A l’occasion de la célébration de la 32è édition de la journée de l’enfant Africain, la ministre de l’Action sociale, de la Promotion de la femme et de l’Alphabétisation, Adjovi Lolonyo Apedoh-Anakoma relève les avancées et les défis du Togo, en matière de protection des droits des enfants…
Madame la ministre, la communauté africaine célèbre encore ce 16 juin, la journée de l’enfant africain…Pouvez- vous nous parler un peu de l’historique de cette journée?
-Apedoh-Anakoma : Depuis 1991, la conférence des Chefs d’Etat de l’OUA a institué le 16 juin comme journée de l’enfant africain, en souvenir du 16 juin 1976 où des milliers d’étudiants sud-africains ont manifesté à Soweto pour exiger une éducation de qualité et non discriminatoire. Des centaines d’enfants ont été massacrés au cours de cette manifestation par le régime de l’apartheid en place à l’époque, laissant ainsi un repère historique à travers le monde en matière des droits de l’enfant.
Qu’implique le thème de cette 32è célébration, à savoir : Élimination des pratiques néfastes affectant les enfants : Progrès sur les politiques et pratiques depuis 2013»?
Apedoh-Anakoma : Plus qu’une tradition, cette 32ème édition interpelle encore une fois les gouvernants, les acteurs de protection de l’enfant et la communauté africaine toute entière à renforcer les actions en vue de garantir un environnement beaucoup plus protecteur aux enfants.
A travers ce thème, il s’agit d’évaluer les approches, les politiques, les programmes et les législations adoptés par les États membres depuis la commémoration de cette journée en 2013 sous le thème : « Élimination des pratiques sociales et culturelles néfastes affectant les enfants : notre responsabilité collective».
Rappelons qu’en 2013, l’un des objectifs principaux était d’accentuer les rôles et les responsabilités des États parties à la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, de sorte à combattre plus efficacement les pratiques néfastes exercées sur les enfants en Afrique. Et, notre pays a bien intégré cette dynamique à travers toutes les dispositions qu’il a prises au profit de tous les enfants, quels qu’ils soient.
Pouvez- vous identifier quelques -unes de ces pratiques néfastes qui nuisent dangereusement à l’avenir des enfants africains?
Apedoh-Anakoma : Il est de notoriété publique que la culture africaine joue un rôle important dans l’éducation et la vie des enfants par la richesse des valeurs qu’elle comporte et qui sont transmises de générations en générations.
Cependant, il n’est pas moins évident que certaines de ces pratiques puissent être aujourd’hui mises en question au regard des mutations inhérentes à l’évolution du monde.
Il s’agit, par exemple, des mutilations génitales féminines, du mariage des enfants, des rites d’initiation dégradants et nuisibles, de l’infanticide, de l’offrande de jeunes filles vierges à des prêtres, de l’élimination des enfants accusés de sorcellerie, des albinos ou des jumeaux sur la base des croyances mystérieuses.
Les causes de ces phénomènes, aussi nombreuses que diverses, se rapportent généralement à la conception de la socialisation de l’enfant, à des soubassements conjoncturels, structurels et économiques.
Et, ces pratiques demeurent nuisibles à l’épanouissement de l’enfant, car elles produisent des répercussions psycho-traumatiques graves et durables sur la santé de l’enfant, son éducation et sa vie sociale à court et à long terme.
Venons-en aux mesures prises par le Togo pour faire face à la situation
Apedoh-Anakoma : Il faut reconnaître que le Gouvernement, sous le leadership du Président de la République Son Excellence Monsieur Faure Essozimna GNASSINGBE, a placé la protection de l’enfant au cœur de ses préoccupations. Depuis 2013 des efforts ont été consentis à plusieurs niveaux pour le renforcement des mesures juridiques, politiques et institutionnelles.
