Pour l’atteinte de son ambition de plantation d’un milliard d’arbres en 2030, le gouvernement togolais mise sur le reboisement, qui s’opère par la mise en terre de jeunes plants. Or, d’après le ministère de l’Environnement et des Ressources forestières, beaucoup de pépiniéristes manquent de connaissances suffisantes sur les bonnes pratiques permettant d’assurer le bon développement des plantules pour accompagner la vision du gouvernement. Quels sont les techniques de production et d’entretien des plantules ?
Qu’est-ce qu’une plantule ?
Le directeur préfectoral (DP) de l’Environnement, Lt des Eaux et Forêts, Akparo Blaise, Ingénieur des travaux des Eaux et Forêts définit une plantule comme une jeune plante germée, ne comportant que quelques feuilles, obtenue peu après la germination de la graine et qui se développe encore à partir des réserves contenues dans ses cotylédons. Elle se produit, dit-il, sur un site appelé pépinière, destiné à la production des plants avant la mise en terre. L’objectif, selon lui, est d’obtenir des plants de qualité, c’est-à-dire lignifiés, capables de résister aux intempéries dès la mise en terre. « La plantule est le premier stade d’une plante produisant des graines ou des marcottes. Elle est un jeune individu issu du développement d’une graine ou d’une spore. Cette plante embryonnaire existe lors de la germination quand les cotylédons sont encore fonctionnels », a-t-il expliqué.
Selon le Lt Akparo, lorsque les conditions sont favorables, la graine s’imbibe d’eau et la croissance de la plantule commence, c’est la germination. Il a précisé que grâce aux réserves de la graine, le premier organe à se développer et à sortir est la radicule, suivie de la tige portant les premières feuilles embryonnaires ou non.
D’après le directeur préfectoral, les plantules sont utilisées dans la culture des arbres forestiers (foresterie), tels que le chêne et le hêtre. A l’en croire, les plantules d’un, deux et trois ans peuvent encore être facilement transplantés. Le seul inconvénient, signale-t-il, est que parfois la racine pivotante est endommagée, ce qui facilite le renversement de l’arbre à un âge plus avancé.
Les techniques de production des plants en pépinières
Pour la production des plants en pépinières, le DP Environnement souligne que les semis se font dans les sillons espacés de 20 à 25 cm ou dans les pots (plastiques) et ayant une profondeur de 1 à 2 cm. Il souligne que le semis direct en pots est la meilleure méthode pour faire germer facilement les graines. Il conseille d’arroser abondamment une fois le matin et une fois le soir. Après la germination des graines, le pépiniériste doit désherber chaque fois que les herbes poussent dans les planches et cultiver la terre autour des plantules pour leur bon développement. Pour la production des plants en pots, les conditions tropicales sèches requièrent que l’on utilise beaucoup plus les plants produits en pots que ceux à racines nues.
Le Lt Akparo relève que pour avoir une bonne croissance, le pépiniériste doit choisir un bon site. « L’emplacement de la pépinière doit tenir compte d’une surface aussi plane que possible, bien dégagée, ensoleillée en pente légère, et à faible régime de vents. Pour la production à racines nues, il sera bon de chercher un sol perméable et fertile, léger et sableux. Il est nécessaire d’en disposer d’une possibilité d’approvisionnement en eau qui peut être un puits, un forage, un cours d’eau, lac de façon permanente », a-t-il ajouté.
Le DP de l’Environnement a laissé entendre que l’aménagement de la pépinière, doit comporter plusieurs opérations. Il a cité, entre autres, le nettoyage correct de la surface et des alentours, l’aplanissement de cette même surface, la délimitation et la mise en place d’une clôture de protection contre les animaux (grillage ou haie-vive).
Le Lt Akparo a affirmé que pour obtenir une bonne planchette, il faut utiliser la terre légère et riche en éléments nutritifs pour le remplissage des plastiques, et éviter les sols où les mauvaises herbes poussent en abondance. Il préconise de mélanger plusieurs composants pour obtenir de la terre d’empotage convenable.
Comment remplir et classer les pots ?
M.Affoh-Dogo Obayéou, un pépiniériste expérimenté et apprécié par ses pairs pour son savoir-faire, affirme que le remplissage des pots ou plastiques doit être fait directement à la main. « Il faut tasser bien les pots et laisser une réserve d’environ de 0,5 à 1 cm pour les semis. Ne pas remplir complètement les pots afin d’empêcher l’eau d’arrosage de s’infiltrer », a-t-il confié.
