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Togo/ Opération entonnoir et mort d’hommes : Et si le Togo s’inspirait du Bénin ?

Publié le lundi 18 juin 2018  |  L'Alternative
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© aLome.com par Edem Gadegbeku et Jacques Tchakou
Longues scènes d`échauffourées autour du siège de la CDPA où ont été confinés des leaders de la C14
Lomé, le 25 avril 2018. Siège de la CDPA, Hanoukopé. Longues scènes d`échauffourées autour du siège de la CDPA où ont été confinés des leaders de la C14 (Coalition des 14). Ces scènes font suite à la manifestation étouffée de cette Coalition de ce jour.
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Le 08 juin dernier, les forces de l’ordre ont abattu un jeune de 18 ans à Tokpli dans la préfecture de Yoto. Dans le cadre de l’ « Opération Entonnoir ». Une énième victime.


Bénin, un cas d’école

C’est du Bénin voisin que le « boudè » est importé. C’est là-bas que se trouvent les vrais grossistes. Mais les vendeurs ne sont pas pour autant traqués comme au Togo où les commerçants sont l’objet d’acharnement et de représailles. Même si c’est une vente illicite et qu’elle occasionne souvent des brûlés au troisième degré avec des morts et des dégâts collatéraux qui s’en suivent, le « boudè » participe à l’économie. Il permet à la couche défavorisée de se prendre en charge et de résorber un tant soit peu le problème du chômage. Aussi pour les usagers de la route, l’essence frelatée est-elle un recours contre les pannes de carburant en cours de route car après Lomé et des villes de l’intérieur, il est souvent difficile de trouver des stations d’essence dans les localités. Mais les autorités togolaises semblent l’ignorer.

Peut-être les autorités béninoises ont compris cet « apport » du « boudè » et ont opté pour des mesures juridiques sur fond d’humanisme. Tout le contraire de ce qui est observé au Togo avec les nombreuses morts d’hommes commises par les forces de l’ordre. En effet, la semaine dernière le parlement béninois a voté une loi. Il s’agit d’une disposition pénale contre les vendeurs du carburant frelaté. Cette mesure permettra dorénavant de traduire en justice les contrevenants. Or au Togo, cette disposition juridique manque. Au Bénin, la mesure est allée plus loin car elle prévoit la reconversion des vendeurs. Là-bas, on a compris que le commerce, quoique illicite, participe à l’économie et on pense aux mesures de substitution. Ici, on n’en est pas encore là. L’heure est à la chasse aux vendeurs de « boudè » et ses victimes collatérales.

Sanctions sans effet

Les forces de l’ordre togolaises par leurs faits et gestes creusent davantage de fossé entre elles et les populations. L’antipathie se solidifie à chaque fois qu’un civil est fauché par balles ou succombe aux coups reçus des forces de l’ordre. Dans l’empressement d’atténuer la désolation des familles des victimes, le gouvernement, par l’intermédiaire de son ministre de la Sécurité, pond des communiqués ou déclarations dans lesquels il compatit à la douleur des familles éplorées et annonce des sanctions contre les auteurs. Mais la récidive des actes commis par les forces de l’ordre pousse à être saint Thomas face aux sanctions prises par le gouvernement. Et aussi inviter le gouvernement à copier l’exemple sur le Bénin où il n’existe pas tant d’acharnement sur les vendeurs du carburant illicite où les mesures pénales et innovantes sont prises pour décourager le commerce.

En 2013, à Dapaong, l’extrême nord du Togo, l’élève Anselme Sinandaré a été tué par balle. Il réclamait, comme ses camarades, le retour en classe du corps enseignant dont les mouvements de débrayage perturbaient les cours. A la suite des échauffourées, l’élève Anselme Sinandaré avait été fauché par un élément des forces de l’ordre. Douti Sinanlengué, un jeune lycéen rendra aussi l’âme à la suite des coups et blessures dont il a été l’objet de la part de ces forces de l’ordre déchaînées ce jour-là.

Ces évènements tragiques ont secoué tout le pays. Dans la foulée, le ministre en charge de la Sécurité et de la Protection civile avait annoncé des sanctions. Mais les années passent et on continue toujours d’enregistrer des victimes de bavures militaires. D’où la question de l’effectivité des sanctions annoncées par le ministre à chaque fois qu’un citoyen tombe sous les balles. Cette interrogation soulève deux aspects par rapport à la recrudescence des bavures. D’un côté, on peut se demander s’il y a réellement sanction ou ce sont juste des déclarations de façade. De l’autre, il y a lieu de se poser la question de savoir si les sanctions à l’égard des auteurs ne sont pas éphémères.

Comment comprendre qu’à chaque fois qu’un citoyen lambda est tué par balle, le gouvernement s’empresse de présenter ses excuses et annoncer des sanctions, mais les faits se répètent toujours, surtout quand il s’agit de l’Opération Entonnoir ? Comme ce qui s’est passé à Tokpli la dernière fois et a soulevé l’indignation des populations. Selon l’Union des ressortissants de Tokpli (URT) à Lomé, lors de la conférence de presse qu’elle a animée dimanche dernier, le jeune Louis Anoumou« a été abattu par les éléments de l’Opération Entonnoir » alors qu’il n’était même pas concerné par la vente du carburant illicite.

L’URT demande l’ouverture d’une enquête et fait savoir que le corps de la victime restera à la morgue jusqu’à l’aboutissement de l’enquête. Les ressortissants de Tokpli réclament aussi la démission du Lieutenant Abdoulaye qui, selon eux, a dirigé l’opération qui n’était pas à sa première fois dans la localité. De son côté le Mouvement Martin Luther King appelle tout simplement à la dissolution de l’Opération Entonnoir ou demande qu’elle soit repensée afin d’éviter ces nombreuses morts d’homme. A Aneho, les populations pleurent encore la disparition de leurs proches tombés sous les balles des forces de l’ordre. Au Bénin voisin, les dispositions sont prises pour éviter les morts d’hommes. Au Togo, ce n’est visiblement pas demain la veille.
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