• Sur les plans juridique et politique
L’adoption de la loi n°2015-010 du 24 novembre 2015 portant nouveau code pénal qui criminalise le viol et pénalise le mariage des enfants ;
L’harmonisation à 18 ans révolus de l’âge de mariage dans la législation togolaise, notamment dans le code de l’enfant de 2007 en son article 267 et le code des personnes et de la famille de 2014 en son article 43 ;
L’actualisation de la politique nationale du bien-être de l’enfant et de la politique nationale pour l’équité et l’égalité de genre.
• Sur le plan institutionnel nous avons :
La mise en place du comité national des droits de l’enfant et du cadre national de concertation des acteurs de protection de l’enfant ;
La mise en place des maisons de justice et des centres d’écoute sur les violences basées sur le genre;
Le renforcement en 2018 du mécanisme de dénonciation à travers la ligne verte « Allo 1011 » par le signalement des cas de violences par message et la mise à disposition des informations aux adolescents sur la santé sexuelle et reproductive.
Par ailleurs, plusieurs autres progrès ont été réalisés, notamment :
L’élaboration en 2015 d’une stratégie de communication adressant les pratiques sociales, traditionnelles préjudiciables aux enfants ;
La mise en œuvre du programme national de lutte contre les grossesses et les mariages chez les adolescentes en milieux scolaire et extrascolaire ;
La signature en 2016 d’un engagement additionnel sur le mariage des enfants par les chefs traditionnels et religieux ;
L’élaboration de plans d’actions des chefs traditionnels et religieux dans le cadre de la mise en œuvre de la déclaration de Notsè et de l’engagement additionnel de Togblékopé ;
L’élaboration de modules de formation en compétences de vie courante des adolescent(e)s et jeunes extra scolaires ;
La mise en place de 165 organes fédérateurs qui veillent à la protection des enfants au niveau communautaire.
C’est l’occasion ici de saluer la parfaite collaboration qui existe entre les acteurs publics, les partenaires techniques et financiers, les organisations de la société civile, et de les encourager à plus d’efforts pour des actions concertées dans l’intérêt supérieur de nos enfants.
Je voudrais aussi exprimer la reconnaissance du Gouvernement aux chefs traditionnels et religieux, qui ont fait de cette lutte leur cheval de bataille.
Quelles sont les activités qui vont meubler la célébration de cette année?
Apedoh-Anakoma : En dehors de cet entretien que nous accordons aux médias présentement, les activités ci-après sont retenues :
L’organisation de deux ateliers régionaux de bilan sur la lutte contre les pratiques préjudiciables aux enfants à Lomé et Dapaong,
Des sensibilisations sur les pratiques culturelles néfastes à travers les médias et les réseaux sociaux ;
La parole va être donnée aux enfants à travers l’animation de dialogues virtuels avec les adolescents et jeunes pour recueillir leur avis sur le sujet ;
La création de villages modèles en vue de promouvoir les bonnes pratiques en matière de lutte contre les pratiques préjudiciables aux enfants.
Avez –vous un message pour clôturer cet entretien?
Avant de finir, je voudrais renouveler au nom de tous les enfants, notre gratitude au Président de la République, Son Excellence Monsieur Faure Essozimna GNASSINGBE pour l’impulsion nécessaire qu’il ne cesse de donner au Gouvernement par rapport aux actions pertinentes à mener au profit des enfants.
Je réitère également la gratitude du Gouvernement aux partenaires techniques et financiers, aux organisations de la société civile pour leur appui constant ; aux chefs traditionnels et religieux notre admiration pour leur dévouement exemplaire en faveur des engagements pris.
J’exhorte l’ensemble des acteurs impliqués dans la protection des enfants à s’approprier le thème de cette édition à travers des synergies d’actions urgentes, pertinentes et innovantes pour le meilleur devenir de tous les enfants.
Aux parents, aux éducateurs et formateurs, nous exprimons notre reconnaissance et nos encouragements.
Aux enfants eux-mêmes, nous souhaitons une bonne fête et les invitons à l’esprit de sagesse et d’obéissance pour grandir en toute sérénité et devenir des citoyens responsables de demain.
Propos recueillis par l’équipe de communication du MASPFA