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Comme un seul homme? (Tribune libre du 10 janvier 2019 de Roger Folikoue & M. Quashie)

Publié le vendredi 10 janvier 2020  |  FCTD
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© aLome.com par Edem Gadegbeku & J. Tchakou
A l`initiative du FCTD, des Togolais de divers bords politiques échangent sur la situation politique du Togo
Lomé, les 3 et 4 janvier 2020. Avénou. A l`initiative du FCTD, des Togolais de divers bords politiques échangent sur la situation politique du Togo en vue de l`organisation d`une présidentielle consensuelle et libre. Roger Folikue Ekue du FCTD.
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Et voilà ! Finalement une dizaine de candidats se sont déclarés pour l’élection présidentielle qui se prépare. Nous ne savons pas si on s’en rend bien compte, sur ces candidats un seul a toutes les chances de gagner, de devenir Président de la République. Dit comme cela, ça semble choquant. Pourtant si on laisse faire, si les choses se passent comme d’habitude, c’est ce qui va se passer. Et comme gagner avec plus de 80% de voix ne se fait plus, on laissera quelques miettes à l’un ou l’autre, à quelques partis amis, des partis qui seront classés dans l’opposition…


Alors, évidemment cela vaudrait la peine que les candidats s’unissent pour réfléchir afin d’empêcher cela : il s’agit, précisions-le, de trouver ensemble des moyens de mettre à bas un système qui permet depuis plus de quinze ans la victoire du même groupe. Cette précision est importante car après un demi-siècle d’une gouvernance autocratique, tous sont moulés dans une personnalisation à outrance des questions de pouvoir. En effet, tout est traduit en termes de personnes, on confond la convergence des opinions avec l’unanimisme des meilleurs temps du parti unique. Dès qu’il y a des élections, les citoyens ont tendance à s’aligner d’abord derrière les partis, puis derrière les hommes présentés par ces partis. On se croirait revenu à l’époque où l’enseignant disait aux élèves alignés devant lui : «Je ne veux voir qu’une seule tête»!

Ou bien aux temps où on regardait tous dans la même direction, au risque que chez la même personne les deux yeux regardent dans la même direction à tel point qu’on finit par loucher, manifester un strabisme convergent qui gêne la vision claire… Bref, force est de constater ceci : que ce soit les candidats, que ce soit les citoyens électeurs tous semblent encore se comporter comme au bon vieux temps ; on suit un homme et non des idées ou un projet de société, et on trouve normal, qu’on vote pour lui, tous comme un
seul homme.


Cela signifie que la désaffection pour la chose politique, et donc pour les élections, que l’on sent aujourd’hui chez les citoyens est aussi une lassitude quant aux hommes. Les mêmes personnes dans la majorité depuis quinze ans, avec, aux affaires et dans l’ombre les mêmes personnalités en place depuis plus de trente ans. Des opposants aussi qui ont ce statut depuis quinze ans au moins et parmi eux des opposants historiques du temps de la conférence nationale qui date de presque trente ans. Ainsi, à cause du système de gouvernance, refusant l’alternance, qui gère le pays, il n’y a pratiquement pas eu de renouvellement de la classe politique. Toujours les mêmes, toujours le même jeu, qu’on appelle les élections, toujours les mêmes résultats.


Et on recommence… Et ce n’est guère la peine de protester puisque là aussi on entre dans un cycle classique : protestations, répression, accords non suivis de réalisation…. Nouvelles élections, où tous (presque tous) voteront comme un seul homme, etc. Dans ces conditions, comment convaincre les citoyens qu’on est entré dans une nouvelle phase de la vie de notre pays ? Comment lui redonner de l’intérêt pour la vie politique. Il ne suffira pas de répéter, comme une incantation que 2020 est l’année du changement.


