Par Sikeade Egbuwalo (Point focal de la Convention du Nigeria sur la biodiversité)
Le Congrès mondial de la nature débute ce 3 septembre à Marseille. L’occasion de rappeler que la lutte contre le changement climatique et la protection de la biodiversité sont des enjeux particulièrement cruciaux en Afrique subsaharienne.
De nombreuses personnes en Afrique dépendent exclusivement des ressources naturelles pour assurer leur subsistance et leur protection. L’importance cruciale des services écosystémiques pour soutenir ces dernières ainsi que la croissance économique a placé la conservation de la nature au cœur des discussions sur le développement socio-économique de l’Afrique. Ce qui a été réaffirmé lors des discussions ministérielles portant sur le renforcement de l’action environnementale en vue d’un redressement efficace du continent après la pandémie du Covid-19.
Les récentes conclusions sur la gravité de la crise de la biodiversité y sont de plus en plus alarmantes, alors que le monde est confronté à un phénomène d’extinction massive avec un million d’espèces menacées, dont beaucoup au cours des prochaines décennies.
Aujourd’hui, seulement 15% des terres émergées et 7% des océans sont protégés. Des scientifiques et des experts renommés ont établi que si nous n’étendons pas les aires protégées et conservées à au moins 30% de la surface de la planète d’ici 2030, notre capacité à atténuer le changement climatique sera compromise.
L’avenir après-Covid-19
Les modèles climatiques indiquent que l’Afrique subsaharienne sera particulièrement touchée par les effets négatifs du changement climatique sur la production agricole et la sécurité alimentaire. The Conservation Continent, un document réalisé en collaboration entre la Fondation Brenthurst et la Fondation Hailemariam and Roman et publié en juillet 2020, a révélé que la protection de la biodiversité était essentielle pour préserver l’avenir après-Covid-19 d’une Afrique prospère, saine et durable.
Si nous n’agissons pas maintenant, les pressions exercées sur le monde naturel continueront de menacer les sources d’eau potable, la prospérité des communautés isolées et la capacité de la nature à nous protéger contre les intempéries, les inondations, les incendies de forêt et autres catastrophes naturelles, dont les pandémies.
Si aucune mesure urgente n’est prise, d’ici 2100 – soit dans 80 ans seulement –, le changement climatique pourrait également entraîner la disparition de plus de la moitié des espèces d’oiseaux et de mammifères du continent, une baisse de 20% à 30% de la productivité de ses lacs et une perte importante de ses espèces végétales. L’importance des aires protégées dans notre réponse à la crise de la biodiversité est donc primordiale pour les communautés locales.
La négociation du Cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, le document de référence fixant de nouveaux objectifs et cibles pour organiser une réponse au niveau mondial, présente des opportunités cruciales pour assurer l’expansion des aires protégées et préserver la sécurité alimentaire, les moyens de subsistance locaux et les services écosystémiques qui soutiennent la vie humaine.
C’est pourquoi le Nigeria plaide pour l’adoption d’engagements visant à étendre les aires protégées à au moins 30 % de la planète d’ici à 2030, par l’intermédiaire de la Coalition de la haute ambition (CHA) pour la nature et les peuples, de l’Alliance mondiale pour les océans et de la campagne Blue Leaders.
Impliquer les communautés locales
Les peuples autochtones et les communautés locales, en tant que protecteurs des sites les plus riches en biodiversité au monde, devraient être engagés en tant que partenaires dans la conception et la gestion des aires conservées et protégées, et devraient voir leurs droits et leurs contributions à la conservation de la biodiversité reflétés dans le Cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 et sa mise en œuvre.
La CHA reconnaît l’importance des territoires gérés et gouvernés par les peuples autochtones et les communautés locales pour freiner la perte de biodiversité et a créé un groupe de travail pour répondre à leurs préoccupations et promouvoir la sagesse autochtone dans les négociations de la Convention sur la diversité biologique.
La Coalition a été initiée par le Costa Rica et plus de la moitié de ses membres proviennent de pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine dont les communautés sont en première ligne face aux ravages causés par la crise de la biodiversité. L’engagement de ces régions vulnérables et mégadiverses fait de la CHA l’un des mécanismes de coordination Sud-Sud les plus efficaces pour défendre la préservation des moyens de subsistance locaux par la protection de la biodiversité dont ils dépendent et constitue un forum important pour le dialogue Sud-Nord entre les pays à faible et à fort revenu.
Le Nigeria et les 17 pays d’Afrique qui ont adhéré à la CHA considèrent celle-ci comme un canal essentiel pour la préservation des communautés locales et de leur droit à une planète saine.... suite de l'article sur Jeune Afrique