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Quelles sont les chances de François Boko pour les présidentielles de 2020?

Publié le lundi 11 mars 2019  |  Focus Infos
Conférence
© aLome.com par Parfait
Conférence de presse du CAP 2015, trois mois après le début du 3ème quinquennat de Faure Gnassingbé
Lomé, le 11 août 2015. 90 jours après la fin de l`organisation du scrutin du 25 avril 2015, CAP 2015 dénonce toujours des fraudes électorales.
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Depuis plusieurs semaines et l’affaiblissement de la Coalition des 14 partis politiques de l’opposition (C14), la presse et les réseaux sociaux se font l’écho de la potentielle candidature de François Boko, qui s’est réfugié en France à la veille de l’élection présidentielle de 2005. Face à la perte de crédit de Jean-Pierre Fabre, de plus en plus critiqué, à la disparition de Tikpi Atchadam devenu aphone et en l’absence d’une nouvelle figure émergente de l’opposition qui s’imposerait par son charisme à tous, certains en sont convaincus, l’ancien ministre de l’Intérieur serait un candidat plus que sérieux au scrutin prévu l’année prochaine.

Plusieurs dans la diaspora en ont fait leur chouchou ; Tido Brassier et Comi Toulabor, deux leaders d’opinion et anciens proches de l’Union des Forces de Changement (UFC) et de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC), appelant par exemple dans une tribune à le soutenir. De sources concordantes, un comité d’appui serait sur le point de naître. Pour autant, l’ex-officier de gendarmerie, peut-il sérieusement rêver d’un destin national en 2020 ? Le Général de Gaulle l’a théorisé : «l’élection présidentielle est la rencontre d’un homme et d’un peuple».

La personnalité du candidat, au-delà de son projet et de son programme, qui sont par ailleurs rarement déterminants dans l’histoire électorale africaine, est décisive à l’heure du choix. De fait, François Boko qui a laissé auprès des militants de l’opposition l’image de celui qui a dit non à son propre camp en 2005 et n’a pas voulu s’associer aux évènements douloureux prévisibles, peut prétendre capitaliser là-dessus pour mobiliser les électeurs.

D’autant plus que Jean-Pierre Fabre qui a été le principal challenger de Faure Gnassingbé lors des deux dernières élections présidentielles est en perte de vitesse, vivement critiqué et pris à partie dans les médias et sur les réseaux sociaux. Son entourage soupçonne d’ailleurs les proches de l’ancien ministre d’être derrière la cabale actuelle contre le leader de l’ANC.

Il y a quelques semaines, une publication attribuée à Me Isabelle Améganvi et abondamment relayée sur la toile, moquait ainsi «le nouveau messie Boko », rappelant au passage son parcours au sein de l’appareil d’Etat et du régime.

L’ancienne députée démentira plus tard en être l’auteure, sans pour autant convaincre. Quant à Tikpi Atchadam, qui a disputé à Fabre et trusté le leadership de l’opposition ces derniers mois, il est porté disparu. A part quelques paroles portées par l’ineffable Ouro-Djikpa Tchathikpi, son conseiller, personne ne l’a plus entendu depuis des lustres et nul, même parmi ses compagnons de la C14, ne lui a davantage parlé. Quant à savoir où il se trouve, c’est un secret jalousement préservé par ses proches.

Quoi qu’il en soit, certains subodorent que monsieur Atchadam n’a été qu’un « instrument» de l’ancien ministre ; une figure qu’il aurait, avec d’autres, créée et manipulée et qui ne saurait donc lui faire de l’ombre De fait, c’est un boulevard qui lui serait ouvert, et que ne sauraient (ou ne pourraient) lui contester des Yawovi Agboyibo en fin de parcours politique, Dodji Apévon insuffisamment ambitieux, Nathaniel Olympio ou Brigitte Adjamagbo-Johnson, à la représentativité quasi nulle etc.

Dans ce contexte, les amis de François Boko considèrent qu’il a toutes ses chances et le pressent de s’engouffrer sur ce chemin d’opportunités, en se présentant aux élections. Au surplus, l’élection étant à deux tours, le premier devant servir selon eux de primaires aux candidats se réclamant de l’opposition. Parmi ses atouts, il y a aussi les réseaux qu’il a su tisser à l’international pendant ses années d’exil dans les milieux diplomatiques, notamment en France où il a plutôt bonne presse, mais également à travers son métier d’avocat et de consultant au service d’institutions internationales.

