Le 28 novembre 2017, à Ouagadougou, le président français Emmanuel Macron prenait un engagement, devant 800 étudiants, à l’aube de son premier mandat.
Cet engagement revêt encore aujourd’hui une importance très particulière puisqu’il visait à restituer les œuvres pillées à l’Afrique durant la colonisation.
«Le patrimoine Africain doit pouvoir être exposé en Afrique » et «je ne peux pas accepter qu’une large part du patrimoine culturel de plusieurs pays africains soit en France», avait déclaré le chef de l’Etat, émettant le vœu « que d’ici cinq ans, les conditions soient réunies pour des restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain en Afrique».
Pour dresser un état des lieux de la situation, Macron a nommé dès 2018, deux experts pour étudier et livrer leurs recommandations sur la restitution des œuvres africaines.
Il s’agit de Bénédicte Savoy, historienne d'art et membre du collège de France, et Felwine Sarr, écrivain et universitaire sénégalais, qui ont été désignés pour examiner les conditions dans lesquelles les œuvres pourront être rapatriées et mises à l'abri dans leurs pays d'origine.
Mais cinq ans plus tard, il semblerait que les processus de restitution, qui requièrent une base législative, soient bien plus complexes et que seules quelques œuvres aient pu retrouver leur terre d’origine.
Selon une étude du journal Le Monde, pas moins de 90 000 objets appartenant à l’Afrique, sont toujours, à ce jour, détenus par des musées publics français et considérés comme «inaliénables».
Le 24 décembre 2020, une loi relative à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal est définitivement adoptée par le parlement français et permet aux deux pays récupérer, dans la foulée, les 26 œuvres du trésor d’Abomey, demandées par le Bénin, et le sabre dit d’El Hadj Omar Tall et son fourreau par le Sénégal.
Réclamé de longue date par la Côte d’Ivoire, le Djidji Ayokwé, tambour emblématique d’une tribus locale, est pour sa part en cours de restauration, avant d’être rendu à Abidjan.
De son côté, la couronne de Ranavalona III, dernière reine de Madagascar, a été renvoyée vers Antananarivo en novembre 2020 mais sans que la loi nécessaire à l’officialisation de cette restitution n’ait été votée, et donc sans aucun cadre légal officiel.
Le Mali, le Tchad et l’Ethiopie réclament quant à eux plusieurs milliers d’œuvres leur appartenant dont la plupart sont exposées au musée du Quai Branly.
Selon le rapport rendu à Emmanuel Macron en novembre 2018, et rédigé par Bénédicte Savoy et Felwine Sarr, pas moins de 85 à 90% du patrimoine africain se trouve en dehors du continent.
Le musée du Quai Branly est naturellement le plus concerné puisque sur les 70 000 œuvres qui y sont exposées, les deux tiers ont été acquises entre 1885 et 1960 et relèvent donc potentiellement d’une spoliation de patrimoine.
Mais au delà des œuvres d’art, il existe d’autres « objets » qui sont détenus par la France grâce à des procédés historiques très contestables.
Le dossier le plus emblématique de ces dernière année reste sans aucun doute la question des crânes de résistants algériens exposés au musée de l’Homme et dont 24 ont été rendus à Alger en juillet 2020.
La requête officielle, émise par les autorités algériennes en décembre 2017 avait pu aboutir grâce au travail minutieux de l’archéologue et historien algérien Ali Farid Belkadi.
En 2011, le chercheur a identifié 68 crânes ayant appartenu à des combattants anticolonialistes algériens dans le célèbre musée situé au cœur du Trocadéro à Paris.
Les autorités françaises avaient pris pour habitude, à l’époque coloniale, d’envoyer en métropole, les têtes décapitées de ceux qu’ils considéraient comme des ennemis, pour les entreposer, leur conférant la valeur d’un trophée de guerre.
À l’issue de ses travaux d’identification, Ali Farid Belkadi, a pris l’initiative de rédiger une pétition réclamant «le rapatriement en Algérie des restes mortuaires de résistants algériens conservés dans les musées français».
Parmi les têtes momifiées, figurent notamment « les crânes appartenant à Mohamed Lamjad Ben Abdelmalek, dit Chérif "Boubaghla", à Cheikh Bouziane, chef de la révolte des Zaatchas, à Moussa El-Derkaoui, à Si Mokhtar Ben Kouider Al-Titraoui », précise la pétition.
Mais en octobre dernier, une enquête du New-York Times, a révélé que sur les 24 crânes, seuls 6 avaient pu être formellement identifiés comme appartement à des résistants algériens, semant le doute sur la nature des autres restes humains rendus à l’Algérie.
Cinq ans après sa promesse, Emmanuel Macron apparaît ainsi bien loin de l’objectif qu’il s’est fixé, à savoir, le retour des bien africains, sur leur continent d’origine.... suite de l'article sur Autre presse