. J’observe que des pays africains qui se sont engagés dans des partenariats avec d’autres acteurs semblent aujourd’hui exprimer des regrets, parce qu’ils subissent un étranglement financier et se rendent compte que les infrastructures n’ont pas la qualité espérée au moment de la signature du contrat.

À qui pensez-vous ?

Je pense qu’ils se reconnaissent.

Dans le contexte actuel, l’influence grandissante de la Russie sur le continent menace-t-elle la relation entre l’Union européenne et l’Afrique ?

La manière dont la Russie et l’Europe envisagent leur présence en Afrique repose sur des postulats totalement antagonistes. Moscou a développé un business model visant à capter des ressources naturelles en échange de quelques maigres services sécuritaires, qui s’avèrent extrêmement peu efficaces et même violents pour les populations africaines.

Il y a un intérêt stratégique pour la Russie à entretenir la corruption, l’instabilité et l’insécurité au sud de l’Europe. À l’inverse, quand l’Afrique se porte bien, c’est une bonne chose pour l’Europe. Et quand elle est en difficulté, cela a des conséquences sur l’exportation des conflits ou l’immigration irrégulière, ce qui entraîne des débats compliqués chez nous.

Il y a pourtant une réelle demande de certaines populations africaines de renforcer la coopération avec la Russie…

La Russie utilise massivement la propagande, la désinformation, en un mot le mensonge, comme arme de guerre. Cela vise à dresser les jeunesses africaines contre des pays européens par le biais de narratifs mensongers et indignes. Notre défi est de restaurer la vérité et la transparence.

Comment l’UE riposte-t-elle sur le terrain de la désinformation?

Soutenir une presse libre et indépendante est une manière de produire l’antidote à la désinformation. D’autant que des mensonges sont fabriqués pour porter des accusations graves contre des États – nous l’avons vu par exemple au Mali avec le groupe Wagner. Les services de renseignements européens ont pu rétablir la vérité, parfois même avant que ces opérations n’aient pu être menées.

Cela représente-t-il un défi ? Oui. Est-il difficile à relever ? Oui, car c’est aussi un espace où les Russes essayent d’instrumentaliser l’histoire entre l’Europe et l’Afrique, en particulier le colonialisme, pour tenter de semer la zizanie.
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