Située sur la nationale N°1 à 95 km de la ville de Lomé, la prison civile de Notsè est abritée dans un vieux bâtiment fissuré et lézardé par endroits. La peinture qui recouvre cette bâtisse de construction coloniale est noircie et salie par de longues années d’abandon et d’absence d’entretien. Décrépi et fendu par endroits, le bâtiment ne semble pas pouvoir résister aux prochaines intempérie, et pourtant il est là depuis plusieurs décennies.
Il est gardé par une escouade de surveillants armés installés dans un quartier général fait de paillote en face de la principale porte d’entrée. Tout autour, sont visibles des logements abritant les familles des surveillants, des logements dont l’allure n’a rien à envier au bâtiment principal.
Dans la cour en face de la prison, des familles de poulets, de moutons, de chiens et de cochons font la ronde ou courent dans tous les sens sous le regard indifférent des surveillants, visiblement occupés par des soucis beaucoup plus sérieux. « Ils sont nos premiers voisins », ricane l’un à la vue de notre appareil photographique. De l’autre coté, à l’extrémité sud de l’enceinte, les enfants jouent aux billes ou au ballon en faisant un bruit assourdissant. Ce sont certainement les enfants des gendarmes et surveillants pénitentiers.
« Vous êtes des espions ? »
Première étape avant d’avoir accès au bâtiment, il faut se soumettre au contrôle et la vérification des identités. « Ne soyez pas surpris qu’on enregistre vos identités. C’est le règlement, on ne sait pas qui est qui », fait savoir le garde de service. Après cette étape, on est tenu de verser 500 F au scribe du jour en guise de droit de visite. Un permis de visite est rapidement délivré, sésame vous donnant droit à la prison.
En second lieu, l’interrogatoire. Plusieurs hommes en uniforme veulent savoir pourquoi vous êtes là. Ils semblent tous particulièrement intéresser par les raisons de votre présence et posent des questions sur les « vrais motifs » de votre visite, surtout lorsqu’il s’agit de parler à un « détenu politique » comme le président du Mouvement des républicains centristes (MRC).
« On vous envoie régulièrement pour venir espionner ici, n’est-ce pas ? C’est pour ça que tu es venu ici non ? », lance un jeune policier, une partie du corps dissimulée derrière les touffes d’herbe recouvrant la paillote improvisée en QG. Les choses semblent plus difficiles qu’espérer.
L’éclaircie viendra du surveillant principal qui calme les ardeurs des uns et des autres. Après quelques minutes de discussion avec celui-ci, et s’être soumis à une minicieuse fouille corporelle qui ne donne rien, les portes de la prison s’ouvrent devant dans un grincement de dents. « On vous connait, vous les journalistes, vous parlez trop. Vous êtes des espions, c’est pour ça qu’on se méfie toujours de vos visites dans nos locaux. J’espère que vous ne cachez pas une caméra ou un de vos matériels pour enregistrer vos discussions. On ne veut pas de problèmes avec l’autorité », lança une dernière fois une surveillante au regard malicieux.