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Togo : les magouilles autour de l’exploration et les dessous de la résiliation du contrat avec ENI
Publié le mardi 18 mars 2014  |  togosite.com


© Autre presse
Le ministre des Mines, Dammipi Noupokou


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Pourquoi Dammipi Noupokou et autres ont-ils signé deux contrats de partage sur un même point d’exploration ?

Le flou kafkaïen qui entoure l’exploration de l’offshore togolais a atteint un point qui oblige les autorités à communiquer sur ce sujet très sensible. Des dessous du litige qui oppose la société américaine Brenham à la Major italienne ENI (ex-AGIP) en passant par la fourberie des pontes du régime vis-à-vis de cette dernière société, tout doit se savoir, jusqu’au bond que pourrait effectuer l’économie togolaise lorsque l’exploitation à proprement parler débutera. Quelles sont les estimations et les situations géographiques des deux sites, Kara1 et Oti1 ? Sur la base de quel contrat les sociétés Brenham et ENI s’étaient-elles affrontées devant les tribunaux américains ? Plongée sous-marine en direction des sites pétroliers du Togo et des appétits gloutons qu’ils suscitent au sein des piranhas qui entourent le sommet de l’Etat togolais.

Pont rompu entre ENI et le Togo pour le bonheur de Brenham

Avec la dernière révélation du journal électronique « Africa Energy Intelligent », l’heure est venue de renseigner les citoyens sur l’aspect immergé du dossier pétrolier au Togo avec la conviction que les autorités se décident à dire leur part de vérité sur la ressource. « La major italienne est menacée d’expulsion suite à son refus de renégocier les termes de son contrat. Une firme américaine est déjà à Lomé pour s’emparer des blocs.

Les rapports entre ENI et les autorités togolaises se sont pour le moins rafraîchies ces derniers mois. Le conflit porte sur le refus des Italiens de renégocier le contrat de partage de production sur les blocs offshore Oti1 et Kara obtenus en 2010. Raison de cette demande pressante du gouvernement: les quatre forages effectués ont permis de mettre en valeur des formations géologiques apparemment très intéressantes.

Sur cette base, le ministre togolais des Mines et de l’Energie Dammipi Noupokou, soutenu par le chef de l’État Faure Gnassingbé, a décidé d’imposer une renégociation des termes du contrat d’ENI. Seulement, la compagnie italienne n’a rien voulu savoir, s’arc-boutant sur les clauses déjà signées qui n’envisagent en aucune manière une quelconque renégociation en cas de succès des campagnes d’exploration.

Conséquence immédiate de ce conflit, le gouvernement togolais a exigé le départ de la Major italienne qui songe désormais à poursuivre le Togo devant les juridictions internationales. Afin de faire monter la pression, Dammipi Noupokou a entamé des négociations avec les Américains de Brenham Oil & Gas pour rétrocéder les blocs d’ENI. Daniel Dror, le président de Brenham s’est déjà entretenu avec les autorités togolaises », a écrit ce journal électronique. Un article que nous avons repris dans « Liberté » N° 718 du 11 mars 2014.

A travers ces lignes, on penserait que c’est maintenant que les autorités togolaises entament des négociations avec Brenham Oil & Gas. Faux, archi faux. L’une des preuves est l’image du ministre Dammipi Noupokou et du directeur des Hydrocarbures aux côtés de l’ancien président de Brenham Oil & Gas, prise en août 2011 à Lomé. Il y en a d’autres.

