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Interview de Fambaré Ouattara Natchaba : «La Constitution de 1992 était imparfaite et tout juriste de bonne foi va vous dire qu’elle était imparfaite»
Publié le mercredi 20 septembre 2017  |  AfreePress


© aLome.com par Parfait
Deux dignitaires du régime EYADEMA: MM. Barry Moussa Barqué (g) & NATCHABA.


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En décembre 2002, il est l’un des grands acteurs de la révision de la Constitution de 1992 dont l’opposition réclame aujourd’hui le retour intégrale. Lui, c’est l’ancien président de l’Assemblée nationale, Fambaré Ouattara Natchaba et ancien cadre du parti au pouvoir, le RPT. Dans une interview qu’il a accordée mardi à l’Agence de presse Afreepress, il revient sur le débat sur le retour de la Constitution de 1992, la polémique de la rétroactivité ou non de la loi constitutionnelle et sur les « motivations cachées » de la lutte de Me Tikpi Atchadam et met en garde contre des conséquences « fâcheuses ».

Lire l’intégralité de l’entretien.

Afreepress : Qu’est-ce qui vous a poussé le RPT en 2002 à modifier la Constitution de 1992 ?

Fambaré Ouattara Natchaba : Je vous remercie. Je connais les mécanismes de la rédaction de la Constitution de 1992 et son adoption par référendum et l’état dans lequel était le pays. En 2002 nous avons senti la nécessité de réformer cette Constitution, de la toiletter comme vous le dites.


Nous avons appliqué cette constitution au sortir des élections législatives de 1994. La Constitution de 1992 disait que le président de la République nomme le Premier ministre dans la majorité parlementaire. Le RPT à lui seul avait la majorité relative mais quand l’UTD de M. Edem Kodjo s’ajoutait au CAR de Me Yawovi Agboyibo, ils avaient la majorité absolue donc ils étaient la majorité. C’est dans cette atmosphère que le président Eyadema leur a demandé de lui proposer un nom. Ils n’ont pas réussi à le faire.

Nous avons fait ensemble une réunion avec le grand frère Edem Kodjo, le grand frère Agboyibo, Barqué, le doyen Vouley, le Colonel Assila, moi-même, le président Eyadema et avons tenté de les mettre ensemble. Mais ça n’a pas été fait et donc le pays était bloqué et le président Eyadema estimé qu’étant donné que M. Edem Kodjo avait déjà été ministre de l’Economie et des Finances et qu’il avait été Secrétaire général de l’OUA, il était plus à même de diriger un gouvernement parce que son carnet d’adresse était bien plus fourni que celui de Me Agboyibo.

Mais il a pris soin de demander au RPT de ne pas présenter un candidat au perchoir du parlement contre Me Agboyibo et nous avons accepté. C’est sur ces faits qu’on a nommé M. Edem Kodjo comme Premier ministre du Togo. Le jour de son investiture, le CAR était absent de l’hémicycle. Et c’est le RPT, plus les voix de l’UTD qui ont investi Edem Kodjo, Premier ministre.

Il nous était donc redevable sans quoi son programme ne passait pas. C’est une anomalie réelle puisque l’opposition qui est majoritaire, ne l’avait pas investi. Lorsque M. Kodjo a pris le gouvernement, il a commencé à vouloir appliquer les pouvoirs qui sont concédés au Premier ministre dans la Constitution de 1992 notamment celui de nommer aux emplois civils et militaires or on s’était entendus que ce serait en concertation avec le chef de l’Etat qui est lui, élu au suffrage universel.

Si vous vous souvenez, nous avons rejeté les budgets de Kodjo une ou deux fois. Mais finissait par les voter. Donc c’était difficile. Si le président Eyadema et Edem Kodjo ont pu s’attendre de 1994 à 1996, c’était le fait que les deux hommes se connaissaient. Ils savaient comment faire pour ne pas laisser l’Etat sombrer. Donc ce n’était plus la Constitution de 1992 qu’on appliquait.

En 1996, il y a eu des partielles et personne ne s’était présenté contre le RPT et nous nous sommes retrouvés face à l’UTD et nous avons enlevé les sièges. Nous sommes devenus majoritaires à l’Assemblée nationale. C’est en ce moment que l’opposition a commencé à nous appeler « Assemblée monocolore », Assemblée tant, Assemblée tant. Et si vous vous souvenez, nous étions allés aussi au CPS, Assemblée paritaire de suivi avec l’Union européenne, l’Allemagne et la France et à la dernière séance du CPS, l’opposition avait demandé la dissolution de l’Assemblée nationale et l’organisation de nouvelles élections. C’était à la dernière réunion du CPS qui a eu lieu le 1er mai 2002 au siège de l’Unesco à Paris. J’ai déclaré devant toutes les délégations de l’opposition et tous nos médiateurs que l’Assemblée sera dissoute conformément aux vœux de l’opposition, qu’on irait à des élections législatives anticipées mais si vous ne participez pas, je vous avertis que le RPT sera majoritaire et si nous nous sommes majoritaires, nous allons changer la Constitution de 1992 pour sortir de ces ambiguïtés.

