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Affaire Kpatcha Gnassingbé : Interview exclusive de Me Archange Gabriel Dossou, l’un des avocats de l’Etat togolais
Publié le lundi 15 juillet 2013  |  Savoir News


© Autre presse par DR
Me Archange Gabriel Dossou


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L’affaire de complot contre la sûreté de l’Etat d’avril 2009 fait toujours couler beaucoup d’encre et de salive, suite à l’arrêt rendu le 5 juillet par la Cour de justice de la CEDEAO. Plusieurs personnes dont Kpatcha Gnassingbé, demi-frère du président togolais, avaient été jugées et condamnées par la Cour suprême en septembre 2011.

Pour les avocats des inculpés, "Kpatcha Gnassingbé doit être libéré, parce que l’élément essentiel du dispositif du droit a été violé". Faux, ont rétorqué le 10 juillet dernier, les avocats de l’Etat togolais. Ce sont des "interprétations tendancieuses" et "erronées" de l’arrêt de la Cour de justice de la CEDEAO, ont affirmé ce mercredi, ces avocats. "La Cour de justice de la CEDEAO n’a jamais ordonné la libération de qui que ce soit", a martelé Me Archange Gabriel Dossou (ancien bâtonnier de l’ordre des avocats du Bénin), l’un des avocats de l’Etat togolais.

Mais pourquoi les arrêts de la Cour de justice de la CEDEAO font souvent l’objet de diverses interprétations ? Quelle est la compétence de la Cour ? Quelle sera la suite à donner à ce dossier ? Etc....Lisez les réponses de Me Archange Gabriel Dossou dans une interview exclusive à l’Agence Savoir News.

Savoir News : Le 3 Juillet dernier, la Cour de justice de la CEDEAO a rendu son arrêt dans l’affaire qui oppose Kpatcha Gnassingbé et co-détenus et l’Etat togolais. Pouvez-vous nous rappeler les grandes lignes de cette décision ?

Me Archange Gabriel Dossou : Pour tarir la source de toutes spéculations sur les grandes lignes de l’Arrêt en date du 3 juillet 2013 rendu par la Cour de justice de la Communauté CEDEAO, je mets à votre disposition le dispositif dudit Arrêt en vue de vous permettre de vous rendre compte de ce qui y est décidé. Je n’ose pas douter que le bon sens vous permette de déduire l’essentiel à retenir de la décision encore moins de faire votre propre analyse de la situation qu’on essaye de créer au travers de la juridiction communautaire interposée.

Q : Quelle est la compétence de la Cour de justice de la CEDEAO ? Et pourquoi, ces décisions font souvent l’objet de diverses interprétations, car le problème s’est aussi posé dans l’affaire des députés renvoyés du Parlement.

R : La Cour de justice de la CEDEAO statue exclusivement en matière des droits de l’homme. Pas plus. Elle n’est ni une juridiction d’appel ni de cassation pour les tribunaux et cours des États membres. Ainsi elle ne saurait juger à nouveau ce qui l’a déjà été au niveau des juridictions nationales dont elle refuse d’être le censeur suivant sa propre jurisprudence. En revanche, elle examine toujours tout ce qui touche aux droits de l’homme pour dire dans quelles mesures lesdits droits ont été violés ou non. Ce faisant elle ne remet pas en cause la souveraineté des États membres ni celle des tribunaux et cours de ces États.

Q : Selon les avocats des personnes condamnées, Kpatcha Gnassingbé et co-détenus "doivent être libérés, parce que l’élément essentiel du dispositif du droit a été violé". Pour ces derniers, "toutes les condamnations sont nulles et de nul effet, une fois que le droit à un procès équitable n’est pas respecté". Que répondez-vous à vos "adversaires" ?

R : Le droit à un procès équitable suppose que toutes les parties à un procès aient été mises en possession des mêmes moyens devant une Autorité judiciaire et/ou une juridiction de jugement. Je doute que nos contradicteurs vous disent en quoi ils ont été empêchés de jouir de leurs droits sauf à vouloir refaire plusieurs procès ayant déjà été sanctionnés par maintes décisions passées en force de chose jugée sinon devenues définitives. Et la cour de justice de la CEDEAO en est si consciente que pour la réparation des préjudices allégués par les accusés, elle leur a servi pour "toutes causes de préjudice" les sommes contenues dans le dispositif en votre possession. La cour est allée plus loin en octroyant à ceux qui n’ont été victimes d’aucun acte de tortures, des dommages-intérêts.

Ce qui paraît essentiel pour nos contradicteurs en marge de la précision sinon du refus de la Cour à ordonner la libération des requérants-détenus, est leur droit à commenter voire à interpréter la décision de la Cour. Personne ne peut non plus interdire aux Confrères de consoler les requérants au moyen de leurs commentaires. Il est à souhaiter que d’autres juristes moins passionnés en fassent autant pour nous permettre de corriger ce qui doit l’être ou de nous dire si la Cour a rendu une décision "irréprochable".

Cela vaut également pour l’affaire des députés en ce que la cour composée exclusivement d’hommes ne saurait prétendre rendre des décisions parfaites. Toutefois, qu’elle que soit la jeunesse ou l’expérience dont elle peut se prévaloir ou les excuses qu’on pourrait lui concéder, la Cour doit rester proche du droit et n’avoir comme guide que la loi, rien que la loi. Pour finir, n’oublions pas non plus que plusieurs systèmes juridiques issus de plusieurs États membres outre leurs réalités socio-politiques et économiques respectives s’y invitent et s’y expriment devant cette Cour !

Q : Quelle sera la suite à donner à ce dossier ? Vos "adversaires" pourront-ils retourner à nouveau devant la Cour ? Ou pourront-ils porter l’affaire devant d’autres juridictions ?

R : Il est quasiment impossible de porter la même cause que la présente devant d’autres juridictions.

Cependant la voie de l’interprétation, de la révision outre celle de la tierce opposition reste ouverte au profit de toutes les parties. Sans chercher à verser dans un cours de procédure, disons tout simplement que la voie de la tierce opposition est ouverte à celui qui n’est pas partie au procès ou qui y était absente mais à qui la décision rendue crée des dommages. C’est dire que cette voie est fermée aux deux parties .Il subsiste la révision et l’interprétation.

Aucun fait nouveau ne saurait justifier pour l’heure une quelconque révision pas plus que l’arrêt de la Cour de la communauté paraisse si équivoque pour induire une procédure en interprétation. Mais sait-on jamais ! Restons serein pour observer toutes les parties... FIN

Propos recueillis par Junior AUREL

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