En ces temps de pluie qui s’annoncent, les lamantins au Togo sont menacés. C’est une course contre la montre pour sauver cette espèce en danger, même s’il y a deux ans, un trafiquant de lamantins a été arrêté non loin d’Aného. En effet, il suffit de sillonner le long de côte et du lac Togo, pour constater l’ampleur de la menace qui pèse sur ces espèces protégées. Des filets non conventionnels sont jetés chaque fois dans les eaux par les pêcheurs. Du coup, les espèces sont menacées de se reproduire, y compris le lamantin.
Pour les populations locales, la chasse du lamantin permet de gagner de l’argent en vendant sa chair et en extrayant ses sous-produits comme ses dents et sa graisse. Pourtant, cette espèce menacée par la chasse, la dégradation de son habitat et des ouvrages d’eau qui limitent sa migration, est un indicateur de la santé des écosystèmes des mangroves et d’eaux douces.
Selon un riverain du lac Togo, le poisson se faire rare à cause du lamantin qui bien que mammifère aquatique herbivore, se nourrit aussi de poisson. « Si mon filet en prend, je vais le vendre comme je vends les poissons pris dans mon filet. Les gens arrêtent des lamantins, mais en catimini. »
Ce riverain reconnait aussi que certains pêcheurs utilisent des filets à mailles illégales, ce qui selon lui, ne favorise pas la régénération des espèces protégées marines, dont le lamantin.
Les lamantins vivent à Kpéssi, Agbodrafo, Abaékopé (proche d’Aného) et dans le lac Togo, Ekpui, Togoville et Kéta. Ils sont dans les fleuves Zio, Haho et Mono. Selon l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses ressources (UICN), il n’y a pas d’estimation globale de la population du lamantin d’Afrique de l’ouest disponible, mais qu’il y’a quelques centaines de lamantins menacés dans les eaux du Togo.
Le lamantin d’Afrique figure sur la liste rouge des espèces en danger de l’UICN, car il estchassé pour sa viande et ses parties utilisées dans la médecine traditionnelle. Mais la principale menace pour le lamantin parès la chasse est le changement climatique.
Le Ministère de l’Environnement et des Ressources Forestières (MERF) en vue de conserver les aires protégées a mis en place en 2013, le Projet de Renforcement du rôle de conservation du système national des Aires Protégées du Togo (PRAPT). « Le PRAPT est appelé à améliorer la cadre juridique, politique et institutionnel pour le patrimoine des Aires Protégées afin de protéger les espèces menacées dont les lamantins qui sont menacés. », avait déclaré le MERF lors du lancement du projet.
Le Togo, lors de la conférence des Nations Unies sur la biodiversité tenue en octobre 2010 à Nagoya au Japon, s’était mis d’accord sur la nécessité de porter le pourcentage des surfaces terrestres protégées de 13,5% à 17% et de restaurer des écosystèmes dégradés d’ici 2020, suivant en cela un consensus international sur le sujet.
Selon un fonctionnaire au MERF, l’avenir des lamantins au Togo passe par une meilleure connaissance, une bonne gestion de l’environnement avec l’utilisation des ressources dans l’harmonie, dans la concertation. Il ajoute que toute initiative allant dans le sens de protéger les lamantins, joue un rôle important dans l’équilibre de l’écosystème marin. « Au niveau du MERF, on manque de moyens. Cela nécessite un état des lieux, des enquêtes et discussions avec les populations pour une meilleure conservation. Il faut aussi une bonne étude pour mieux connaître l’espèce afin de mieux la protéger », ajoutant également qu’il est important de maîtriser la migration saisonnière des lamantins et de proposer un repos biologique afin de les protéger durablement.
Le lamantin, scientifiquement appelé « Trichechus senegalensis » qui se retrouve dans les fleuves et lacs du Togo est dans la classe A, Annexe I de la loi du 16 janvier 1968 réglementant la protection de la faune et l’exercice de la chasse au Togo. Ce qui en fait un animal intégralement protégé par les lois togolaises.
Il utilise des habitats écologiques relativement chauds avec au minimum 18°C. Il est par nature solitaire. Mais en Afrique, les lamantins se déplacent en famille (mâle, femelle et petit). Ils effectuent des mouvements saisonniers en fonction du niveau de l’eau. Lorsque le niveau d’eau baisse, les lamantins vont plus en profondeur de la marre ou du fleuve pour mieux trouver des algues et se nourrir, mais lorsque que le niveau d’eau monte ou qu’il y a une crue, ils se déplacent à un autre lieu, soit pour se nourrir soit pour se reproduire. Son aire de répartition géographique s’étend de la zone transfrontalière entre le Togo et le Sénégal en Angola en passant par les zones humides intérieures du Mali, du Niger et du Tchad.
Le lamantin ouest-africain contribue à la bonne régulation de la végétation aquatique, et au-delà de l’écosystème marin. Il est source d’inspiration de plusieurs mythes et légendes africains et fait l’objet de rituels de chasse.
Malgré cette protection, le lamantin reste fragile du fait d’une mauvaise application des législations. C’est pourquoi des efforts doivent être faits pour l’amélioration de la connaissance scientifique sur l’espèce, l’éducation et la sensibilisation des communautés riveraines de son habitat, pour que tous comprennent l’importance du lamantin dans la biodiversité et la régulation des écosystèmes.