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Propositions de Gally, Ajavon et Degli: Une sortie ratée

Publié le vendredi 8 juin 2018  |  Focus Infos
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© aLome.com par Edem Gadegbeku et Dodo Abalo
La Conférence de presse au CESAL du trio d`avocats Degli-Ajavon-Djovi-Gally empêchée par des gendarmes
Lomé, le 29 mai 2018. CESAL. La Conférence de presse au CESAL ce mardi du trio d`avocats Degli-Ajavon-Djovi-Gally empêchée par des gendarmes. Les Conférenciers ont été empêchés de regagner la salle prévue pour leur rencontre avec la presse. Les gendarmes qui ont empêché le trio d`avocats de tenir sa Conférence de presse invoquent qu`ils agissent au nom d`une association (APED) qui n`a pas de base légale.
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Ils auraient pu mieux faire. Ils auraient même dû mieux faire. Au regard de leur profil, de leur parcours et de leur engagement en faveur d’un Togo moderne, démocratique et réconcilié. Mais les avocats Djovi Gally, Zeus Ajavon et Jean Dégli, se sont contentés d’un service minimum, reprenant quasi in extenso les solutions de sortie de crise proposées par l’opposition, ratant ainsi leur propre sortie.

L’annonce de la conférence de presse qu’allaient tenir ce 29 mai les avocats Djovi Gally, Zeus Ajavon et Jean Dégli, sous l’égide de l’Association pour la promotion de l’état de droit (APED) devait constituer une séquence importante dans le contexte politique actuel , avec le blocage du dialogue et la persistance de la crise. Notamment au regard du profil du trio. D’abord sur leurs compétences et expertises. Gally comme Dégli sont (ou ont été ?) de brillants avocats tandis que Ajavon, s’il l’est devenu plus tard dans sa carrière, a formé à l’université de Lomé (anciennement Université du Bénin), l’essentiel des juristes de notre pays.

Ensuite, pour avoir été pris aux premières loges lors du début du processus démocratique à des degrés divers, Gally et Dégli ayant été par exemple ministres, ils en maîtrisent les contours et ont par ailleurs activement participé à la rédaction ou à la mise en œuvre des textes objets de contentieux aujourd’hui. Enfin, les uns et les autres ont pris du recul vis-à-vis de l’engagement actif sur le terrain.

De fait, leurs propositions étaient très attendues en ce qu’elles devraient être élaborées quasi « scientifiquement », pertinentes, cohérentes et innovantes ; loin des contingences habituelles des formations politiques et des intérêts de ceux qui gravitent autour, sous l’appellation opportune ou non de société civile. Certes, personne n’est assez naïf pour croire que leurs idées seraient des solutions miracles immédiatement exploitables par la classe politique ; celles-ci n’étant à la fin que ce que veulent bien en faire les protagonistes de la crise. Mais elles devaient refléter une expérience certaine et une hauteur de vue assumée. En lieu et place, la plate-forme a été le lieu de généralités et de postures habituellement campées par l’opposition, enlevant malheureusement à l’exercice tout équilibre indispensable à une démarche qui se prétend être une voie de sortie de crise. Cette dernière, intrinsèquement et essentiellement, supposant l’opposition entre deux parties.

IRREALISTES :

Si une partie des propositions du trio peut être considérée comme attendue pour des défenseurs des droits de l’homme, notamment la libération des détenus, l’exercice plein et entier sur toute l’étendue du territoire de la liberté constitutionnelle de manifester, ou encore la mise en œuvre diligente des réformes, d’autres sont plus problématiques. Voire irréalistes , au sens premier du terme, en ce qu’elles n’ont aucune prise sur ni la réalité des institutions ni sur le rapport de force politique, se contentant de reprendre des exigences de la coalition des 14 partis, sans en étayer les motivations, juridiques ou politiques. C’est d’ailleurs la faiblesse essentielle de ces propositions qui ne sont étayées par quelques arguments.

