« Une passion change souvent en un moment le caractère: l’indiscret devient diplomate, le poltron est tout à coup brave » (Honoré de Balzac, La Comédie humaine)
Compte tenu du rôle qu’il a joué aux côtés du Mgr Nicodème Barrigah pour amener les protagonistes togolais à une entente minimale avant la tenue des élections, l’Ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique au Togo, Robert Whitehead, devrait faire partie des tout dernières personnes à se prononcer sur le scrutin du 25 juillet. Mais il a manqué de tact et de circonspection en rendant public lundi un communiqué tendancieux et contradictoire. En dépit de nombreux dysfonctionnements constatés le jour du scrutin, le diplomate américain félicite la CENI totalement acquise au pouvoir « d’avoir assuré un vote ordonné et résolu les problèmes logistiques identifié au début du processus ».
« Nous invitons tous les partis politiques à respecter la volonté du peuple togolais, et à résoudre tout différend de manière pacifique, conformément aux dispositions du Code électoral », précise le communiqué. En clair, M. Whitehead demande à l’opposition de « respecter la volonté du peuple », c’est-à-dire les résultats provisoires publiés par la CENI et qui accordent 62 sièges au RPT-UNIR, avant leur validation par la Cour constitutionnelle. Et au même moment qu’il appelle au respect de la « volonté du peuple togolais », il suggère la résolution de « tout différend de manière pacifique ». De deux choses, l’une : soit la « volonté du peuple togolais » est actée et tout le monde se tait ; soit on est conscient qu’il y a eu des manquements – dans ce cas ce n’est plus la « volonté du peuple togolais » - et on laisse ceux qui se sentent lésés de protester.
De plus, en parlant de résolution de « tout différend de manière pacifique, conformément aux dispositions du Code électoral », ce qui se fait d’ailleurs dans tous les pays normaux, l’Ambassadeur américain semble avoir oublié la dernière forfaiture de la Cour constitutionnelle. On se souvient qu’il n’a pu rien faire lorsqu’il a été informé par les deux regroupements de l’opposition de la violation du Code électoral par cette Cour qui a invalidé par pure fantaisie des listes de l’opposition, Tous les ambassadeurs occidentaux savaient que sur ce point l’opposition avait eu raison mais ils se sont accommodés du fait accompli. Qu’est-ce qui garantit à l’Ambassadeur américain que les fameux juges constitutionnels ont fait leur mue en l’espace de trois semaines pour donner raison à cette opposition qu’ils ont sciemment écartée dans certaines circonscriptions électorales ?
De grâce, que cet Ambassadeur nous épargne de cette bondieuserie ! Si c’est la CENI-là qu’il congratule, qui organise les élections au Pays de l’Oncle Sam, ou si les choses y étaient faites de la même façon avec toutes les institutions acquises aux Républicains, avouons que Barack Obama ne sera jamais élu Sénateur puis Président. Ce petit détour pour dire que la démocratie est universelle et ne saurait perdre cette valeur au fur et à mesure qu’on s’approche des tropiques. Comme Alexis de Tocqueville, auteur de « De la démocratie à l’Amérique », nous Togolais, nous sommes souvent séduits par le succès démocratique des Etats-Unis et nous souhaitons la même réussite pour notre pays. Pas cette démocratie à l’africaine qui consiste à faire main basse sur toutes les institutions concernées par les élections, bourrer les urnes, organiser des votes multiples, instituer des bureaux de vote fictifs, faire voter les corps habillés avant… et qu’on appelle ici « la volonté du peuple togolais » juste pour sauvegarder les intérêts … de Contour Global …
Zeus AZIADOUVO
VIA LIBERTE HEBDO TOGO
![](http://news.aLome.com/img_photos/M/robert_whitehead__lambassadeur_des_etats-unis_au_togo.jpg")