Afreepress : Donc vous avez ouvertement lancé cet avertissement à l’opposition en 2002 à Paris ?

Fambaré Ouattara Natchaba : Oui, en mai 2002 devant eux tous. Et nous avons été réellement dissouts. Nous sommes allés aux élections et là il y a eu apparition d’autres partis politiques comme celui de Harry Olympio et la résurgence de la Juvento qui avait eu des sièges dans l’Akposso. Et c’est comme cela que nous avons toiletté la Constitution de 1992.

Afreepress : Mais pourquoi il était si nécessaire de toiletter cette constitution ?

Fambaré Ouattara Natchaba : Je vous ai dit que de 1994 à 1995, il était très difficile au Premier ministre et au Président de la République de s’entendre. Il fallait toiletter cette constitution parce que l’opposition fractionnée, n’avait pas pu s’entendre pour désigner un Premier ministre et c’est bien ensuite que nous avons levé le verrou de la limitation des mandats présidentiels.

Afreepress : La Constitution de 1992 était-elle si imparfaite à vos yeux ?

Fambaré Ouattara Natchaba : La Constitution de 1992 était imparfaite et tout juriste de bonne foi va vous dire qu’elle était imparfaite. Prenez la Constitution française qui est la référence. Les pouvoirs du Premier ministre et du Président de la République sont bien définis.

Ici tu es élu chef de l’Etat et en réalité c’est le Premier ministre qui avait tous les pouvoirs. Notre Constitution de 1992 n’est ni réellement présidentielle, ni réellement parlementaire. Elle était au milieu avec des influences négatives car tu retrouves dedans des morceaux de la constitution israélienne, des morceaux de la constitution française, des morceaux de la constitution allemande et je ne voulais pas le dire, les fameux experts qui n’étaient experts en rien ce sont eux qui ont mis leur grains pour dévier la constitution. C’est une constitution qui est inapplicable.

Moi je ne suis plus candidat à rien. Ni à un poste de député ni à un poste de président. Je ne veux pas que mes petits frères laissent leur pays dans cette situation. La Constitution de 1992 a été rédigée premièrement pour empêcher quelqu’un de briguer la magistrature suprême. C’est Me Koffigoh. On a dit dans cette constitution qu’il fallait avoir 45 ans révolus pour être candidat or ils savaient bien que Koffigoh ne l’avait pas. Il y a des choses invraisemblables dans cette constitution même si aujourd’hui, on met un opposant à la place du président de la République, il ne pourra pas gouverner avec cette constitution.

Afreepress : Et dans ce cas, qu’est-ce qu’il faudrait faire aujourd’hui pour essayer d’améliorer les choses ?

Fambaré Ouattara Natchaba : Aujourd’hui, l’opposition demande qu’il faut limiter les mandats et qu’il faut revenir à un scrutin majoritaire à deux tours. D’accord, moi je dis ce n’est pas une mauvaise chose. Le Togo a bien mûri. On peut fort bien accepter la limitation des mandats. Le Togo a évolué. Qu’on limite les mandats, c’est bon. Qu’on fasse le scrutin majoritaire à deux tours pour le président de la République, je dis c’est bon.

Si on veut limiter le mandat des députés je ne trouve pas d’inconvénients, il y a beaucoup de jeunes. Il n’y a pas de raison qu’on veuille limiter le mandat du président et qu’on ne limite pas le mandat des députés.

Mais je vais vous dire la vérité. Vous les Togolais vous avez les germes de la division. Si aujourd’hui même Faure dit je m’en vais, vous n’arriverez jamais à vous entendre. Sinon pourquoi vous ne pouvez pas faire une unité d’action ? Pourquoi le chef de file de l’opposition ne prend-il pas son téléphone pour appeler le chef de l’Etat et lui dire qu’est-ce qu’on fait ?

C’est lui qui est chef de file de l’opposition. C’est lui qui touche les avantages de cette fonction. Il n’a pas besoin d’écrire pour dire que je viens avec le CAP2015, je viens avec telle personne. Il n’a pas besoin d’être accompagné. Les choses sérieuses se disent à deux.

Mais aussi parce que l’opposition est divisée et cette division ne date pas d’aujourd’hui. Lorsque l’opposition avait désigné Edem Kodjo dans ce pays comme candidat unique, il était dans un meeting quand il apprit qu’on lui avait retiré l’investiture. C’est ça le vrai problème parce que chacun veut porter le chapeau. Mais nous à UNIR, quelles que soient nos différences, nous sommes toujours avec Faure. Ça ne veut pas dire que nous n’avons pas de différends mais nous savons faire la part des choses. Privilégier l’intérêt général, oublier nos intérêts particuliers à partir du moment où le pays marche et préserver la paix.

Aucune constitution n’est écrite dans le marbre. C’est compte tenu de l’évolution du pays qu’on peut changer la constitution mais lorsque vous changer la constitution ou que vous faites une constitution pour empêcher une personne, pour chasser une personne, vous ne réussirez jamais.

Afreepress : Si vous étiez à la place du président de la République. Qu’auriez-vous fait pour le retour au calme dans le pays ?

