Il a été nommé à un moment où le pays connaissait des soubresauts sur le plan sociopolitique. Précédemment ministre du Commerce et de la Promotion du Secteur privé, Arthème Séléagodzi Ahoomey-Zunu a été parachuté à la Primature par le Prince pour, dit-on, sauver la situation précaire qui prévalait dans le pays. Pour ce faire, une feuille de route bien précise lui a été confiée. Il s’agit notamment de l’approfondissement du dialogue démocratique, de la plus large participation de tous à la gestion des affaires du pays, du respect des règles de bonne gouvernance avec la poursuite de l’assainissement des finances publiques et du développement des libertés publiques. Treize (13) mois après, ce transfuge de la Convergence Patriotique Panafricaine (CPP) est sur le point de quitter certainement la Primature sur la pointe des pieds, laissant en l’état le pays.
Les faits donnent aujourd’hui raison à ceux qui ont, dès les premières heures de sa nomination, crié au scandale. Non pas parce que sa tête ne leur plaisait pas, mais tout simplement parce qu’on lui a confié un service dans lequel il ne peut réussir, malgré l’étalage de ses diplômes lors de sa présentation. Puisque la Primature au Togo est devenue une vache à lait, Ahoomey-Zunu n’a fait que profiter de son passage pour se construire un château dans son village natal. Concernant la feuille de route, aucun acquis n’est à l’actif du Premier ministre le plus controversé que le pays ait jamais connu.
S’agissant de l’approfondissement du dialogue démocratique, c’est un échec retentissant qu’a connu Ahoomey-Zunu. Deux fois de suite, un simulacre de dialogue organisé par son gouvernement s’est heurté à la vigilance de l’opposition. Comme toujours, ce sont des dialogues sans tête ni queue, qui n’ont pas d’ordre du jour précis et dont les conclusions ont toujours été charcutées par certains sbires du pouvoir qui n’ont aucun respect pour la hiérarchie. L’ancien élève d’Edem Kodjo n’a même pas su capitaliser les efforts de Mgr Nicodème Barrigah et des diplomates qui ont réussi à amener les protagonistes dans des discussions informelles. Puisque, selon des observateurs, il est devenu un valet de plus pour le Prince, ne maîtrisant pas ses ministres qui remettent en cause le travail construit par les négociateurs. Son gouvernement n’est même pas capable de respecter les petits accords issus de ces discussions et qui pouvaient contribuer un tant soi peu à l’apaisement. Bien plus, le Premier ministre n’inspire plus confiance. La preuve, pour appeler le pouvoir au dialogue avec l’opposition, Mgr Nicodème Barrigah et l’Ambassadeur des Etats-Unis ont dû recourir directement à Faure Gnassingbé, le Premier ministre devenant un simple épouvantail. Le dialogue éclair qui a précédé le scrutin législatif du 25 juillet dernier n’a rien changé à ce processus piloté unilatéralement par le pouvoir RPT/UNIR, en complicité avec la Commission électorale nationale indépendante (Céni) qui a accouché des résultats frauduleux donnant pour majoritaire le parti au pouvoir.
La plus large participation de tous à la gestion du pays et le respect des règles de bonne gouvernance avec la poursuite de l’assainissement des finances publiques, voilà d’autres chantiers sur lesquels on n’a pas vu Ahoomey-Zunu. C’est sous son gouvernement que les caisses de l’Etat ont été déclarées vides, malgré les milliards que génèrent le port, l’aéroport, les douanes, les impôts et autres sociétés d’Etat embrigadées par des pontes du pouvoir.
La bonne gouvernance et l’assainissement des finances publiques se trouve être un vœu pieux. Pire, l’autre feuille de route qui consiste en le développement des libertés publiques n’a pas semblé exister sous Ahoomey-Zunu. Les manifestations de rues ont connu une répression des plus violentes sous ce gouvernement, soldées par la mort de deux jeunes élèves à Dapaong le 15 avril dernier, dont un est encore à la morgue.
On dirait même qu’avec l’arrivée d’Arthème Ahoomey-Zunu à la Primature, la crise sociopolitique s’est aggravée. Celui qui, avec cette feuille de route remarquable, devrait apporter la solution, est devenu le problème que les Togolais ont dû s’employer à résoudre pendant 13 mois. Mais tout cela n’a jamais ému le locataire de la Primature qui, lorsque l’occasion se présentait à lui, se promenait dans sa région pour charmer les populations en faveur du parti au pouvoir. Au lieu de trouver des solutions adéquates à la crise sociopolitique, c’est sur un autre terrain qu’Ahoomey-Zunu s’est beaucoup plus illustré. On le croyait devenir un militant des œuvres caritatives, distribuant des vivres et non vivres aux populations démunies. Il semble avoir oublié sa feuille de route et s’est fait particulièrement remarquer lors de la campagne des législatives, où il a défendu la cause du parti UNIR.
13 mois à la Primature, Arthème Ahoomey-Zunu a plus que déçu. La proclamation des résultats définitifs des élections législatives du 25 juillet dernier par la Cour constitutionnelle sonne la fin de la mission de son gouvernement. L’homme est sur le point de sortir par la petite porte, avec un bilan calamiteux. A moins que son employeur qui nous a déjà habitué à des surprises lui renouvelle sa confiance.