La cérémonie de présentation de vœux entre le garde des sceaux et ses différents collaborateurs a été des plus attractives.
Lundi, dans la grande salle de la cour d’appel de Lomé, abusivement baptisée « Palais du Renouveau », magistrats, avocats, huissiers, notaires…ont formulé leurs vœux de bonne santé et de paix profonde au ministre-évangéliste.
Comme l’on peut bien l’imaginer, c’était aussi l’occasion pour chaque corps constitué de formuler ses doléances, ses préoccupations, ses attentes etc.
Kofi Esaw dit être conscient des maux qui ternissent l’image de la justice togolaise. Il en est tellement conscient qu’il ne sait finalement par quel bout prendre pour commencer à les résoudre. Alors qu’il faudra bien qu’il les résolve, autrement, sa présence avec la carapace de pasteur-évangéliste ne serait qu’un maquillage au front de cette justice malade.
A quoi cela sert-il de remplacer un charlatan du droit par un évangéliste à la tête de la justice togolaise si ce dernier ne peut en rien l’impacter par une bonne dose de provision spirituelle ?
L’on parle souvent de la corruption au sein du corps judiciaire. Mais en réalité cette gangrène ne ronge pas autant ce corps que celle de l’instrumentalisation.
La vraie plaie dont souffrent les magistrats du Togo est et reste leur abêtissement, leur crétinisation par l’officiel.
Oui, officiers, hauts-cadres, ministres et autres s’ingèrent à outrance dans les dossiers judiciaires et forcent les juges à se fourvoyer dans la conduite des dossiers qu’ils ont la charge de trancher. C’est un grave problème qui plonge le Togo et sa justice dans un vrai précipice.
Les délirantes décisions que nos juges rendent ces derniers temps prouvent à suffisance que notre justice a encore du pain sur la planche. Mais ce qui est encore plus aberrant et vraiment dommage pour ces magistrats, c’est leur manque d’audace.
C’est vrai qu’à regarder de près, l’autorité, en prévision des coups foireux qu’elle a en perspective, met toujours à des postes sensibles aussi bien à la justice que dans d’autres secteurs, des éléments naturellement malléables.
A vue d’œil, leur visage et leur morphologie reflètent d’emblée la lâcheté, l’inconstance et la manque évident de personnalité. C’est ainsi que très souvent ils trainent de multiples casseroles que l’autorité agite constamment telle une épée de Damoclès pour les contraindre à lui rendre service dans des dossiers signalés.
Et c’est donc ce genre de plaisantins qui, par leur impertinence et leur lâcheté, jettent de l’opprobre sur l’ensemble du corps judiciaire à travers leurs décisions démentielles qui n’ont rien à voir avec le droit.
Dans un tel contexte, un garde des sceaux, si propre et religieux soit-il, peut-il avoir les moyens de dresser ces brebis égarées surtout dans un système aussi alambiqué que celui qu’incarne le fils d’Eyadema ? Rien n’est moins sûr puisque le Ministre lui-même est un pur produit de ce système.
Il ne pourrait y laisser un impact différent que si lui-même apprend à être chaque jour cohérent avec sa foi et ses convictions spirituelles. Un homme droit œuvre toujours pour faire régner la droiture en lui et autour de lui. Et cela se remarque d’emblée dans son allure et dans ses actes.
Mais s’il se croit droit et se laisse chaque jour déchiré par les constants balbutiements qui caractérisent l’homme ordinaire, s’il subit lui aussi, les événements de la vie plutôt que de se faire obéir de cette vie, il ne pourra rien.
Le grand espoir suscité auprès du public togolais par la venue de Kofi Esaw à la Justice semble s’étioler au jour le jour au regard de la persistance et même de l’aggravation de la démence judiciaire.
C’est juste à se demander que fait-il au juste à cette chancellerie ?
Est-il là pour accentuer l’instrumentalisation éhontée de la justice ou sait-il réellement ce que Dieu, le juge de tous les juges, attend de lui en sa qualité "d’homme de Dieu" placé à la tête de cette justice des hommes par la seule volonté de ce Dieu qu’il dit servir ?
Dans tous les cas la roue de l’histoire tourne, et n’y laissent de traces que les hommes et femmes qui afficheront leur audace et leur constance devant les grands défis parfois insurmontables, qu’ils arrivent, malgré tout, à surmonter.
Kofi Esaw veut-il compter parmi les audacieux de ce monde qui sont prêts à frapper droit au cœur de tout ce qui peut les empêcher d’affirmer leur foi et conviction ?
Se donne-t-il les moyens moraux, intellectuels et spirituels nécessaires pour se faire enrôler dans l’armée des champions qui se dopent de puissance pour relever tous les défis qui se présentent à eux ?
Seul le temps pourra donner de réponse à ces interrogations légitimes.