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Commentaire: L’étrange idylle entre Lomé et les putschistes

Publié le lundi 13 septembre 2021  |  L'Expression
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© Autre presse par MAECIA
Accompagner la Transition malienne: nouvelle visite du chef de la diplomatie togolaise, Pr Robert E. K. Dussey ce 6 septembre.
Bamako, le 06 septembre 2021. Accompagner la Transition malienne: nouvelle visite du chef de la diplomatie togolaise, Pr Robert E. K. Dussey auprès de son homologue malien et du président Assimi Goïta. Pr Dussey avec le président Assimi Goïta.
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Au moment où les coups d’Etat ressurgissent sur le continent africain, comme un rempart des peuples opprimés contre la boulimie des despotes assoiffés d’un pouvoir illimité, l’opinion africaine voire internationale assiste, non sans curiosité, à un rapprochement entre le régime…


Au moment où les coups d’Etat ressurgissent sur le continent africain, comme un rempart des peuples opprimés contre la boulimie des despotes assoiffés d’un pouvoir illimité, l’opinion africaine voire internationale assiste, non sans curiosité, à un rapprochement entre le régime de Lomé et celui des nouveaux maîtres. Dans le rôle d’émissaire tout terrain de Faure Essozimna Gnassingbé, Robert Dussey. Que se cache-t-il derrière cette nouvelle diplomatie que déploie le pouvoir togolais vis-à-vis des nouveaux «seigneurs des anneaux» qui défont les pouvoirs sur le continent ?

«Je remercie le col Assimi Goita, Président de la Transition et Chef de l’État du Mali pour l’audience et les échanges touchant à la sécurité dans le Sahel », avait twitté le patron de la diplomatie togolaise, le 06 septembre 2021. Une suite logique en réalité des échanges entre l’Exécutif togolais et celui malien incarné par Assimi Goïta, après le coup d’Etat perpétré par la junte au Mali, qui a renversé le président malien Ibrahim Boubacar Keïta le 18 août 2020.

Quelques jours seulement après la prise du pouvoir inconstitutionnelle par le fils du défunt Idriss Deby Itno, le Général Mahamat Idriss Déby, Président du Conseil Militaire de Transition du Tchad qui a suspendu la constitution, a reçu en audience le patron de la diplomatie togolaise. Officiellement, l’émissaire de Faure Gnassingbé devait présenter la compassion du peuple togolais et de son président envers le peuple tchadien, à la suite du décès d’Idriss Déby Itno, exprimer la disponibilité du Président de la République à accompagner le peuple tchadien et le Conseil Militaire de la Transition en vue de l’organisation d’une transition pacifique et inclusive. Et surtout, pour une transition réussie. Ce ne serait pas renversant de voir le même Robert Dussey parader aux côtés des nouveaux maîtres de la Guinée.

Mais Faure Gnassingbé serait-il altruiste à ce point ? Les initiatives visant à rapprocher le régime de Lomé et ceux des putschistes seraient-elles motivées dans l’absolu, par la posture pacificatrice de Faure Gnassingbé qui ne rechercherait que la paix et la stabilité dans les autres pays ? Qu’est ce qui fait tant courir Lomé vers es putschistes ?

Au-delà des déclarations officielles, Faure Gnassingbé qui cumule lui-même, trois mandats au pouvoir et qui est toujours contesté dans son pays, recherche une certaine légitimité de la communauté internationale, ayant conscience d’avoir perdu la bataille de la légitimité que le peuple reconnaît à ses dirigeants réellement élus démocratiquement, croit dur comme fer un sympathisant de la cause de l’alternance. Feu Eyadèma l’avait fait de son vivant, avec maestria alors qu’il voulait se refaire une certaine virginité politique.

Lomé, se souvient-on, s’impliquait dans les crises qui naissaient en Afrique, offrant d’assurer des médiations dont la plupart se soldaient par des échecs. Effacé un temps des questions africaines, le fils d’Eyadèma, requinqué par sa méthode de gestion de la crise bissau-guinéenne au moment où il était président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement ouest africains, marche désormais dans les pas de son père.
Le jeune président voudrait ainsi s’assurer sur la scène africaine, un leadership qui fera de lui, une pièce incontournable dans la sous-région ouest africaine, le Sahel ou autres sur les questions en rapport avec la paix et la sécurité. Déjà que les Forces de Défense et de Sécurité togolaises sont réputées pour assurer, avec professionnalisme leur mission sous le couvert des Nations Unies, partout où elles interviennent.

Mais d’après une partie de l’opposition togolaise, la stratégie de Faure Gnassingbé consistant à offrir de l’expertise, des conseils ou à développer une certaine diplomatie avec les putschistes viserait in fine à offrir au régime de Lomé, une protection contre d’éventuels coups, et pour cause.

Les oppositions dans certains pays ont tendance à nouer des relations privilégiées avec les putschistes, histoire de bénéficier de l’expertise et de l’art de ces derniers pour répliquer l’expérience de coup d’Etat face aux dictatures qui les empêchent de conquérir le pouvoir par la voie des urnes. Certains thuriféraires du pouvoir togolais n’avaient-ils pas révélé des liaisons qu’ils disaient trouver suspectes entre les éminences grises de la chute du pouvoir de Blaise Compaoré notamment le Mouvement «Le Balai Citoyen» et certains activistes réputés proches de l’opposition togolaise ?

La stratégie visant à assister les nouveaux maîtres dans les pays où des coups d’Etat surviennent sur le continent, cache en réalité très mal, la volonté du pouvoir togolais de couper l’herbe sous les pieds de ses opposants qui seraient tentés par l’aventure des coups d’Etat. Et en outre, de contraindre les putschistes à un devoir de loyauté vis-à-vis de lui. Ce qui implique que ceux-ci ne fassent rien qui soit de nature à nuire à leur partenaire des premières heures, Faure Gnassingbé ou encore l’assistent dans les renseignements, au besoin.

Si l’élimination physique des meneurs de coups d’Etat salvateurs ou des porteurs de projets révolutionnaires n’est plus d’actualité, or les militaires qui perpétuent les idées de Thomas Sankara ou celles de Jerry John Rawlings se font toujours aussi menaçants face aux pouvoirs en pleine dérive totalitaire, la stratégie payante visiblement pour le pouvoir Faure Gnassingbé est de s’acoquiner avec eux, plutôt que de les avoir en horreur. Histoire d’éviter la contagion qui pourrait l’emporter, à son tour. Car de toute évidence, il est préférable de les avoir comme amis. C’est la vraie raison sous-jacente derrière ces courses folles de Robert Dussey vers les putschistes, sous le prétexte de mission de bons offices.
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