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Togo-Suspension de L’Alternative : Pr Togoata et Me Kpandé-Adzaré recadrent Pitalounani Télou

Publié le lundi 15 fevrier 2021  |  icilome
Le
© aLome.com par Edem Gadegbeku & Jacques Tchako
Le Front citoyen TOGO DEBOUT réclame une place au prochain dialogue intertogolais
Lomé, le 26 décembre 2017. Maison de la Santé. Conférence publique du Front citoyen TOGO DEBOUT. Ce Mouvement citoyen réclame une place au prochain dialogue intertogolais. Ayayi Togoata APEDO-AMAH, défenseur togolais des droits humains.
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Dans une longue lettre conjointe adressée au président de la Haute Autorité de l’Audio-visuel et de la Communication (HAAC), Pitalounani Télou, Prof. Togoata Apédo-Amah et Me Raphaël Kpandé-Adzaré sont revenus sur la suspension pour 4 mois du journal « L’Alternative ». Les deux défenseurs des droits humains ont dénoncé une décision « scandaleuse ». Ils n’ont pas hésité à faire la morale à Pitalounani Télou.

«Cette énième décision montre que la HAAC, sous votre direction, est une institution incompatible avec la liberté de presse et la démocratie. (…) Vous ne méritez plus désormais d’assumer la direction de cette institution et devez démissionner ici et maintenant », exigent Prof. Apédo-Amah et Me Raphaël Kpandé-Adzaré, dans leur lettre ouverte. Lisez plutôt !




Lomé, le 11 Février 2021

Monsieur Ayayi Togoata APEDO-AMAH,

Enseignant-chercheur, ancien Secrétaire Général de la LTDH

Maître Raphaël Nyama KPANDE-ADZARE,

Avocat au Barreau du Togo, ancien Président de la LTDH

04 BP 877, Lomé-TOGO

Lettre ouverte

A

Monsieur

Willibronde Pitalounani Télou, Président de la
Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication,
BP: 8697 Lomé, Angle rue EPP AGBALEPEDOGAN face
Hôtel CIFEX, Tél.: (00228) 22 50 16 78/79,

Objet : Votre décision scandaleuse du 05 Février 2021 portant suspension du bihebdomadaire L’Alternative !

Monsieur le Président,

L’affaire fait beaucoup de bruit depuis quelques jours déjà. En effet par décision N°003/HAAC/21/P en date du 05 Février 2021, l’institution que vous présidez vient de suspendre le bihebdomadaire L’Alternative, parce que dans sa parution N°940 du mardi 02 Février 2021, ledit journal a publié un article intitulé « Justice, Succession KUDAWOO, Me Koffi TSOLENYANU, Un faussaire au gouvernement ». En fait, cette sanction ne surprend guère sous le ciel de la dictature togolaise. Cette décision qui n’est qu’une sorte de parjure, ne vient qu’allonger, malheureusement la longue et sempiternelle liste des médias de la presse privée qui ont été cloués au pilori pour le maintien du tyran. C’est un grand scandale !

Dans son ouvrage intitulé «Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence», Charles de Secondat, baron de Montesquieu écrit : «Il n’y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l’on exerce à l’ombre des lois et avec les couleurs de la justice». Il est encore temps qu’on dise aux Togolais à quoi servent encore certaines institutions comme la HAAC et la justice dont les budgets de fonctionnement engloutissent des centaines millions de nos Francs payés à la sueur du pauvre contribuable, et dont les missions sont détournées pour la seule satisfaction de la dictature. Puisque c’est d’elle qu’il s’agit, venons-en à votre décision N°003/HAAC/21/P en date du 05 Février 2021.

