Un récent rapport de l'ONU indique que les Ivoiriennes sont quatre à cinq fois plus nombreuses à migrer clandestinement vers l'Europe que les femmes des autres pays d'Afrique subsaharienne. InfoMigrants a rencontré à Abidjan plusieurs de ces femmes de retour d'un périple migratoire souvent cauchemardesque.
Même emploi, même marché, mêmes clientes… Rien n'indique que Yolande a tout perdu en tentant de migrer clandestinement en Europe il y a deux ans. Cette Ivoirienne de 39 ans est aujourd'hui à la tête de son propre salon de coiffure en plein coeur du marché de Youpougon, une vibrante commune du district d'Abidjan située dans l'ouest de la capitale de Côte d'Ivoire. "Je tresse et je vends aussi des mèches. J'ai ouvert il y a environ un an et cela commence à marcher, même s'il me manque un peu de matériel et de la marchandise", explique-t-elle en montrant son échoppe vide dans laquelle les clientes patientent souvent à même le sol. Les murs sont parsemés de mèches en faux cheveux que la patronne va chercher à Abidjan. "Avec mon employée, on travaille jusqu'à six jours sur sept. Sur une bonne journée comme le samedi, je peux avoir une dizaine de clientes, quelques nouvelles mais surtout des anciennes qui commencent à revenir".
Les "anciennes" sont celles que Yolande coiffait déjà avant son départ pour l'Europe. A l'époque, elle ne disposait pas d'un emplacement et d'un bail officiel comme c'est le cas aujourd'hui. "Il y avait souvent des déguerpissements (expulsions), on perdait tout à chaque fois", se souvient-elle. "Aujourd'hui mon commerce est très bien placé et il m'appartient vraiment." Sur un bon mois, Yolande parvient à réaliser un chiffre d'affaires de 300 000 francs CFA soit 457 euros avec lequel elle se rémunère ainsi que sa coiffeuse, et achète les mèches ou tout autre matériel nécessaire.
C'est le programme de retour volontaire et de réintégration de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) qui lui a permis de se lancer dans l'aventure de l'entreprenariat. Celui-ci offre notamment une assistance dans les démarches administratives nécessaires pour démarrer une activité génératrice de revenus ainsi qu'un pécule d'aide à la réinsertion de 165 000 francs CFA (soit 251 euros). Pour les femmes ayant été victimes d'exploitation sur la route de l'exil, celles qui reviennent enceintes ou encore qui, comme Yolande, doivent subvenir seules aux besoins de leur famille, l'OIM propose un suivi particulier afin de les accompagner au mieux vers la stabilisation et la pérennisation de leur activité et de leur réinsertion dans la société.