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Opinion/Et si l’après Covid-19 lançait l’essor de la tech togolaise? (Par *Aristide Agossou)

Publié le lundi 11 mai 2020  |  Kpatima News
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© aLome.com par Edem Gadegbeku & J. Tchakou
Pour éviter le Covid-19, de plus en plus de Togolais optent pour les masques-maisons et les gants
Lomé, le 10 avril 2020. Vers Nukafu. Pour éviter le Covid-19, de plus en plus de Togolais optent pour les masques-maisons et les gants
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La crise sanitaire du COVID-19 qui s’est propagée à une vitesse incontrôlée en quelques semaines a plongé le monde entier dans une crise économique sans précédent. Si la catastrophe annoncée sur le continent africain n’a pas (encore ?) eu lieu, il faut s’incliner devant la mémoire des milliers de morts dans le monde. Même si la COVID-19 n’a pas encore dit son dernier mot, il a provoqué de profonds changements et occasionné les prémices d’une crise économique dont les répercussions doivent être analysées.

Au Togo, en appui aux mesures de distanciation sociale de nombreux travailleurs ont voulu ou ont été tout simplement forcés de passer au télétravail. C’est un secret de polichinelle, la connexion internet (mobile surtout) est chère au Togo. Pourtant, aucune offre d’accompagnement n’a été proposé pour aider des milliers de personnes obligées de rester chez eux pour travailler. Envoyer quelques documents par mail sur son ordinateur peut consommer tout le forfait hebdomadaire de 2500 F (4$) ou de 3000 F (5$). C’est dire que dès le début de la crise cela semblait bien compliqué de rester chez soi pour travailler.

La COVID-19 a boosté l’utilisation des produits et services numériques partout dans le monde. Cette crise accélère le leapfrogging que le continent africain a entamé en ce qui concerne les services numériques depuis le début des années 2000. Au Togo, avec 10 morts et d’une centaine de cas recensés (début mai), il faut analyser et prendre en compte comment l’écosystème tech local peut profiter de la crise actuelle pour gagner du terrain.

Avec la COVID-19, au Togo, les produits et services financiers ont le vent en poupe. Ce ne sont pas les tenants des nombreux kiosques de mobile money qui vous diront le contraire. L’utilisation de ces services a explosé avec la mise en œuvre du Programme Novissi (un programme de transfert monétaire lancé par l’Etat pour soutenir les couches sociales les plus vulnérables). En ces temps de crise, grâce à ce programme, la création des comptes Mobile Money et le volume des transactions devraient connaître un boom. Cependant, la création des comptes et l’augmentation des transactions a révélé les carences de certains systèmes de paiement. De plus, une partie de la population hésite encore à utiliser le mobile money. Un constat amer dans un pays où les deux opérateurs de téléphonie mobile offrent ce service de transaction mobile.

Dans les boutiques, près des étalages, autour de quelques commerces, des clients continuent de régler leur paiement en espèce. Une petite enquête auprès d’eux révèle que les marges pour transférer les transactions Mobile Money en cash sont encore élevées pour certains montants. Un point sur lequel les avis restent unanimes. La plupart des commerçants ne profitent pas encore des atouts de ce type de transfert. Pour les aider, pourquoi ne pas créer un compte mobile money « marchand » pour la revendeuse d’Ayimolou ou à celle qui détient la boutique au coin de la rue avec l’avantage qu’elles puissent payer aussi leurs fournisseurs avec le même moyen et avec des marges de transfert vers cash un peu revus ?

A Lomé, les services de livraison et les services e-commerce ont aussi connu un rapide accroissement durant les dernières semaines. On peut observer les offensifs marketing sur fond de regain de l’activité des historiques comme DeliVroum ou Kaba Delivery. D’autres grandes entreprises à l’instar de la Brasserie BB, des startups telles que E-agribusiness et bien d’autres ont créée en quelques semaines leur service de livraison à domicile pour ravitailler les Togolais en vivres, en boissons, tout en limitant au maximum les contacts humains.

D’autres entreprises et startups vont sans doute leur emboîter le pas. La crise va surtout révéler les meilleurs entrepreneurs et les meilleures entreprises, car ils seront réactifs à aller sur le marché des services et produits digitaux ouvert par la crise sanitaire. Nous avons vu ça et là des jeunes férus de technologies qui ont fabriqué des masques grâce à des imprimantes 3D. Ils ont fabriqué un respirateur artificiel. Il faut désormais aller au-delà des effets d’annonces, tester les réelles capacités de ces outils et voir comment les produire en quantité. L’écosystème tech local regorge de talents, cela semble indéniable. Mais le sempiternel problème reste celui du go to market (se lancer sur le marché avec un MVP solide). Cela pose aussi des fois pour les entrepreneurs locaux le problème du financement. Mais il faut comprendre que pour se faire financer en dehors du Love Money (famille, ami(e)s) par n’importe qui (Business Angel, VC, Banques ou même par l’Etat) l’on doit montrer qu’on est performance driven. Que l’on est passé de Zéro à Deux et qu’avec les fonds des investisseurs l’on peut passer à n fois.

Parlant de de financement il faut reconnaître que l’écosystème tech togolais est totalement délaissé par les acteurs financiers. Il n’y a pas de vrai apport financier pour ce secteur. Les fonds de capital-investissement en Afrique (francophone surtout) sont positionnés sur les « grosses » PMEs pouvant se faire financer avec des tickets de 100 000 millions de FCFA (170.000 dollars). L’équipe du jeune développeur et son associé qui viennent de lancer leur startup dans la technologie n’ont besoin que de 10 millions FCFA soit dix fois moins pour faire leur preuve. La crise sanitaire va décloisonner un peu plus les marchés comme c’est le cas. Qu’elle ouvre les yeux aux différents investisseurs afin qu’ils accompagnent mieux nos entrepreneurs tech.

L’on ne peut pas ouvrir toutes ces brèches sans parler de l’apport de l’Etat qui peut permettre à toute cette flopée d’acteurs de dynamiser tout cet écosystème. L’Etat togolais par ces différentes actions a fait plusieurs efforts pour faciliter le processus de création d’entreprises, en témoigne les derniers bons scores du Togo au classement Doing Business. Ces avancées doivent également prendre corps auprès de l’écosystème tech. Des initiatives telles que le Djanta Tech Hub ou encore Nunya Lab ont vu le jour il y a peu. Il faudra accompagner les meilleurs startups et entrepreneurs de l’écosystème dans le passage à l’étape cruciale du Go to market. Financer les meilleures startups tech togolaise par un fonds dédié serait un apport inestimable pour les accompagner à la sortie de cette crise. Plusieurs solutions innovantes vont germer. Que l’Etat soit au tournant et pas seulement en baissant les taxes et impôts qui sont bien entendu une vraie hantise pour les entrepreneurs. Mais aussi en accompagnant de manière optimale les jeunes pousses technologiques.

Beaucoup de choses vont changer avec cette crise, les services et produits numériques vont continuer à croître comme c’est le cas aujourd’hui. Que tous les acteurs se mettent au diapason pour que l’écosystème tech togolaise sorte gagnante. Durant cette crise l’ambition doit, malgré tout, rester le maître-mot. Soyons ambitieux !





* Aristide Agossou est spécialiste de la communication et du marketing appliqué aux startups tech. Il est passionné par le numérique et l’entrepreneuriat. Aristide pense qu’ils peuvent transformer durablement nos quotidiens en apportant des solutions innovantes et efficaces au développement de l’Afrique et du Togo en particulier.

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