Sami Tchak : “La démocratie arrive en général quand l’essentiel a déjà été construit”

Publié le lundi 7 septembre 2020 | Courrier d'Afrique

© aLome.com par Edem Gadegbeku et Jacques Tchako
La Fondation Pax Africana d`E. Kodjo et la 11e édition du Festival Filbleu rendent hommage à l`écrivain Yambo Ouologuem
Lomé, le 10 mars 2018. Université de Lomé. La Fondation Pax Africana d`Edem Kodjo et la 11e édition du Festival Filbleu ont rendu un vibrant hommage à l`écrivain et enseignant malien Yambo Ouologuem, décédé le 14 octobre 2017. Une cérémonie qui a connu la présence de divers auteurs, universitaires et autres passionnés des Arts. L`écrivain Sami Tchak.

La candidature d’Alassane Ouattara et d’Alpha Condé pour un troisième mandat respectivement en Côte d’Ivoire et en Guinée suscite des débats chez des intellectuels africains. Ainsi, trois écrivains, l’Ivoirienne Véronique Tadjo, le Guinéen Tierno Monénembo, et le Camerounais Eugène Ebodé, ont publié un manifeste intitulé “Halte à la présidence à vie en Afrique”!
Le Togolais Sami Tchak livre plutôt une analyse globale sur la construction démocratique en Afrique en lien avec l’impact qu’elle pourrait avoir ou non sur le développement du continent.

Les trois cosignataires du manifeste dénoncent les tripatouillages constitutionnels et le virus du troisième mandat consécutif qui a piqué les présidents ivoirien Alassane Dramane Ouattara, et guinéen Alpha Condé. Véronique Tadjo, Tierno Monénembo et Eugène Ebodé appellent à des actions concertées pour que “la démocratie en Afrique ne devienne pas une imposture“.

L’écrivain togolais Sami Tchak n’est pas du même avis. Selon l’auteur de l’ouvrage Les fables du moineau paru fin 2019 aux éditions Gallimard, il faut éviter de tomber dans l’émotion pour avoir des réflexions plus sérieuses sur ces questions.

“Je crois que sur ces questions, rarement nous avons le temps pour des réflexions sérieuses, mais, en général, nous sommes réduits à des réactions qui nous sont inspirées par notre passivité envers des mots, des modèles”, a-t-il confié dans une interview à TV5 Monde.

Repenser l’avenir de l’Afrique

Prenant l’exemple de l’Allemagne, de la Grande Bretagne ou d’Israel où les mandats du Chancelier ou du Premier ministre sont illimités, ou même des vieilles démocraties comme les Etats-Unis ou la France qui n’ont limité le nombre de mandats du président de la République que très récemment, Sami Tchak appelle les élites africaines à repenser le développement du continent, qui n’est pas nécessairement lié à la démocratie telle qu’importée il y a trois décennies.

“Nous sommes les seuls peuples presque condamnés à considérer la démocratie comme un préalable au développement. Cela ne s’est pour le moment jamais produit nulle part, je suis peut-être trop catégorique dans cette affirmation, je le reconnais. La démocratie arrive en général quand l’essentiel a déjà été construit, elle n’en est pas un facteur. C’est peut-être là que tout devient compliqué pour nous : si jeunes, nos pays issus de la colonisation s’inscrivent dans le monde comme des nations déjà à bout de souffle”, explique-t-il.

“Je pars de l’idée qu’au-delà de la démocratie, des consciences nouvelles émergeraient dans le contexte mondial actuel pour que l’avenir soit pensé en termes plus pragmatiques. La Chine s’est réveillée sans qu’on y ait instauré la démocratie. La Russie n’est pas une démocratie… Ce sont pourtant des pays qui comptent dans le monde”.

Loin de lui l’intention de faire la promotion de l’anti-démocratie, Sami Tchak s’insurge contre l’éternel combat sémantique fait de formules à la limite des incantations. “Pour arriver à changer cet état de choses, il faut des mutations profondes. «Halte à la présidence à vie ! » est un slogan”, souligne-t-il car, “par nos slogans, nous exprimons aussi notre impuissance, car nous n’ignorons pas le très peu de poids de telles démarches”.

Sortir du dogmatisme idéologique

... suite de l'article sur Autre presse

Commentaires

Dans le dossier