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Covid-19, 60 ans de "l’indépendance confisquée" du Togo : La CDPA interpelle le Gouvernement de Faure Gnassingbé

Publié le mardi 28 avril 2020  |  CDPA
Conférence
© aLome.com par Edem Gadegbeku et Jacques Tchako
Conférence de presse de la Coalition des 14 après les violences ayant marqué les départs étouffés de leur marche
Lomé, le 11 avril 2018. Siège de la CDPA. Conférence de presse. Bilan du 1er jour de l`appel à manifestation de rue de la coalition de 14 partis politiques de l’opposition togolaise. C`est le 1er appel du genre depuis l’ouverture du dialogue intertogolais le 19 février dernier. La coalition fait état de plusieurs blessés et de certains véhicules de ses leaders endommagés. Elle annonce également la poursuite de ces manifestations jeudi et samedi. Aux dires du chef de file de l’opposition, Jean-Pierre FABRE, ces actes "constituent des tentatives d’assassinat" et ne manqueront pas d’avoir des suites judiciaires. Brigitte Adjamagbo-Johnson.
Comment


La CDPA (Convention démocratique des peuples africains) dresse un bilan de la gestion de la crise sanitaire au Togo due au Covid-19. Le ’parti des intellectuels’ formule des propositions urgentes aux dirigeants du Togo.


COMMUNIQUE DE LA CDPA relatif à la gestion de la riposte de la pandémie à Covid-19



Depuis le 5 mars 2020, le Togo a enregistré et signalé son premier cas de Covid 19 entrant ainsi dans la longue liste des pays et territoires frappés par la pandémie. Pour gérer cette situation une urgence sanitaire a été décrétée avec une panoplie de mesures qui pour certaines, sont destinées à régler des problèmes politiques.
Il en est ainsi du couvre-feu instauré depuis le 2 avril 2020 pour une durée indéterminée, qui à ce jour, selon les nombreuses informations, photos et vidéos sur les réseaux sociaux, a permis aux forces de défense et de sécurité de tuer de paisibles citoyens ou pour les plus chanceux d’être gravement blessés avec possiblement de graves séquelles. Ces malheureux dont la route a croisé celle des forces de défense étaient sortis tout simplement pour satisfaire leurs besoins physiologiques car dans leurs maisons il n’y a pas de toilette à Lomé, capitale du Togo en ce 21e siècle.

Par ailleurs, nous observons en journée, des forces de défense et de sécurité munies de cordelettes qu’elles utilisent pour tabasser les personnes surtout sur les motos et qui ne portent pas de masques sans que jamais il n’ait été décrété, le port obligatoire de masque dans le pays.

Sur l’aspect sanitaire de la gestion de la riposte du Covid-19, il y a un cafouillage monstre doublé d’un manque de transparence et une communication hasardeuse alimentant des rumeurs qui font que la population ne croit pas en la parole publique, d’où la panique et la méfiance.

Le 25 avril 2020, le Gouvernement dans son rapport de situation n°39 du 18 avril 2020, a annoncé 747 cas suspects, 54 cas probables cliniques et 808 cas contacts, 96 cas confirmés, dont un bébé de 28 jours et 06 décès. Au regard des mesures prises, nous observons chaque jour sur les médias publics un défilé des autorités togolaises, qui malheureusement n’informent pas sur l’essentiel à savoir : Quelle est la progression de la pandémie ? Quel est le nombre et état réels des patients hospitalisés ? Quelle est la disponibilité des différents matériels de protection ? Quelle est l’évolution du dépistage et des soins ; quelles sont les structures sanitaires équipés pour faire les tris des patients à l’accueil aux urgences ? Comment les services sanitaires fonctionnent-ils pendant la quarantaine ou l’hospitalisation en cas de confirmation ? Comment sont formés les soignants et comment sont-ils protégés ? quelle est la situation financière, notamment l’origine des 2.678.070.375 francs cfa qui alimentent le fonds Novissi, des précisions sur les 460.059 bénéficiaires au 17 avril 2020 ?

Ainsi, le 15 avril 2020, deux patientes hospitalisées dans le service de pneumologie du CHU Sylvanus Olympio, après être passées par le service des urgences médicales cinq jours auparavant, étaient en fait porteuses du Covid 19 sans que personne ne s’en rende compte et ignorant tout de leurs parcours. 2 Cette situation a entrainé la mise en quarantaine de plus de 40 soignants (médecins en spécialisation, internes, infirmiers, garde malades) qui viennent s’ajouter aux cas confirmés.
La même situation a été vécue à l’hôpital de Bè dans la même semaine où avaient été admis le bébé de 28 jours décédé depuis, et sa maman, tous Covid 19 positifs ; ici c’est environ une quinzaine de soignants qui ont été mis en quarantaine. Ce qui rend indisponible pendant 40 jours plus d’une cinquantaine de soignants, en ce moment où les togolais ont le plus besoin d’eux et dans ce pays qui souffre déjà d’un manque de personnel hospitaliser.