Fambaré Ouattara Natchaba : Je dis que la balle se trouve dans le camp du chef de file de l’opposition. C’est à lui d’approcher le président de la République pour discuter et trouver une solution et non se faire accompagner par une ribambelle de gens qui ont la boulimie de la rue. Il y en a quand ils voient les gens dans la rue, ils jubilent, ils jouissent en même temps. C’est la rue qui est leur objectif final et c’est terrible. Mais comment vous voulez construire un pays avec des comportements comme ça ?

Afreepress : Mais dans ce cas qu’est-ce qu’il faut faire ?

Fambaré Ouattara Natchaba : Qu’est-ce qu’il faut faire ? Prenons d’abord ce qu’on vous offre. Nous avançons et nous négocions ce qu’il reste. Est-ce qu’ils savaient un jour que ceci allait être fait ? Prenez d’abord et continuez par négocier.

Mais ce qu’il faut savoir c’est que l’opposition est engagée dans un processus de coup d’Etat. Si vous ne le savez pas, il faut le savoir aujourd’hui. C’est un processus de prise du pouvoir par la rue. La rue est bien mais la rue est terrible. J’espère qu’ils n’en seront pas eux-mêmes victimes un jour.

Que Faure et Jean-Pierre Fabre se voient et discutent. Ce serait déjà un bon début parce que ceux qui devraient jouer à l’arbitre ont déjà pris position. Les évêques sont disqualifiés parce qu’ils ont déjà pris position et l’ont fait connaître. Or dans une église, il y a des citoyens catholiques proches de UNIR et d’autres qui sont proches de l’opposition.

L’Eglise est une institution qu’on respecte beaucoup et moi j’ai un très grand respect pour l’Eglise parce que c’est une religion révélée. Si les imams se mettaient à faire ça, moi je ne serai pas non plus d’accord et heureusement, il n’y a aucun imam (peut-être à titre personnel) ne peut se lever aujourd’hui pour dire, nous soutenons Faure ou nous soutenons l’opposition.

La situation que nous vivons, mérite que les gens s’asseyent et qu’ils parlent. Je ne suis pas sûr que l’ANC dispose de toutes les informations sur les autres formations politiques.

Est-il bien que quelqu’un se lève et fasse un meeting où il fait jurer devant lui que c’est le coran ou la mort ? Moi j’ai dans ma famille, des catholiques, des protestants et des musulmans. Moi-même je suis musulman mais il faut que les gens fassent attention. Il ne faut pas que les gens fassent des marches sans connaître les enjeux, ce qu’il y a en dessous. Et ce qu’il y a en dessous, c’est un enjeu extrêmement important.

Moi ma ville c’est Sanssané Mango. Nous sommes arrivés au Togo en 1750 avec la guerre et l’islam pour nous asseoir. On est musulmans à plus de 98% à Mango. Donc il n’y aura pas un djihadiste qui va venir pour nous apprendre l’islam. On va le chasser.

Je dis que vous les journalistes vous ne fouiller pas beaucoup. Vous ne vous interrogez pas. La diaspora c’est combien de personnes pour que les gens disposent d’autant de fonds ?

Il y a des financements de sources très obscures et bientôt les Occidentaux vont vous le dire. Je ne veux pas que mon pays soit aligné sur ces choses-là. Nous avons vécu dans ce pays ensemble catholiques, musulmans et protestants. Aujourd’hui ce qui est en train de se passer, il faut que nous soyons attentifs pour le dénoncer. Quand ça commencé au Mali, est-ce qu’il y a eu de l’accalmie ? Et au Burkina ? Au Togo, le jour où on ira assassiner les gens au Radisson Blu ou dans un grand hôtel, les Togolais vont prendre des valises et fuir au Ghana.

Afreepress : Que dites-vous du débat sur la rétroactivité de la loi ?

Fambaré Ouattara Natchaba : La loi n’est jamais rétroactive. Surtout en matière constitutionnelle. On dit de façon général que le droit ne dispose que pour l’avenir. Quand vous adoptez une disposition constitutionnelle, elle ne peut pas s’appliquer à la situation qui est passée. Ce n’est pas vrai et il y a des exemples qui sont sous nos yeux. Il y a eu une jurisprudence déjà sur ce sujet au Burkina Faso et la Cour Constitutionnelle a dit que la loi ne peut pas être rétroactive. Il y a eu une autre jurisprudence au Sénégal et les juges ont dit que la loi constitutionnelle ne saurait être rétroactive. Ce qui est conforme au droit.

On va nous dire que ce sont des pays africains. Mais lorsque le président Chirac avait voulu passer du septennat au quinquennat, le Conseil Constitutionnel a dit qu’elle ne peut pas s’appliquer à son mandat en cours et qu’il fallait qu’il achève ses 7 ans.

Faure a fait trois mandats sous l’ancienne constitution. Son mandat finira en 2020. Si ça fini en 2020, il faut négocier avec lui pour voir s’il se présentera ou pas. Mais du point de vue du droit, on est dans une nouvelle situation.



Interview réalisée par Olivier A.
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