La roublardise des autorités franchit les frontières nationales

Dans nos recherches, nous sommes tombé sur des documents qui attestent que la firme américaine et les autorités togolaises étaient en contact depuis des années avant même l’arrivée de la société italienne au Togo. En effet, des écrits datant du 9 août 2011, font état de ce qui suit : « Houston et Kemah , Texas – 9 Août 2011 Brenham Oil & Gas Corp, OTCBB: BRHM (« Blenheim ») , une filiale d’American International Industries, Inc., OTCBB: AMIN («américaine»), a annoncé aujourd’hui le dépôt d’un procès pour interférences délictuelles contre la société de services géophysiques TGS- NOPEC Geophysical et ENI Petroleum Co., Inc., la filiale américaine d’une société d’exploration et de production pétrolière multinationale italienne. Le procès est en cours devant la Cour de district du comté de Harris 189è, Texas. Brenham Oil & Gas Inc. est représentée par Houston cabinet Fleming & Associates, LLP. Le cabinet a représenté avec succès des milliers de clients dans les questions juridiques complexes à travers les Etats-Unis. Le procès est le résultat de l’accord de Blenheim à acquérir des droits d’exploration en eau profonde du pétrole dans la République du Togo, frontalière avec le Ghana dont la découverte de l’huile Jubilé est estimée à 1,2 milliard de barils.

Rog Hardy, Vice-président de Brenham Technology, a déclaré: « Dans une étude régionale complète de toutes les données disponibles, Brenham a identifié une tendance avec des attributs au Togo en eaux profondes similaires à ceux de la zone du champ Jubilé, y compris la présence probable d’indicateurs directs d’hydrocarbures ». Les dirigeants de Brenham ont visité deux fois la République du Togo, rencontré le ministre du Pétrole et informé le gouvernement du Togo sur les perspectives en eau profonde qu’il avait identifiées.

Basé sur le travail technique, Brenham a entrepris d’identifier la tendance future et le gouvernement du Togo a négocié un accord de partage de production avec Brenham pour la concession de 4 433 km2 (1.095.418 hectares) du Bloc 2. Brenham allègue que pendant ce processus, un cadre supérieur de TGS- NOPEC a contacté le ministre du Pétrole togolais et porté atteinte à des droits contractuels de Brenham. Le gouvernement du Togo a ensuite signé un accord de partage de production avec ENI, et la poursuite de Blenheim allègue également qu’ENI a conspiré avec TGS-NOPEC pour interférer sur les droits de concession de Brenham.

Brenham également continue d’enquêter sur l’implication de certains consultants locaux dans l’opération ENI qui sont les conseillers personnels étroits du président du Togo… ». Que déduire de tout ce qui précède ?

D’abord, que les autorités togolaises se savaient liées par un contrat (dont les citoyens n’ont pas encore vu copie) à la société américaine Brenham avant d’en signer un autre avec ENI. Ensuite, que pour décourager ENI à poursuivre les travaux, il suffirait de vouloir revoir les termes du contrat initial pour qu’en cas de refus, les conseillers personnels de Faure Gnassingbé allèguent la mauvaise volonté des responsables d’ENI. Pourquoi Dammipi Noupokou et autres ont-ils signé deux contrats de partage sur un même point d’exploration ? Et pourquoi, au lieu de poursuivre l’Etat togolais ou ses représentants à la signature de l’accord de partage, Brenham se borne à intenter une action en justice contre la Major italienne ? Autant de zones d’ombre qui doivent être clarifiées si tant est que les autorités togolaises veulent présenter patte blanche dans ce capharnaüm économico-judiciaire.

La perspective (encore) d’un procès contre l’Etat togolais

La courbe qu’effectuent les relations entre les autorités togolaises et la société ENI risque d’aboutir devant un tribunal extranational à cause des énormes retro commissions que l’entourage du chef de l’Etat veut imposer à ENI. Les condamnations de l’Etat togolais dans diverses affaires comme le dossier Kpatcha Gnassingbé, les affaires des neuf députés et Togo Electricité pourraient être sans commune mesure devant la sentence qui pourrait en découler si une juridiction de renom est saisie du double jeu de l’entourage immédiat de Faure Gnassingbé au sujet du contrat signé avec ENI. Le Trésor public pourrait débourser des centaines de milliards en guise dédommagement contre les frais d’installation de la plateforme et autres. Mais lorsqu’on jette un coup d’œil sur la loi des finances 2014, on réalise qu’il n’existe pas de recettes prévues qui proviendraient de la manne pétrolière. Bizarre ! Autrement, le contrat de partage que l’entourage immédiat de Faure Gnassingbé aurait signé avec cette société, ne serait pas un contrat qui engage l’Etat togolais, mais juste des personnes physiques insatiables qui désirent siphonner les ressources du pays, autant que faire se peut. D’où l’impératif de porter les deux contrats de partage de production devant le peuple s’impose. Il serait trop facile que ce soit le contribuable togolais qui paye pour la gloutonnerie de certains individus.

