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Carlos Lopes (économiste): auto-financement de l’UA, «la machine est en marche»
Publié le mercredi 5 juillet 2017  |  RFI


© Autre presse
Carlos Lopez


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Au 29ème sommet de l'UA à Addis Abeba, tout le monde parle de la réforme de l'institution. Mais de quelle réforme s’agit-il ? L’économiste Bissau-Guinéen Carlos Lopes enseigne à l'université du Cap et fait partie du comité de réforme de l'Union africaine piloté par le président rwandais Paul Kagame. Il répond à nos envoyés spéciaux.

RFI : La bataille de l’autofinancement est-ce qu’elle est gagnable et d’ici combien de temps ?

Carlos Lopes : Je pense que l’Union africaine maintenant a trouvé la formule. 0,2% des tarifs sur les importations du continent permettent d’avoir même plus que ce dont on a besoin actuellement dans l’Union africaine. Ceci dit, il y a un certain nombre de trépidations, des difficultés, qui sont liées au fait que techniquement, pour imposer n’importe quelle mesure tarifaire, il y a des éléments de négociation commerciale et il y a aussi des éléments de cadre juridique national. Il y a un certain nombre de pays qui invoquent que leur Constitution ne permet pas telle chose, d’autres qui disent que l’OMC pourrait être un obstacle… Nous avons passé en revue l’ensemble de ces difficultés et nous estimons qu’elles sont toutes gérables. Mais bien sûr, ça va prendre du temps jusqu’à ce que tout le monde soit confortable. Heureusement, il y a déjà un nombre significatif de pays qui ont avancé, dix sont déjà complètement prêts, une douzaine de pays additionnels sont sur la route. Donc je crois qu’on a mis la machine en marche. Si on arrive d’ici à la fin de l’année à avoir la majorité des pays africains qui sont déjà dans ce mouvement, je pense que le pari sera gagné.

L’autofinancement est basé en effet sur une taxe de 0,2% sur les produits non africains qui sont importés en Afrique. Est-ce que ça ne crée pas une discrimination entre produits africains et non africains ? Est-ce que ce n’est pas contraire aux règles de l’OMC et du commerce international ?

C’est justement ce qu’un certain nombre d’analystes et même de gouvernements pensent. Mais nous ne pensons pas que ça s’applique, parce qu’il y a toutes sortes de libertés qui sont dans le domaine national, qui permettent des ajustements tarifaires. Donc il suffit maintenant de caser cette taxe au bon endroit.

Dans les ajustements tarifaires ?

Dans les ajustements qui sont possibles. Mais bien sûr, ça dépend beaucoup de l’argumentaire qui est utilisé par chaque pays. Si on dit, par exemple, que dans tel pays, il n’est pas possible de contribuer à une organisation internationale à travers une taxe, on n’a qu’à dire que la taxe n’est pas pour cela, que la taxe est pour permettre le meilleur positionnement du pays dans le monde et ensuite rétroactivement donner le montant nécessaire aux organismes en question.

Ça, c’est pour l’Afrique du Sud ?

Je pense qu’il y a d’autres pays qui sont aussi avec ce type de difficultés, mais je pense que tout est gérable.

Mais franchement, est-ce qu’il n’y a pas quelques pays qui s’abritent derrière cette fameuse Organisation mondiale du commerce pour en fait refuser le principe d’une taxe, qui pourrait les fâcher avec certains de leurs partenaires commerciaux non africains ?

C’est vraiment difficile d’imaginer que ça puisse poser problème avec 0,2%. C’est vraiment difficile d’imaginer que des pays africains ne soient pas pour l’autonomie de l’Union africaine.

Dans son discours d’ouverture, le Tchadien Moussa Faki Mahamat a déploré ce lundi que la plupart des décisions qui sont prises par l’Union africaine ne sont pas appliquées. Mais comment changer cela ?

L’objectif de la réforme ne s’arrête pas dans le financement. Je pense qu’il faut un peu de rationalisation. Nous proposons dans la réforme que le nombre soit réduit drastiquement et qu’une bonne partie soit passée, si j’ose dire, aux communautés économiques régionales.

Est-ce que cette présidence tournante, un président tous les ans, c’est satisfaisant ou c’est trop rapide ?

Nous avons beaucoup réfléchi là-dessus et nous sommes arrivés à la conclusion que ce n’était pas une mauvaise chose. Ça permet un niveau d’engagement supérieur parce que c’est très intense. Plus d’une année, c’est presque impossible pour un président de se permettre de consacrer les énergies nécessaires au volet continental, mais il fallait peut-être compléter cela avec une dimension de continuité. C’est pourquoi nous avons proposé l’établissement d’une troïka entre les trois présidents – celui qui part, celui qui vient et celui qui est effectivement en charge – et je pense que c’est une bonne formule.

Donc cette année, on aurait une troïka avec le président Deby du Tchad qui était aux commandes l’année dernière…

Il y a le président Condé qui est le président en exercice jusqu’à la fin de l’année et les pays vont confirmer l’élection d’un nouveau président qui commence déjà à entrer dans le processus de la troïka.
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