[EXCLUSIF] En France depuis 2005, l'ancien ministre François Boko n'a pu embarquer ce jeudi pour Lomé. Air France s'est plié au veto des autorités togolaises.
Une surprise? Pas vraiment. Un coup de théâtre? Certes. Comme nous le relations hier (lire ci-dessous), l'ancien ministre François Boko redoutait une interpellation dès son arrivée à l'aéroport Gnassingbé-Eyadéma de Lomé. Cette épreuve lui aura été épargnée, puisqu'il n'a pas pu décoller... Un épisode qu'il détaille en exclusivité pour L'Express:
"Tôt ce matin, à Roissy, j'ai accueilli mon avocat américain, qui arrivait vers 7h00. Puis nous nous sommes dirigés, en compagnie des quatre autres membres de ma délégation, vers le comptoir d'enregistrement. Une agente d'Air France m'a rattrapé dans la file d'attente et m'a prié de lui montrer mes documents de voyage. "C'est lui, c'est bien lui", a-t-elle glissé à son collègue au vu de mon passeport. Cette dame m'a alors signifié que le pouvoir togolais s'opposait à mon embarquement; précisant que dans le cas où je serais à bord, elles refuseraient l'autorisation d'atterrir. J'ai eu beau argumenter, rien n'y a fait.
Hier mercredi, à 9h00, j'avais rencontré à sa demande Franck Paris [le conseiller Afrique d'Emmanuel Macron]. Lequel m'a indiqué qu'un émissaire de la présidence togolaise -en l'occurrence Gilbert Bawara, ministre de la Fonction publique et homme de confiance du chef de l'Etat Faure Gnassingbé- lui avait clairement indiqué que je n'étais pas le bienvenu au pays, les autorités locales n'étant pas en mesure d'assurer ma sécurité. Ce à quoi j'ai répondu que je maintenais mon départ. "Décision regrettable", a commenté Paris, m'invitant à différer mon voyage et suggérant qu'il était encore possible de négocier. Informé de mon intention de publier un communiqué dénonçant cet oukase, le conseiller élyséen m'a invité à ne pas mentionner le fait que le veto m'avait été transmis non directement, mais par un canal diplomatique français.
Tout cela confirme ce que je craignais: le régime en place ne veut à aucun prix que je rentre à temps pour concourir lors de la présidentielle de l'an prochain.Que vais-je faire désormais? Sans doute saisir la Cour de Justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao)."]
Sa décision est prise. Jeudi 28 mars, sauf coup de théâtre, l'avocat franco-togolais François Boko débarquera vers 17h45 à Lomé à bord d'un vol Air France venu de Roissy via Abidjan (Côte d'Ivoire). Muni, faute de mieux, de son passeport français et flanqué d'un conseil américain. Qu'adviendra-t-il à sa descente d'avion ? Mystère. Au mieux, rien de spécial. Au pire, l'ancien ministre de l'Intérieur, de la Sécurité et de la Décentralisation du Togo (2002-2005), qui vit en exil dans l'Hexagone depuis quatorze ans, sera interpellé et placé en garde à vue.
Compte à rebours
Pour ce Saint-Cyrien, formé jadis au côté de l'actuel chef d'état-major des armées François Lecointre au sein de la promotion Général-Monclar (1ère Compagnie, 2e Section), cet incertain come-back obéit à une prescription légale impérieuse. Désireux de briguer au printemps 2020 la magistrature suprême, il doit avoir résidé au pays natal tout au long des douze mois précédant l'échéance. Guère le choix, donc, sous peine de voir sa candidature invalidée. Même si la date précise du scrutin reste à fixer -mars ou avril selon toute vraisemblance-, le compte à rebours est enclenché.