Une chose est de parler des Blocs 1 et 2, une autre est de les situer par rapport aux côtes togolaises. De nos investigations, il ressort qu’Oti 1 serait situé à 17 km des côtes togolaises, entre Kpémé et Agbodrafo et que Kara 1 est logé à 60 km des côtes de Baguida. Et c’est ce deuxième site qui est en exploration. Selon un cadre du ministère des Mines, le choix de se concentrer sur Kara1 aurait pour but de se soustraire au regard de la population parce que 17 km, ce n’est pas très loin des côtes. Raison pour laquelle l’option de la haute mer est préférée. Et à en croire une source sécuritaire, des moyens sont mis en œuvre pour « sécuriser » la zone. C’est ainsi que des unités spéciales de l’USIG qui relèvent de la Gendarmerie et sont composées de policiers, gendarmes et militaires n’ayant rien à faire avec la chose marine, patrouilleraient en permanence pour éloigner tout curieux de la zone d’« exploration ». Des pêcheurs sont formellement interdits d’accès à la zone. Est-ce toujours la seule phase d’exploration qui nécessite autant de mesures spéciales ? Et pourtant, le même cadre renseigne que des bateaux se relaient à ce point d’« exploration ».

L’obligation d’informer les citoyens sur l’état de la richesse

Que ce soit la société Brenham Oil & Gas ou ENI, il s’est agi de contrats les ayant lié aux autorités togolaises. L’exploration-exploitation de toute richesse doit faire l’objet de contrat de concession ou peu importe le terme estimé approprié. Dans le cas par exemple du marbre du Togo, le contrat qui lie la société POMAR-Togo à l’Etat togolais figure dans le Journal Officiel du pays et peut donc être consulté par tout citoyen. Même si les termes de ce contrat sont très discutables au vu des concessions faites par les représentants de l’Etat togolais, celui-ci a le mérite d’exister. Qu’en est-il pour le pétrole ? Qu’est-ce qui peut expliquer cette rétention d’information sur les conditions faites par l’Etat togolais à ces deux sociétés concurrentes ? A partir de quelle date les recettes de cette ressource tant prisée de par le monde seront-elles prises en compte dans le budget togolais ?

Toutes ces interrogations trouvent leur ferment dans le fait que l’Agence Ecofin révèle par exemple qu’au Ghana, en 2011, année durant laquelle ce pays d’Afrique de l’Ouest a produit pour la première fois du pétrole en quantités commerciales, l’économie a cru de 15,1% en une année. Il devient légitime de se demander à partir de quelle année alors l’économie togolaise aussi pourrait connaître un boom pouvant booster les investissements dans le pays. Mais selon un homme d’affaires, « les dettes contractées par le Togo lors de l’installation de la plateforme, doivent être remboursées avec du pétrole en contrepartie avant que l’annonce officielle ne soit faite sur la découverte de l’or noir en offshore togolais ». Seule une sortie officielle des autorités devant les élus du peuple pourra renseigner les citoyens et partant, la société civile.

Mais au-delà de toutes autres considérations et pour « clouer le bec » aux « empêcheurs de tourner en rond » qui ne cesseront d’interpeller les autorités quant à la gestion de cette ressource tant convoitée, il urge que celles-ci organisent une visite sur les deux sites, en compagnie des médias qui ont à cœur la gestion saine des ressources du pays afin qu’ils soient renseignés sur l’état d’avancement des travaux d’exploration-exploitation et pour qu’à leur tour, ils servent l’information vraie au peuple. Toute autre tentative de rouler les citoyens dans la farine comme ce fut déjà le cas dans un passé récent, ne sera qu’un aveu tacite de la forfaiture et du double langage dont on accuse les autorités. Les ressources du pays constituent un bien commun devant profiter à chaque citoyen et ce serait malhonnête qu’« une minorité cherche à l’accaparer ». Affaire à suivre.

Godson K.
Liberte hebdo

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