En effet, on lui a déjà promis le paradis avec les programmes PMA (Pays les Moins Avancés) et PPTE (Pays Pauvres Très Endettés), on lui avait déjà annoncé 2030 comme l’année de l’émergence, on a à présent le PND, mais au quotidien toujours les mêmes difficultés, sinon pire encore …


Par conséquent il appartient à ceux qui se battent vraiment pour le changement de proposer quelque chose de nouveau aux citoyens écrasés par la pauvreté, et surtout déçus et sans espérance. Il s’agit d’abord de démontrer que 2020 est advenu véritablement avec de nouvelles propositions. Comment ?


 Premier facteur de motivation : le comportement des hommes politiques.

Sont-ils prêts à adopter de nouvelles solutions ? Sont-ils prêts à se remettre en question par rapport au schéma où le jeu des politiciens domine le débat au point d’oublier la population ? Une solution nouvelle autre que ce qui a été vu jusque-là pourrait amener les citoyens à regarder un instant du côté de la politique. Mais pour attirer l’attention des citoyens, il sera nécessaire de s’approcher d’eux : en effet, convoquer des personnes pour des meetings ou des marches, on l’a vu, ce n’est pas l’unique moyen spécialement efficace, on n’attire que ceux qui sont déjà convaincu et qui iront voter pour l’homme providentiel, comme un seul homme. Les hommes politiques qui veulent le changement, ne sauraient plus attendre que les citoyens viennent à eux, comme on se tourne vers un sauveur ! Il faut qu’ils trouvent des solutions pour aller vers les citoyens.


 Deuxième facteur de motivation: l’issue de la prochaine présidentielle.


Il s’agit de convaincre les citoyens que les élections peuvent être autre chose qu’une mascarade pour faire rester au pouvoir ceux qui le sont déjà. Et c’est vrai, à condition que les citoyens se mobilisent. En effet, la classe politique d’aujourd’hui doit faire comprendre aux citoyens qu’aucun changement n’adviendra sans eux, si on veut qu’il y ait des élections transparentes, alors il faut qu’on soit nombreux à les réclamer.


Il faut donc commencer par appliquer cette démocratie participative, dont on parle beaucoup sans la mettre réellement en pratique : que les partis acceptent de s’associer avec d’autres et qu’on élargisse la lutte à des centaines de milliers de personnes. C’est alors qu’émergeront les nouveaux leaders dont on a un si grand besoin. Cela ne signifie nullement que les anciens n’ont pas leur mot à dire, mais reconnaissons-le, il y a un moment dans la vie où il faut accepter le rôle de passeur.

Ce rôle est d’ailleurs essentiel car, dans un pays qui a connu cinquante années de monolithisme, qui aidera concrètement les trentenaires, quadragénaires et même cinquantenaires à inventer un nouveau vivre ensemble ? Et surtout qui peut les persuader que la lutte pour la démocratie vaut encore la peine, surtout et surtout si chacun s’y met? En effet, sans cette foi en soi, il n’y aurait pas eu de Gilets Jaunes en France, il n’y aurait pas eu de changement au Soudan, de contestation et même de défiance en Algérie.

C’est pourquoi, de fait, il faut convaincre les citoyens qu’il leur faut croire en leurs propres capacités pour changer la société, pour résister au système qui dirige le pays depuis si longtemps. Pour cela la voie semble toute tracée : «"La philosophie de paix, de tolérance et de non-violence de Gandhi a servi en Afrique du Sud de puissant instrument de changement social", voilà ce que Nelson MANDELA déclaré le 2 septembre 1992. (…) GHANDI et MANDELA sont des formes de résistance qui ont permis le changement social par la résistance au système politique que des hommes incarnent à un moment donné.

Résister ce n’est pas être contre quelqu’un mais c’est dire non à un système qui ne favorise pas le vivre ensemble. Résister c’est contribuer en tant qu’acteur au changement dans notre pays».


Nos meilleurs vœux pour 2020, année de découverte de la force et du pouvoir des citoyens dans l’avènement du changement social dans notre pays et sur notre continent. Il est temps que les choses changent !


(Roger FOLIKOUE, Tribune du 10 janvier 2019)
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