Cette décision fait encore couler beaucoup d’encre, à cause de sa curiosité, de sa méchanceté. Nous allons cependant nous en tenir au contenu de cette décision elle-même, du communiqué de la rédaction du journal L’Alternative, de la lettre de protestation que vous a envoyée son Directeur de Publication, monsieur Ferdinand Mensah AYITE, tous en date du 08 Février 2021, ensemble avec la correspondance portant « Récusation de ma signature et opinion dissidente » du 08 Février 2021 que monsieur Zeus Komi AZIADOUVO, membre de la HAAC, vous a adressée. Les Togolais attendent que vous démentiez, tout aussi publiquement et du moins, le contenu des trois derniers documents qui font débat. Sinon comment !

1. Comment pouvez-vous mentionner dans votre décision que le Directeur de Publication n’a pas tenu compte du courrier du 1er Février 2021 par lequel Me Koffi Tsolenyanu demandait à rencontrer ce dernier devant la HAAC, suite à son courrier du 18 Janvier 2021, alors que vous-même vous avez déclaré au cours de l’audition ce qui suit : «J’ai appelé monsieur Koffi Tsolenyanu pour lui dire que la HAAC n’est pas une cour et que sa demande n’était pas recevable » et qu’un autre membre de la HAAC, monsieur Badjibassa Babaka, a bel et bien entériné en ces termes : « La HAAC ne convoque pas le journaliste avant la publication d’un article. C’est après le travail de monitoring que si le journaliste est en faute, on le convoque pour l’écouter. La demande du ministre pour rencontrer le journaliste devant la HAAC était irrecevable ». Comment alors donner force probante et tirer argument d’une démarche que vous-même avez qualifiée d’irrecevable pour asseoir votre décision et entrer en condamnation du Journal L’Alternative ?

2. Comment pouvez-vous mentionner dans votre décision que «Considérant qu’au cours de l’audition, le Directeur de publication du bihebdomadaire L’Alternative, n’a apporté aucune preuve pour soutenir le bien-fondé de ses allégations…» et «qu’en publiant cet article, dont la véracité du contenu n’est pas établie et qui comporte des affirmations gratuites, le bihebdomadaire L’Alternative n’a pas respecté les règles professionnelles, en violation des dispositions du Code déontologie des journalistes du Togo, du Code de la presse et de la communication et de la loi organique de la HAAC», et en faire un motif de condamnation, alors que vous-même avez déclaré, au cours de cette même audition, lorsque les responsables du journal L’Alternative ont voulu vous remettre leurs documents et pièces pour corroborer l’article incriminé, ce qui suit, : «C’est bon, Monsieur Ferdinand. On n’a pas besoin de voir tout ça. Il appartient à la justice de juger des pièces et ce sera pièce contre pièce. Nous, ce qui nous importe, c’est l’aspect déontologie que nous allons voir ».

D’autres membres de la HAAC sont même allés dans le même sens que vous, notamment monsieur Sabi Kasseré qui a déclaré ce qui suit : « Nous laissons à la justice de faire ce travail. Nous, nous ne pouvons pas juger ces pièces. Voici les documents du ministre. Je vous assure que c’est beaucoup de pièces. Vous avez aussi les vôtres. C’est la justice qui fera le reste ».

Il en est de même de messieurs Mathias Ayena, Badjibassa Babaka, qui ont abondé dans le même sens que vous, et pour conclure, vous-même avez encore affirmé, monsieur le président, ce qui suit : « Je suis d’accord. Les pièces, ce n’est pas à la HAAC de les apprécier. Nous laissons le soin à la justice. Ce qui nous intéresse ici, c’est la déontologie (…) ».

3. Comment pouvez-vous affirmer dans votre décision que « Me. Koffi Tsolenyanu a produit à l’appui de sa plainte des documents et décisions de justice qui contredisent les propos et affirmations publiés dans le bihebdomadaire L’Alternative », et en faire un moyen de justification de la sanction prononcée, alors que vous avez, de bout en bout, ensemble avec la majorité des membres de la HAAC qui sont allés dans votre sens, refusé toute confrontation des pièces, balayé ainsi du revers de la main le principe du contradictoire, base fondamentale et indispensable pour une bonne administration de la justice, fût-elle disciplinaire ? Et quand vous déclarez ne pas vous substituer à la justice pour analyser les pièces qui vous sont présentées par les deux parties, la conséquence directe est de ne prendre alors aucune décision qui fasse référence à l’une quelconque de ces pièces ; sinon sur quoi la fonderez-vous ?

