Le rapport souligne que les produits énergétiques, le ciment, les matières plastiques, les graisses & huiles et les animaux vivants représentent en moyenne plus de la moitié de la valeur des échanges commerciaux au sein du regroupement économique régional.
La Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Togo sont les pays qui engrangent le plus de bénéfices dans leurs échanges commerciaux avec les autres pays membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), selon un rapport publié le 27 février dernier par Ecofin Pro, la plateforme de l’agence Ecofin dédiée aux professionnels.
Intitulé « Echanges commerciaux intra-UEMOA : les gagnants, les perdants et les enjeux à venir », le rapport précise que ces trois pays sont les seuls à afficher une balance commerciale excédentaire dans le commerce intra-UEMOA.
Selon les données de la BCEAO couvrant la période 2017-2021, la Côte d’Ivoire affiche un solde commercial excédentaire de plus de 679 milliards FCFA en moyenne par an. Il est suivi du Sénégal (498 milliards FCFA par an) puis du Togo, dont l’excédent commercial est de 300 milliards FCFA en moyenne par an.
Les autres pays membres du regroupement économique affichent tous une balance commerciale déficitaire en moyenne, le Mali enregistrant la pire performance avec -808 milliards FCFA de déficit en moyenne, suivi du Burkina Faso (-458 milliards FCFA) et du Bénin (-99 milliards FCFA).
echangesEchanges commerciaux inter-UEMOA entre 2017 et 2021 (en tenant compte des réexportations).
Le rapport indique également que sur les cinq années étudiées (2017-2021), la Côte d’Ivoire et le Sénégal ont gardé le leadership des exportations de produits au sein de l’UEMOA. En 2021, leurs parts se chiffraient respectivement à 35% et 28%, en hausse par rapport à l’année précédente.
En moyenne, la nation éburnéenne exporte chaque année sur la période étudiée, pour plus de 916 milliards FCFA de produits vers les autres pays de l’Union. Le Sénégal exporte, quant à lui, en moyenne plus de 710 milliards FCFA de produits dans la sous-région.
Le Mali et le Burkina Faso sont très dépendants de leurs voisins
Du côté des importations, le Mali et le Burkina Faso sont les pays qui dépendent le plus du commerce intra-UEMOA. En moyenne, le Mali importe chaque année durant la période sous revue plus de 1050 milliards FCFA de produits, soit un peu plus de quatre fois ce qu’il exporte à destination de la région. Son voisin burkinabè importe de son côté en moyenne 566 milliards FCFA de produits pour seulement environ 108 milliards FCFA d’exportations. Vient ensuite le Bénin, qui importe en moyenne pour 221 milliards FCFA de marchandises par an contre 121 milliards FCFA d’exportations.
Le Mali importe ses marchandises principalement du Sénégal et de la Côte d’Ivoire. Le Burkina Faso a, quant à lui, pour principaux fournisseurs la Côte d’Ivoire et le Togo. Il faut cependant noter que les forts volumes d’importations du Mali et du Burkina Faso prennent en compte les chiffres des réexportations. N’ayant pas accès à la mer, le Mali et le Burkina Faso ainsi que Niger, qui importe principalement depuis la Côte d’Ivoire, le Togo et le Bénin, utilisent les ports des pays côtiers pour s’approvisionner en marchandises depuis l’extérieur. Ces pays réexportent ensuite les produits par la route, à destination de leurs voisins de l’hinterland.
Globalement, le niveau du commerce de biens au sein de l’UEMOA est le deuxième plus important du continent derrière la communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) avec une part de 15% du total des échanges de l’Union. Les pays membres de l’UEMOA ont échangé entre eux pour 3063,7 milliards FCFA de marchandises en 2021, soit un peu plus de 5 milliards de dollars. Ce chiffre représentait une hausse de 15% par rapport à celui de l’année 2020.
Le rapport élaboré par notre confrère Moutiou Adjibi Nourou note d’autre part que cinq catégories de produits se distinguent parmi ceux que les pays de la région ont le plus échangé entre eux. Les données collectées de 2017 à 2021 permettent de chiffrer l’ensemble des échanges de biens intracommunautaires à 22 milliards de dollars sur la période. Sur ce volume, les produits énergétiques (pétroliers et l’électricité), le ciment, les matières plastiques, les graisses & huiles et les animaux vivants représentent près de 11 milliards de dollars. Ainsi, ces cinq catégories de produits représentent en moyenne 53,4% de la valeur globales des échanges intracommunautaires.
Avec 32,4% de parts en moyenne sur la période étudiée, les produits énergétiques tiennent le haut du pavé, étant donné que l’Union compte trois grands pays producteurs de pétrole et d’énergie électrique, en l’occurrence la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Niger.
Avec 6,9% du total des échanges, les produits de la cimenterie occupent la deuxième marche du podium devant les produits plastiques (5,7%), les graisses & huiles (4,6%) et les animaux vivants (3,8%).
Des menaces d’ordre politique pèsent sur les perspectives futures
Les échanges intracommunautaires de services ont également connu un essor particulier ces dernières années dans l’espace UEMOA, grâce notamment développement progressif de corridors routiers. Les échanges de services se sont inscrits en hausse de 8,3% pour ressortir à 1506,4 milliards FCFA en 2021 contre 1391,0 milliards un an plus tôt.
Les échanges commerciaux de biens et de services intra-UEMOA qui restent globalement en dessous des attentes, notamment du point de vue des projets d’intégration, devraient s’accélérer durant les années à venir. Le secteur énergétique continuera à concentrer la majeure partie des échanges commerciaux, d’autant plus que l’Union a adopté un plan visant à quadrupler sa capacité de production énergétique à 25 000 mégawatts d’ici 2033. Trois pays ont annoncé récemment la découverte d’importants gisements d’hydrocarbures, à savoir la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Niger. Mais ces perspectives prometteuses pourraient se heurter aux difficultés d’ordre politique qui frappent l’Union depuis quelques mois. Après leur récent retrait de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), trois pays qui ont connu des coups d’Etat (Mali, Burkina Faso et Niger) brandissent désormais la menace d’un retrait de l’UEMOA et du FCFA, qu’ils considèrent comme un outil de domination coloniale. Pourtant, les chiffres de la BCEAO montrent que ces trois pays sont ceux qui dépendent le plus de leurs voisins en termes d’échanges commerciaux.
De plus, Bamako est la principale bénéficiaire des flux intra-régionaux de transferts de fonds des migrants (20% en 2021), en raison du nombre élevé d’émigrés maliens dans la sous-région, alors que la Côte d’Ivoire est la principale source de ces flux (39,4% en 2021). Ces statistiques mettent un peu plus en lumière l’impact que pourrait avoir une sortie de l’UEMOA de ces trois pays qui ont constitué une « Alliance des Etats du Sahel », tant pour eux-mêmes que pour leurs voisins et partenaires historiques.