De fait, en demandant « la mise en place d’un Gouvernement de transition avec un premier ministre désigné au sein de l’opposition démocratique », le trio n’explique pas pourquoi et en vertu de quoi, alors qu’un gouvernement issu d’élections pluralistes tenues en 2013 et auxquelles les principales formations politiques du pays ont participé, devrait se faire hara-kiri au profit d’un autre dit de transition, alors même que ce gouvernement n’est pas paralysé dans ses actions et dans la mise en œuvre de sa politique. Ni au nom de quoi, un parlement dont d’ailleurs le mandat arrive à expiration très prochainement, offrant ainsi l’opportunité de son renouvellement et l’occasion d’une nouvelle majorité, devrait être dissous ; alors même qu’il fonctionne normalement, que les députés de la C14 y siègent régulièrement et y perçoivent y compris sans retard, leurs indemnités ?

En outre, l’idée d’une instance internationale pour remplacer la CENI en vue de l’organisation et de la supervision des élections législatives prochaines, des locales et de la présidentielle de 2020 est tout aussi curieuse. En effet, au-delà de l’argument de la souveraineté encore une fois dans un contexte où il n’y a pas de paralysie des institutions, cette proposition ne s’inspire pas suffisamment d’expériences d’ailleurs. Certes, l’idée est de d’établir la confiance des compétiteurs dans les institutions organisant les scrutins et d’en garantir la transparence et l’équité. Mais elle ne prend pas suffisamment en compte le fait dans les deux pays de la sous-région où à l’époque moderne cette expérience a été implémentée, elle ne fut pas tout à fait heureuse.

En octobre 2010, face à la situation explosive précédant le 2è tour des élections présidentielles guinéennes, le général malien Siaka Toumani Sangharé, a été nommé à sa tête, compte tenu de l’impossibilité de trouver une personne neutre faisant l’unanimité des candidats politiques, le syndicaliste Louseny Camara qui la dirigeait, était soupçonné par Cellou Dalein Diallo de rouler pour l’autre Alpha Condé. Si l’élection eut finalement lieu sans trop de heurts, ses résultats ne convainquent pas les partisans de Diallo qui fut annoncé battu, alors même qu’il est arrivé en tête lors du premier tour avec 43% des voix devant Condé 18%. Il a fallu beaucoup de diplomatie et l’appel à d’autres ressorts pour que la situation ne dégénère pas.


Ce qui ne fut pas le cas en Côte d’Ivoire où malgré la certification mise en place par l’ONU et sensée mettre d’accord les candidats, il a fallu une intervention militaire de l’armée française pour mettre fin à la crise post-électorale, opposant Laurent Gbagbo à Alassane Ouattara. C’est dire donc que le recours à des solutions étrangères n’est pas une garantie de non contestation. L’idée du déploiement d’une force de la CEDEAO, avant, pendant et après les élections part aussi d’un bon sentiment. Mais difficile à vendre aux autorités civiles et militaires d’un pays qui n’est pas en guerre et non confronté à une insécurité y compris politique de masse. D’autant plus que les manifestations qu’organise régulièrement la C14 sont encadrées sans difficultés majeures par les forces de l’ordre qui assurent la sécurité de la plupart des leaders lors de leurs déplacements.

En convoquant l’âme et la conscience et uniquement elles, de Faure Gnassingbé par rapport à sa candidature de 2020, les trois avocats reconnaissent implicitement qu’en cas de réformes, y compris avec la mention « en aucun cas nul ne peut faire plus de deux mandats consécutifs » ajoutée à la disposition limitant les mandats présidentiels, le président de la République, s’il le désirait, pourrait juridiquement être de nouveau candidat.

Même s’ils n’ont pas voulu expressément l’exprimer ainsi, sans doute par peur de la réaction du fameux «peuple», il faut tout de même le mettre à leur crédit. Et justement par rapport à ce « peuple », dont les aspirations profondes doivent être prises en compte par la CEDEAO afin que les recommandations qu’elle fera contribuent réellement à l’avancement du Togo, il eût été utile que les auteurs de ces propositions explicitent leur définition du peuple, où situent-ils et quelle est la place de ceux qui pensent différemment de ce « peuple », et par quel mécanisme ont-ils sondé et recueilli ces aspirations?
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