Après trois jours de violences, le calme est revenu à Johannesburg. La situation économique exacerbe les tensions.
L'Afrique du Sud, qui se dispute avec le Nigeria le titre de première puissance économique du continent, traverse une période de crise avec une croissance quasiment nulle.
Le pays a échappé de peu à la récession au second trimestre de cette année. Par ailleurs, le chômage frôle les 30%. Conséquence : la colère gronde contre les étrangers africains qui sont venus travailler dans le pays. Ceux-ci sont accusés de s’accaparer les emplois.
Selon Achille Mbembe, historien et politologue camerounais, "les investissements étrangers directs ont dépéri, la monnaie flotte. Les inégalités sont absolument criantes. L’Afrique du Sud est très loin d’être un modèle du point de vue de la gestion économique. C’est peut-être l’une des causes des frustrations qui sont mal dirigées."
Mauvaise gouvernance économique et politique
Selon David Zoumenou, chercheur principal à l'Institut d'études de sécurité (ISS) de Pretoria, l’absence de politique économique et sociale cohérente est également à l’origine de cette explosion sociale. Sans oublier la corruption de l’élite sud-africaine qui s’est accaparé les richesses du pays.
"Très peu de richesses ont été allouées à la réponse aux besoins sociaux énormes dans les Township à Soweto, Alexandra, au Cap. Il y a aussi certains Africains qui ont transformé des quartiers africains entiers en lieux de proxénétisme, de distribution de drogues, de production de fausse monnaie. Les autres Sud-Africains voient cela d’un très mauvais œil et réagissent de cette manière-là", réagit pour sa part le politologue congolais Hubert Kabasu Babu.
Cette chasse aux ressortissants africains vivants en Afrique du Sud a poussé le Nigeria à renforcer la sécurité autour des enseignes sud-africaines sur sol pour éviter des actes de représailles.
Le géant sud-africain MTN, leader des télécommunications en Afrique, a annoncé ce mercredi 4 septembre qu'il fermait toutes ses agences au Nigeria, son plus grand marché avec 190 millions d'habitants.
Appel au calme
Le président Cyril Ramaphosa a une nouvelle fois condamné les violences qui ont éclaté dimanche à Johannesburg et qui se sont par la suite propagées à capitale politique Pretoria et dans la province du KwaZulu-Natal dans l’est du pays.
"S'en prendre à des étrangers n'est pas la bonne attitude", a-t-il déclaré lors de l’ouverture des travaux du Forum économique mondial Afrique au Cap ce mercredi 4 septembre.
Depuis le début des violences, au moins cinq personnes ont été tuées et près de 300 arrêtées, selon la police. Des dizaines de magasins ont été détruits et des camions soupçonnés d'être conduits par des étrangers ont également été brûlés.
Boycott
Suite à ces violences, le Nigeria a décidé de boycotter le Forum économique mondial Afrique. Le vice-président nigérian Yemi Osinbajo qui devait participer au Forum a annulé son déplacement 24 heures après la convocation par Abuja de l'ambassadeur d'Afrique du Sud.
L'Afrique du Sud, première puissance industrielle du continent, connait souvent des actes de violences xénophobes, sur fond de chômage et de pauvreté.