4. Comment pouvez-vous suspendre une entreprise de presse pour quatre (04) mois, avec tout ce qu’il y a de conséquences en matière de travail, alors que vous avez vous-même rompu le principe de l’égalité des armes qui veut que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de désavantage par rapport à son adversaire. Et c’est ce que vous avez manqué de faire. Et votre collaborateur, monsieur Zeus Komi AZIADOUVO, vous l’a clairement signifié dans son courrier dissident : «Clairement, Monsieur le Président, nous avons pris le parti du ministre TSOLENYANU». C’est trop facile, monsieur le Président. Votre démarche étonne plus d’un.

En définitive, il semble que votre seul argument qui tienne est que le Directeur de Publication du bihebdomadaire L’Alternative « n’a exprimé aucune disponibilité à rectifier les propos tenus ». Là encore, heureusement que l’un de vos membres vous a bien rappelé les dispositions bienveillantes des articles 21 du Code de déontologie des journalistes et 26 de la loi N°2020-001/PR du 07 Janvier 2020 portant Code de la presse et de la communication en République togolaise qui interdisent l’autocensure en introduisant la clause de conscience : Article 21 : « Le journaliste ne peut être contraint à accomplir un acte professionnel ou exprimer une opinion contraire à sa conviction ou à la conscience ». Article 26 : « Le journaliste, le technicien des médias et l’auxiliaire de presse ont le droit de refuser de participer ou d’être associés à la réalisation d’actes ou à l’expression d’une opinion contraire aux règles de déontologie ». Enfin, vous avez, à plusieurs reprises, invoqué « la déontologie» comme pour trouver une échappatoire.

Non, monsieur le président ! La déontologie désigne l’ensemble des règles et des devoirs régissant une profession. La déontologie, oui donc, mais il n’y a pas une déontologie sans les textes ; et il n’y aura pas une déontologie au-delà des textes. Au final, dites-nous, monsieur le Président, sur quoi se fonde votre décision de suspension de quatre (04) mois prise à l’encontre du Journal L’Alternative. En tout cas, nous ne sommes pas naïfs. Et votre intervention au cours des échanges que la HAAC a eus avec les organisations de presse au Togo sur les fondements déontologiques et éthiques du journalisme, le mardi 09 Février 2021, quelques jours seulement après votre couperet, a clairement laissé transparaître les réels motifs de cette sanction aux relents liberticides, lorsque vous avez rouspété que : «La récréation est terminée et certains journalistes doivent cesser de se considérer comme des intouchables qui ont le droit de piétiner impunément les règles du métier».

Monsieur le Président, quand on veut siffler la fin de la récréation, il faut respecter soi-même l’heure, donc la siffler envers et contre tous, sans aucune discrimination. Au nom de quoi certains journalistes peuvent traiter des tous les noms d’oiseaux des responsables de partis politiques, de mouvements ecclésiastiques, associatifs et syndicaux dans ce pays sans que la HAAC ne s’en émeuve et les rappelle à l’ordre ? Tout simplement parce que pour eux, tout est permis.

Pouvez-vous dire aux Togolais pourquoi ? Cette énième décision montre que la HAAC, sous votre direction, est une institution incompatible avec la liberté de presse et la démocratie, d’autant plus que le journal L’Alternative et monsieur Ferdinand Mensah Ayité, en particulier, semblent gêner les partisans de la dictature. En effet, l’article incriminé a fait état du Rpt/Unir et de la franc-maçonnerie. Depuis lors, tout Togolais bien avisé savait que le journal L’Alternative et son Directeur de Publication Ferdinand Mensah Ayité étaient dans le collimateur du régime liberticide Rpt/Unir. Il aura suffi, pour s’en rendre compte, de suivre le déroulement de l’affaire dite du Petrolegate et la décision qui s’en est suivie. Notre rôle n’est pas de prendre le parti de monsieur Ferdinand Mensah Ayité ou de soutenir que le plaignant, Me Koffi Tsolenyanu, est un faussaire.

