Au Togo, les habitants d’un village non loin de la côte maritime sont préoccupés par les travaux d’extraction de sable dans une carrière située au centre de leur localité. Paniqués à l’idée de voir leurs maisons s’effondrer, 300 villageois s’organisent en collectif pour exiger l’arrêt de l’exploitation dans la zone.
Les habitants de Dévégo-Novissi, un village non loin de la côte togolaise, exigent des autorités «l'arrêt définitif» de l’extraction de sable fin par Samaria, une société minière en activité dans la localité depuis seulement huit mois. Ils disent craindre que la poursuite de ces travaux au milieu des habitations ne provoque leur effondrement. Organisés en collectif, ils sont plus de 300 à élever la voix à Lomé pour se faire entendre.
Depuis 2012 que l’érosion sur la côte togolaise est devenue un sujet de préoccupation majeur, les autorités ont interdit l’extraction et la vente du sable de mer pour la construction des maisons. Des autorisations spéciales d’exploitation sont en revanche accordées à des sociétés minières sur des sites dédiés.
Le village de Dévego-Novissi est l’un des sites où une société privée, Samaria, procède à l’extraction par dragage dans une vieille carrière remplie d’eau, d’où le sable avait déjà été extrait il y a de nombreuses années avant que la majorité des habitants actuels ne s’y installent.
«Nous demandons l’arrêt définitif du dragage du sable dans le village pour nous mettre à l'abri de l’effondrement des maisons qui se fissurent déjà et pour protéger nos enfants de la noyade. Nous ne voulons que préserver le fruit de notre dur labeur», a confié sur place à Sputnik Michel Djossouvi, porte-parole de ce collectif des indignés.
En effet, le dragage du sable en cours dans cette carrière est, selon les populations, source de nombreux problèmes. Emilie, vendeuse d’oranges et habitante des lieux, a déclaré à Sputnik que lorsque les machines de dragage sont mises en marche, «tout tremble» dans leur petite maison.
«Parfois, les ampoules même parviennent à éclater dans les chambres de ceux qui sont plus proches de la carrière. Les vibrations sont telles que vous ne pouvez plus rien faire», a-t-elle déclaré.
Un jeune maçon en activité dans le village a aussi confié à Sputnik que «le puits de leur maison s’est asséché depuis que les travaux de dragage ont commencé avec Samaria» et que tout le village vit actuellement «un problème de pénurie d’eau» jamais connu auparavant.
«Parce qu’à force de draguer, les nappes phréatiques s’épuisent pour remplir le grand trou laissé lors de l’extraction. Et le sable extrait vient en réalité des sédiments en dessous de nos maisons. De fait, les constructions perdent leur équilibre et se fissurent. Nous ne pouvons pas attendre que la situation empire avant d’agir», a confirmé à ce sujet Michel Djossouvi.
Une exploitation illégale?
Les villageois affirment aussi être «victimes» d’une «exploitation illégale du sable» par la société Samaria, qui ne dispose pas des autorisations d’exploitation nécessaires.
«Faux», a réagi le ministère des Mines et des Énergies du Togo qui a dépêché une équipe sur le terrain le 18 août dernier, à la suite du cri d’alarme des populations de Dévego-Novissi.
Cité par l’Agence de presse privée togolaise Afreepress, Sogle Damegare, le directeur général des Mines, a assuré que «l’autorisation qui permet à Samaria de travailler date de 2019 et elle a été renouvelée». Au regard des doléances des habitants, il a toutefois ajouté qu' «avec l’Agence nationale pour la gestion de l’environnement, nous allons analyser tous les éléments que nous avons relevés et c’est à l’issue de cela que nous allons envisager ce qu’il y a lieu de faire» pour ne pas opposer une fin de non-recevoir aux villageois.
Dagovie Koffi, le maire de la commune Golfe 6 de Lomé qui couvre le village de Dévégo-Novisi, a indiqué dans la presse locale avoir détecté des velléités de «manipulation», soit des chefs traditionnels qui se disputent cet espace du village, qui pourtant relève du domaine de l’administration, ou de politiques qui voudraient faire échec à sa gestion par la commune. Le porte-parole des villageois s’en défend: «Nos revendications n’ont rien de politique et ne sont pas liées aux conflits de chefferie ou à des problèmes fonciers».
Avant une décision du gouvernement, l’édile a confié à Sputnik qu’il allait «s’entretenir avec le collectif des victimes pour ensuite informer le ministre de l’Administration territoriale pour connaître la conduite à tenir».
«Parce que seul le gouvernement peut décider si la société Samaria va continuer les travaux ou pas», a expliqué Dagbovie Koffi.