Je parle toujours de l’homme, de l’homme et de littérature, si vous voulez, de l‘homme, être sans qui l’univers n’aurait aucun sens, les nations, les États, les sociétés n’auraient pas de sens.
Le prétendu « Président réélu » du Togo a prêté serment le dimanche 3 mai. Le lundi 4 mai, un lieutenant-colonel du même pays, Toussaint Madjoulba, est assassiné. Certains, qui semblent être au courant de cet assassinat dans le détail, précisent qu’il a d’abord été neutralisé par balles, puis égorgé. Cela se passait dans le propre bureau de l’officier supérieur, chef de corps. Ce fait est symptomatique du mal qui ronge le Togo depuis des décennies. Tous les citoyens, ou presque, accusent le régime cinquantenaire de ce prétendu Président d’être l’auteur de cet assassinat. Nous sommes dans un pays où le père-fondateur du régime s’était lui-même vanté d’être l’assassin du premier Président démocratiquement élu le 13 janvier 1963. Vrai ou faux ? Difficile de le dire aujourd’hui, puisque, à une autre occasion, il se dédisait. Ce qui est néanmoins sûr, c’est que beaucoup de ses compatriotes lui reconnaissent de nombreux meurtres qu’il serait fastidieux de citer ici, tout au long de son règne de 38 ans. Un de ses fils, prénommé Ernest, qui terrorisait toute la population de Kara, entre autres atrocités, tentera, sans un succès franc, d’éliminer physiquement un adversaire politique de l’époque, fils du premier président assassiné lors du coup d’État de 1963. Un autre fils, celui qui vient de prêter serment pour un quatrième mandat, a, en 2005, lors de sa prise de pouvoir, avec l’aide de son frère qui s’appelle Kpatcha, ministre de la Défense, du temps où ils s’entendaient bien tous les deux, massacré un grand nombre de Togolais, estimé à 2000 par certaines organisations des Droits de l’homme, réduit à 500 par un rapport de l’ONU. Et, durant le règne de ce fils Gnassingbé, la fêlure, tare latente qui marque la famille depuis peut-être un temps qui remonte bien au-delà de 1963 et qui n’a eu que des occasions favorables pour se manifester, se trouve dans l’histoire naturelle de la famille ( j’emprunte l’expression à Zola ), et sera toujours là, quoi que l’on fasse. La fêlure reviendra dans la famille Gnassingbé, comme elle a marqué les personnages de La Bête Humaine : le personnage principal, Jacques Lantier, déjà tout petit, avait voulu tuer une fillette. « Aucun raisonnement ne l’apaisait… ». Dans La déraison au pouvoir, je montrais combien il est impossible d’amener les Gnassingbé (le père d’abord, de 1967 à 2005, et le fils ensuite à la mort du père, de 2005 à 2020 donc), à renoncer au fauteuil présidentiel, et, par conséquent, à l’exercice de la violence, puisque c’est leur principal argument, avant la corruption, pour parvenir à leurs fins. ... suite de l'article sur Autre presse