Pour lui, le semis direct en pots est la meilleure méthode pour les espèces qui germent facilement et plus ou moins en même temps. « Il faut une ombrière avec de la paille, des nattes confectionnées à partir de tiges de sorgho, de mil ou d’herbes ou des seccos pour conserver l’humidité. Les soins à apporter aux plantules comprennent l’arrosage, le désherbage, le binage, le démariage, et le rhabillage », a-t-il expliqué. Il suggère également « d’enlever les mauvaises herbes qui poussent dans le pot, de faire un léger binage et de temps en temps déplacer les pots afin que les racines de plantules ne s’enfoncent pas dans le sol ».
D’après M. Affoh-Dogo, le principal avantage des pépinières est bien sûr la qualité des végétaux qu’elles proposent. « En les cultivant avec autant d’attention, pendant des mois voire des années, les pépiniéristes développent des plantes de grande résistance, esthétique et généreuses en fruits, feuillages, fleurs et légumes », a-t-il mentionné. Fixée dans le sol par les nouvelles racines, la plantule, poursuit sa croissance. « Les racines s’allongent et s’enfoncent, la tige s’allonge et grossit ; et les bourgeons présents sur la plantule s’ouvrent et forment de nouvelles tiges. Elle donne sa forme à la plante », a-t-il poursuivi.
Le pépiniériste précise que la croissance d’une plante à graines se déroule en trois étapes à savoir la germination de la graine en plantule, le développement du jeune plant et le vieillissement en plant adulte. Cette croissance demande de l’eau, de la lumière, de sels minéraux et du gaz carbonique (CO2).
Comment combattre les maladies et les parasites
Pour le chef d’agence de l’Institut de conseil et d’appui technique (ICAT) à Pagala, Atcholé Kao, s’il y a un problème parasitaire ou de maladie au niveau des plantules c’est qu’à la base, on a manqué de faire quelque chose. D’après lui, pour une bonne pépinière, les bonnes pratiques ou la bonne manière de le faire c’est d’abord de traiter le terreau, c’est-à-dire, le sol que l’on prend pour mettre dans les sachets en vue d’amener les semences. Il souligne que le traitement s’opère de plusieurs façons mais généralement deux manières sont plus faciles à faire. M. Atcholé cite les traitements thermique et chimique. « Pour le traitement thermique, vous mettez le sol à plat et vous mettez le feu avec une paille sur le sol pour tuer les germes des maladies et parasites qui sont dans le sol. Par rapport au traitement chimique, c’est des produits chimiques qui interviennent et il est conseillé de traiter ce sol ou notre terreau par les insecticides ou les fongicides. Quand on le fait ainsi c’est déjà une bonne manière de démarrer sa pépinière », éclaircit-il.
M. Atcholé souligne qu’« une fois que le terreau est traité et qu’il est en sachet, c’est un premier pas. Le deuxième pas c’est les semences mêmes qu’il faut mettre en terre pour éviter les parasites et les maladies à la levée, c’est-à-dire quand ça pousse, c’est que la semence même doit faire l’objet de traitement par un insecticide ou un fongicide par exemple « calcio, ivori », qui sont des produits appropriés pour traiter les semences à mettre en pépinière ».
Le chef d’agence ICAT préconise aussi, la vérification de la qualité de l’eau, de l’environnement dans lequel la pépinière est installée et celle de la qualité du matériel utilisée pour la pépinière. « Si l’on respecte tout ça et s’il y a encore des maladies, c’est qu’il faut passer au traitement en utilisant un fongicide, un acaricide ou un insecticides », a-t-il conclu.
Les difficultés des pépiniéristes
D’après Kambia Wiyao, un autre pépiniériste opérant dans la commune de Blitta 1, les difficultés auxquelles ils sont confrontés sont relatives aux pertes de plantules dues à des maladies ou des attaques parasitaires. Mais il rappelle qu’en suivant les conseils des techniciens de l’ICAT, ces problèmes peuvent être éviter en traitant le terreau, les semences et en vérifiant la qualité de l’eau, de l’environnement et du matériel.
A ce problème, vient s’ajouter, d’après Mme Atégouna Mikoma, pépiniériste, présidente de la coopérative Nini-Wetgue à Pagala-Lassa, le manque de ressources financières pour l’acquisition du matériel de travail et les difficultés liées à la vente des jeunes plants. Puisque, selon elle, les gens attendent généralement la journée nationale de l’arbre le 1er juin ou le lancement de la campagne de reboisement pour acheter les plants.
La réalisation de la vision du gouvernement en matière de couverture forestière du pays, passe systématiquement par le reboisement qui nécessite la mise à disposition des acteurs publics et privés, des millions de jeunes plants pour leur mise en terre. Pour ce faire, les pépiniéristes doivent jouer leur partition aux côtés du gouvernement en respectant les bonnes pratiques afin d’assurer le bon développement de toutes leurs plantules en vue de respecter les quotas de jeunes plants exigés annuellement pour une plantation d’un milliard d’arbre au Togo en 2030.