Mais du moment où la HAAC s’est déclarée inapte pour analyser les pièces des deux parties, d’où vient qu’elle ait fait référence et état des pièces d’une seule partie pour asseoir sa décision ? Et ce faisant, vous avez outrepassé vos compétences. Et là se trouve toute la pertinence de la question que monsieur Ferdinand Mensah Ayité vous a posée dans sa lettre de protestation, nous citons : « Pendant qu’on y est, avez-vous eu l’état d’esprit, monsieur le Président, de vous poser la question de savoir, face à la gravite des accusations, pourquoi Me Koffi Tsolenyanu a préféré la HAAC à la justice».

Au demeurant, l’article 1er de la Loi organique N°2018-029 du 10 Décembre 2018 portant modification de la Loi organique N°2004-021 du 15 Décembre 2004 relative à la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) dispose que « La Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication, ci-après dénommée la HAAC, est une institution indépendante vis-à-vis des autorités administratives, de tout pouvoir politique, de tout parti politique, de toute association et de tout groupe de pression».

Et avant leur entrée en fonction, les membres de cette institution prêtent serment devant la Cour suprême réunie en audience solennelle, dans les termes suivants : «Je jure solennellement de bien et fidèlement remplir mes fonctions de membres de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication en toute indépendance et impartialité de façon digne et loyale et de garder le secret des délibérations ». Cette loyauté, vous ne la devez à personne, fût-elle notaire, ministre ou député. Cette loyauté, vous la devez à la loi et à votre conscience, dans le strict respect des principes et valeurs. Désigné membre de la HAAC par décret N°2017-139/PR du 19 décembre 2017, vous avez fait ce serment au peuple togolais devant la Cour Suprême du Togo le 29 Décembre 2017.

Administrateur de radios, ancien Rédacteur en Chef à la Télévision Togolaise, ancien Directeur de la Radio-Lomé, diplômé d’études supérieures et spécialisées en Art, Culture et Communication à l’École de Journalisme de Yaoundé au Cameroun, nous croyions dès lors que vous auriez pu marquer une rupture avec la gestion calamiteuse de vos prédécesseurs feus Biossey Kokou Tozoun et Pitang Tchalla, (que leurs œuvres les accompagnent), qui ont discrédité cette institution de régulation du paysage médiatique, dont la noble mission est « de garantir et d’assurer la liberté et la protection de la presse et des autres moyens de communication de masse», une liberté d’ailleurs prévue par l’article 26 de la Constitution togolaise du 14 octobre 1992 en ces termes : « La liberté de presse est reconnue et garantie par l’État. Elle est protégée par la loi ».

Les libertés d’expression et de presse sont un ferment de la démocratie et de l’État de droit, et soyez en sûr et certain, les Togolais ne se laisseront pas faire car ce sont des libertés qu’ils ont acquises de haute et longue lutte, voire au prix de leur sang et de leurs vies. Vous ne méritez plus désormais d’assumer la direction de cette institution et devez démissionner ici et maintenant.

Monsieur le président, nous ne vous saluons pas.

Professeur Ayayi Togoata APEDO-AMAH, Enseignant-chercheur, Ancien Secrétaire Général de la Ligue Togolaise des Droits de l’Homme (LTDH)

Me Raphaël Nyama KPANDE-ADZARE, Avocat au Barreau du Togo, Ancien Président de la Ligue Togolaises des Droits de l’Homme (LTDH)

Ampliations :

– Missions diplomatiques et consulaires accréditées au Togo

– ONGs de défense des Droits de l’Homme

– Presse nationale et internationale

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