« L’utopie n’est que le nom donné aux réformes lorsqu’il faut attendre des révolutions pour les entreprendre » (Jacques Attali)
La réponse écrite de Faure Gnassingbé à
Jean-Pierre Fabre défraie la chronique. Le fait relève quasiment de
l’inédit dans les habitudes politiques au Togo, qu’il est repris et
commenté avec intérêt par bien de journaux, sans laisser de marbre les
citoyens. Les débats vont bon train. Mais en réalité, le contenu de
cette lettre de Faure pourrait être approfondi.
Que répond au juste Faure à Fabre ? Chacun a son avis sur la question. « …Assemblé
Nationale où les principaux courants politiques sont représentés (…)
offre ainsi le cadre le plus indiqué pour débattre utilement des
réformes envisagées, conformément à l’esprit de l’Accord politique
global… », dit en effet Faure. Voilà donc la substance de cette
lettre qui en rajoute au flou. Nombreux sont ceux qui auraient souhaité
que le N°1 togolais réagisse sur d’autres questions brûlantes telles,
les élections locales, les réformes, le dialogue… plutôt que d’évoquer
clairement ces questions, Faure passe à côté en évoquant l’Apg,
l’Assemblée nationale. Pourtant, il est évident qu’évoquer encore l’Apg
est une équation à plusieurs inconnus pour les Togolais. Sinon c’est une
belle moquerie. Pourquoi tant de flou encore? Alors qu’il est plus
qu’urgent de passer à l’essentiel sans attendre.
Inédit, le courrier de Faure sème
d’autant plus la confusion qu’il semble avoir été taillé sur mesure,
dans l’idée de divaguer et d’éluder, comme d’habitude, l’essentiel à
l’approche des échéances électorales capitales. Faut-il dès lors
comprendre qu’il suffira de répondre de cette façon floue pour résoudre
les problèmes urgents qui doivent précéder la présidentielle de 2015 ?
La manière de faire, dans l’affaire de cette lettre de Faure rappelle
celles – les plus tordues -que tous les Togolais connaissent au
Rpt-Unir. On tourne en rond pendant que le chapelet du temps s’égrène.
Et au final, l’adversaire est coincé au pied du mur.
Nous osons croire que Faure en s’engageant dans cette nouvelle campagne avec une telle lettre-réponse pour le moins, « énigmatique»,
se décidera enfin à aller au-delà, à surmonter la viduité que ce
courrier laisse, pour enfin toucher du doigt avec l’ensemble de la
classe politique, les vraies questions à mêmes de nous délivrer de notre
impasse politique.
Dans cette affaire, on a beau écouter
tous les points de vue divergents, la nuance des arguments ne parvient
pas à masquer la déception. Car la lettre présidentielle survient
surtout au moment où l’urgence des réformes constitutionnelles et
institutionnelles est là aussi bien au bénéfice de l’opposition que
celui du pouvoir.
L’incertitude de ces réformes, sert
autrement de révélateur d’un blocage politique qui a encore de beaux
jours devant lui. C’est pourquoi il faut prendre l’initiative sans
perdre du temps. Il ne faut pas évoquer cette possibilité et l’intérêt
des réformes pour tous, tout en adoptant une attitude allant dans le
sens contraire. La demande de Fabre à travers sa lettre a aussi –
rappelons-le – une dimension constitutionnelle. Place alors au dialogue
et aux réformes.
Ivan Xavier PereiraLIBERTE HEBDO