Depuis que cette crise politique a commencé avec l’entrée en scène de Tikpi Atchadam, les manifestations de l’opposition ont pris une nouvelle tournure qui a fait naître chez ses partisans l’espoir d’une alternance imminente au sommet de l’État.
Mais au fur et à mesure que les jours passent, tout porte à croire que le salut n’est peut-être pas pour demain. Un sentiment que viennent renforcer deux nouveaux éléments majeurs: le sommet des chefs d’Etat de la Cedeao et l’interview de Faure Gnassingbé à Jeune Afrique.
L’opposition togolaise est bien seule au monde. Depuis le début de la crise politique actuelle, elle n’a obtenu aucun soutien extérieur franc. Alors qu’elle appelait jeudi les chefs d’État de la CEDEAO à “mettre fin à la situation politique actuelle, le 52eme sommet de la CEDEAO a plutôt apporté son soutien au gouvernement et renvoyé l’opposition au dialogue. Il n’y a donc rien à attendre de cette institution. À la veille de ce sommet, Djimon Oré, le président du Front des Patriotes pour la Démocratie (FPD) mettait en garde. “Ces présidents ne viendront pas dire à Faure Gnassingbé de quitter le pouvoir parce qu’une partie de l’opposition togolaise le leur a demandé“, avait-il déclaré sur une radio de la place.
Pendant ce temps, tout semble indiquer que Faure Gnassingbé est loin d’être hors-jeu. Car hormis quelques déclarations de principes et communiqués laconiques, aucun partenaire extérieur du Togo n’a délivré de carton rouge au locataire du Palais de la Marina. L’interview accordée à Jeune Afrique est la preuve qu’il essaie de pousser son avantage. Il peut compter sur la complaisance du monde extérieur. Déjà Emmanuel Macron lui a donné un blanc-seing pour 2020 et la Cedeao s’échine à dégonfler la contestation. L’opposition, qui voudrait faire jouer la jurisprudence Jammeh, est à court de soutiens et de stratégies. Dialoguera ou ne dialoguera pas? À quelles conditions ? Aux siennes ou à celles que tentent de lui imposer la Primature ? L’opposition semble avoir perdu la main, au profit de Faure Gnassingbé qui ne cesse de se renforcer. Il est toujours en piste et se renforce au détriment d’une opposition qui se trouve actuellement dans un navire qui tangue, et qui est à recherche d’une bouée de sauvetage.
Démission ou limitation des mandats ? Révolution ou élections ? L’opposition est réduite à ne reposer que sur le hasard, Dieu ou un coup de folie (fondre sur la Présidence: un risque qu’il ne faut pas oser prendre).
Des États-Unis à la France en passant par l’OIF ou la CEDEAO, personne ne semble cautionner l’aventurisme révolutionnaire ou la démocratie au bazooka. Le contexte géopolitique a changé. Le messianisme démocratique américain a cédé le berceau à la préférence nationale de Donald Trump. La Françafrique lie les mains de la France qui ne veut pas paraître néo-impérialiste.
Face à cette situation, deux alternatives s’offrent à l’opposition : la coalition des 14 ne peut reposer que sur la rue ou miser sur un hypothétique effondrement du régime sur lui-même. La deuxième hypothèse paraît davantage plausible et commande donc que d’ores et déjà, des stratégies de conquête du pouvoir par les urnes commencent à se mettre en place.