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Les investisseurs misent toujours plus sur les start-up africaines

Publié le jeudi 28 mars 2019  |  RFI
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© aLome.com par Parfait et Edem Gadegbeku
Women Techmakers (IWD) 2016 dans la capitale togolaise
Lomé, le 19 mars 2016. Hôtel Merlot. Dans le cadre de la commémoration de la Journée internationale de la femme, édition 2016, le Groupe des Développeurs Google (GDG) a organisé le Women Techmakers (IWD) à Lomé, placé sous le thème «Our time to Lead».
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Selon un tout récent rapport du fonds de capital risque Partech Africa, les entreprises de la Tech africaine ont «levé» un peu plus d'1,16 milliard de dollars d'investissements en 2018, soit plus du double de l'année précédente.



Dans le monde de l'innovation technologique, le nombre de levées de fonds, que l'on compte en «tours de table», et les sommes engagées sont un bon indicateur de l'état de santé d'un secteur. Or si l'on se réfère à la dernière étude publiée par le fonds de capital risque Partech Africa, on ne peut tomber que dans un optimisme béat : selon celui-ci, en un an, les start-up africaines ont réussi à réunir plus d'1,16 milliard de dollars (1,03 milliard d'euros), un record absolu quand on sait qu'en 2017, ce montant n'était « que » de 560 millions*.

Cette frénésie d'investissements dans les jeunes pousses de la Tech n'est certes pas circonscrite à l'Afrique. Aux Etats-Unis par exemple, on constate en 2019 des niveaux d'investissement surpassant ceux d'avant l'éclatement de la « bulle internet », il y a vingt ans. Des niveaux qui sont tout de même de très loin supérieurs à ceux dont on parle ici.

Mais la particularité du continent africain est cette tendance à l'accélération, les investissements ayant quadruplé en l'espace de trois ans. Ils pulvérisent au passage les prévisions de Partech Africa, qui envisageait que la barre du milliard de dollars ne serait franchie qu'en 2020.


Les start-up d'Afrique francophone ne convainquent pas

Pour Tidjane Dème, l’un des auteurs du rapport, on est pourtant loin de l'emballement irrationnel qui ferait naître une nouvelle bulle. « Les start-up africaines, en s’attaquant à des problèmes structurels, créent de larges opportunités, assure-t-il. Elles génèrent bien plus que des optimisations marginales [elles favorisent] des transformations profondes, créant ainsi beaucoup de valeur».

Cette progression, aussi fulgurante soit-elle, reste cependant inégale et il n'en va pas de même à Lagos qu'à Dakar. Dans le classement par pays, trois s'accrochent solidement au podium : le Kenya, le Nigeria et l'Afrique du Sud. Trois pays à la réputation bien établie sur la scène technologique africaine, « trois hubs qui laissent peu de place au reste du continent », constate Tidjane Dème.

Bien loin derrière arrivent en effet les pays de l'espace francophone. La comparaison est même cruelle : quand les start-up kényanes parviennent à réunir 348 millions de dollars (309 M d'euros) à elles seules, celles d'Afrique francophone, tous pays confondus, n'en comptent que 54 dans leur escarcelle. Pire, ce chiffre est en légère baisse.

«On a une vraie culture du marché et de la désintermédiation dans les pays anglo-saxons et par extension, culturellement, dans des pays comme le Kenya ou l’Afrique du Sud, analyse Valérie-Noëlle Kodjo Diop, responsable de l’innovation pour la région Afrique, Méditerranée et Outremer à la Société Générale. Ces pays sont aussi plus attractifs du simple fait de la langue : il faut pouvoir interagir avec un écosystème qui est anglophone, surtout lorsqu’il s’agit d’accès aux liquidités».

Prises de risque

Autre enseignement de ce rapport, les investisseurs seraient moins frileux. Les levées de fonds en phase d'amorçage - ce moment, toujours risqué, devant permettre la finalisation du produit avant le début de sa commercialisation -, ont été multipliées par quatre en trois ans.

«La croissance des investissements a lieu à toutes les étapes du développement des entreprises, et c’est un excellent signe, souligne Tidjane Dème. Conclusion : il se crée de plus en plus de start-up sur le continent, elles survivent et mûrissent».

Valérie-Noëlle Kodjo Diop, qui accompagne de jeunes entreprises africaines pour le compte de la Société Générale, tempère tout de même : « De manière générale, les Venture Capital [fonds de capital risque] et les Private Equity [capital investissement], interviennent lorsque les startups sont relativement mûrs. Or c’est quand les toute jeunes start-up ont besoin de montant allant de 20 000 à 200 000 euros que les acteurs manquent. Alors oui, il y a des instances qui prêtent de l’argent, il y a des prêts d’honneur qui vont de 2 500 à 5 000 euros. Mais entre les deux, il y a un trou énorme. »

Ainsi ce que les chiffres du rapport présentent comme une plus grande prise de risque de la part des fonds d'investissement ne doit pas faire oublier que l'essentiel des sommes qu'ils investissent concerne des sociétés qui ont déjà fait leurs preuves. C'est le cas par exemple du Nigérian Kobo360, ce « Uber du camion » qui fort d'une deuxième levée de fonds à 6 millions d'euros en décembre dernier, s'attaque désormais aux marchés ghanéen, togolais et kényan.

Ses fondateurs ont d'ailleurs eu raison de miser sur le service aux entreprises, ce secteur d'activité connaît de loin le plus fort engouement chez les investisseurs. Les montants obtenus par ces startups ont augmenté de près de 400 % en un an.

Malgré ce saut impressionnant, « l'inclusion financière », c'est-à-dire l'accès à moindre coût aux produits et services financiers de base, reste le domaine de prédilection des investisseurs. Touchant à des questions importantes pour les économies africaines, où le taux de bancarisation est très faible, ces startups attirent d'emblée l'attention.

«On dit souvent que l’Afrique réinvente la banque et les modèles de demain, assure même Valérie-Noëlle Kodjo Diop. Je vous citerai juste l’exemple d’une entreprise kényane, FarmDrive, fondée par une ingénieure et ses copines. Sur la base de données collectées grâce à un partenariat avec un opérateur téléphonique, elles ont créé des algorithmes pour faire du crédit par téléphone, via échanges de SMS, à des producteurs agricoles».

Des ressources insondables

Les clignotants sont donc au vert. Ils ne le sont pas d'ailleurs seulement dans le rapport de Partech Africa. Plusieurs études publiées ce début d'année, bien qu'avançant des chiffres différents, témoignent aussi de cette embellie.
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