Cette situation nous alerte sur quelques éléments de la communication officielle sur lesquels nous nous interrogeons :

- le troisième décès signalé le 3 avril 2020 n’était pas répertorié puisque selon le site d’information officiel du Gouvernement, « il s’agit d’un homme de 41 ans … ambulant de profession … souffrant depuis le 30 mars. Face à la complication de son état de santé, un test de dépistage de la Covid 19 a été effectué et s’est révélé positif » ;

- aucune précision sur l’origine probable de la contamination n’est donnée pour deux des trois nouveaux cas confirmés du 05 avril 2020 : une femme de 28 ans et un homme de 37 ans, tous togolais et résidant à Lomé ;

- aucune précision sur l’origine probable de la contamination n’est donnée pour le seul patient testé positif le 13 avril 2020 ni même son âge et son lieu de résidence ;

- sur les six nouveaux cas identifiés le 25 avril 2020, quatre sont des cas suspects (rappel : 747 cas suspects le 18 avril 2020) ;

- Au 25 avril 2020, il est annoncé 5 584 tests de dépistage effectués : que recouvre ce chiffre ? Combien de personnes ont été testées effectivement et qui sont-elles, puisqu’une personne peut être testée 2, 3 ou 4 fois.

La situation vécue au CHU Sylvanus Olympio nous apprend également que le personnel soignant n’est pas suffisamment protégé car il manque des équipements de protection individuels (EPI). Si ces informations sont avérées, où sont alors passés tous ces matériels offerts par de généreux donateurs (OMS, Jack Ma), réceptionnés et exhibés ? Où sont passés ceux que l’Etat annonce avoir acquis ?

Au-delà, nous nous demandons comment les masques et les gants chirurgicaux qui malgré leurs prix très élevés, sont inexistants en pharmacie mais se retrouvent en vente libre dans la rue ?

Alors qu’une cinquantaine du personnel de deux formations sanitaires est en mis en quarantaine, c’est ce moment que le gouvernement choisit pour renvoyer 34 paramédicaux du CHR Lomé commune pour les remplacer par des infirmiers militaires :

- Comment ces nouvelles recrues sont formées pour qu’elles soient directement opérationnelles afin d’être efficaces pour le service pour lequel elles sont appelées et surtout ne pas se contaminer eux-mêmes devenant un danger pour leurs proches et un vecteur de propagation du Covid 19?

- Pourquoi cette militarisation à outrance du secteur de la santé (Force anti pandémie de 5.000 personnes commettant diverses exactions, les CHU Sylvanus Olympio et Campus, le CHR Lomé Commune, le Coordonnateur de la cellule nationale de riposte de la pandémie et l’adjoint au 3 responsable du centre de prise en charge des patients Covid 19 du CHR Lomé Commune sont tous des militaires !) ?

Au regard de tout ce qui précède, la CDPA dénonce et condamne avec la plus grande fermeté :

- la militarisation excessive du pays et particulièrement celle du secteur de la santé ;

- les tueries et les bastonnades des paisibles citoyens ;

- le limogeage du personnel soignant du CHR Lomé Commune.

La CDPA présente ses sincères condoléances aux familles en deuil à cause du Covid 19 et de la barbarie soldatesque. Elle souhaite prompt rétablissement aux personnes testées positives et mises en quarantaine, et aux blessés suite aux brutalités policières. Elle invite les compatriotes à respecter scrupuleusement les mesures barrières qui sauvent la vie face à cette pandémie et à se mettre à l’abris de l’arbitraire d’un couvre-feu, qui loin de nous protéger, nous enlève la vie.

La CDPA exige :

- l’ouverture d’enquêtes impartiales pour faire la lumière sur les crimes et bavures des forces de défense et de sécurité et la traduction devant des tribunaux indépendants, les auteurs et commanditaires de ces actes cruels, inhumains et dégradants ;

- un visage plus humain et plus de professionnalisme dans la gestion du couvre-feu qui se révèle aussi mortel que la maladie qu’il est censé combattre ;

- l’arrêt des exactions des forces de défense et de sécurité sur la population pendant le couvre-feu de même que leur brutalité dans la journée quand les gens sont sans masque (non encore rendu obligatoire) ;

- un compte rendu quotidien de la situation de la pandémie fait par le Secrétaire général du ministère de la santé et de l’hygiène publique et/ou le Coordonnateur de la cellule de riposte ;

- la réintégration à leurs postes des soignants limogés ;

- la mise à disposition de tout le personnel soignant dans toutes les structures sanitaires du pays, des éléments de protection individuels de qualité et en quantité suffisante car il ne sert à rien de décréter le port obligatoire de masques pour le personnel soignant sans qu’ils n’en disposent réellement ;

- l’homologation des masques artisanaux que porte majoritairement la population afin d’éviter sa contamination malgré leurs port.

Au moment où notre pays célèbre, dans la douleur, les soixante ans de notre indépendance confisquée par les forces conservatrices, la CDPA invite les togolais au courage et à l’endurance.

Nous n’avons pas le droit de baisser les bras ! La patrie en danger nous l’ordonne ! Ensemble nous vaincrons !

La Secrétaire Générale


B. K. ADJAMAGBO-JOHNSON
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