Le fait qu’il soit d’ethnie kabyè et ancien officier est aussi présenté comme un point positif, notamment pour rassurer ses «frères», de Kara comme de l’armée. Résidence : Mais le chemin pour arriver au palais de Kégué est encore long et semé d’obstacles. Si certains considèrent le fait que François Boko ait été officier de gendarmerie comme un atout, il peut s’avérer tout autant un handicap. En effet, des évènements de 2005, ce sont les opposants qui y ont vu un acte de courage et de patriotisme. Au sein du pouvoir et des forces armées, beaucoup y ont lu un acte de trahison, si ce n’est de désertion. On lui a même prêté des velléités de coup d’Etat qui aurait échoué, provoquant son départ précipité sous la protection de la chancellerie allemande. De fait, son retour risque d’être mouvementé , certains de ses anciens « camarades » affirmant avoir la «mémoire longue».

Cependant, l’un des principaux obstacles que devrait lever très rapidement l’ancien officier s’il veut se présenter, est d’ordre juridique. En effet, aux termes de l’article 62 de la Constitution togolaise, nul ne peut être candidat aux fonctions de Président de la République, si, entre autres conditions, il ne réside sur le territoire national depuis 12 mois consécutifs. Le prochain scrutin devant avoir lieu au cours du premier trimestre 2020, François Boko n’a plus que quelques semaines pour venir s’installer au Togo et satisfaire aux conditions constitutionnelles.

Pas de formation politique :

Sur le plan politique, l’avocat n’a pas de partis. Le dernier exemple d’un homme politique arrivé au pouvoir sans formation politique, est Emmanuel Macron. Sauf qu’il était jusqu’à 1 an avant l’élection ministre de l’Economie avant de démissionner pour lancer son mouvement En Marche qui l’a porté jusqu’à l’Elysée. François Boko est pour sa part éloigné du pays depuis 14 ans et à 1 an du scrutin, il n’a toujours pas créé de formation politique. Plus près de chez nous au Bénin, aussi bien Yayi Boni que Patrice Talon ont tous les deux remporté une élection présidentielle sans avoir été des dirigeants de partis politiques. Sauf qu’encore ici, les deux hommes étaient portés par des formations et des personnalités connues et implantées sur la scène politique béninoise. Dans le paysage actuel, il n’y a quasiment aucune chance que l’ANC le soutienne, pas beaucoup non plus que le CAR ou les FDR , deux autres importants partis politiques le fassent.

Vote ethnique :

Malgré les cris d’orfraie que cela peut provoquer chez certains, le vote en Afrique a souvent une dimension ethnique. De fait, dans un scrutin présidentiel, il est peu probable de voir s’affronter au second tour, s’il y a lieu, deux Kabyès : Faure Gnassingbé et François Boko. Et encore plus improbable que pour sa première, après 14 ans d’exil, ce dernier gagne au premier tour. Or, au vu des expériences passées et des statistiques des élections présidentielles en Afrique, aucun président sortant n’a été éliminé au 1er tour ; même lors des élections post conférences nationales souveraines. Le seul contre-exemple est celui de l’ex-président malgache Hery Rajaonarimampianina qui est arrivé 3è lors des présidentielles des 19 novembre et 27 décembre derniers.

Avec cette précision tout de même que conformément à la Constitution malgache, pour se présenter, il a dû démissionner et laisser le fauteuil à un intérimaire. Et qu’au surplus, il a dû affronter deux anciens présidents, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina qui sont arrivés devant lui. Envie ? Au-delà, la question fondamentale qu’il faut se poser pour gagner une élection, est celle de l’envie : y-a-t-il dans le pays une envie inextinguible, un fort désir de François Boko ?

Pour l’instant, on en est absolument loin. Aucun grand mouvement ne semble se dessiner, du nord au sud, qui traverserait les différentes couches sociales du pays, en faveur de l’ancien ministre. Certes, dans la diaspora (française surtout ; la Belgique et surtout l’Allemagne étant réputées acquises à Atchadam), il est une personnalité qui compte. Dans certains milieux, urbains, intellectuels ainsi qu’auprès de membres de la société civile également. Mais insuffisant pour espérer gagner une élection, car son nom évoque très peu de choses dans les provinces du pays, quand il est connu. Verdict d’ici 12 mois.
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