Le premier Sommet de la Coopération Énergétique en Afrique de l’Ouest (WA-ECS) s’est ouvert mardi 3 décembre à Lomé, un événement stratégique qui réunit gouvernements, partenaires financiers et acteurs du secteur privé. L'événement, organisé par EnergyNet, une société spécialisée dans la promotion des investissements énergétiques, en collaboration avec l'État togolais, bénéficie du soutien de la Banque mondiale. Sous le thème « Bâtir une souveraineté énergétique pour un développement durable », ce sommet de trois jours entend répondre aux défis énergétiques dans une région où une proportion de plus de 50 % de la population reste privée d’accès à l’électricité.
Présidant la cérémonie d’ouverture, la Première ministre du Togo, Victoire Tomegah-Dogbé, a souligné l’importance de cet événement pour l’avenir énergétique de la région : « Ce sommet est une opportunité unique de poser les bases d’un partenariat stratégique, capable de transformer les réalités énergétiques pour un avenir plus sûr et durable de nos populations. »
Avec un taux moyen d’électrification de 56 %, l’Afrique de l’Ouest fait face à des disparités marquées : en zone rurale, l’accès à l’électricité tombe à moins de 10 % dans certains pays. Les discussions du WA-ECS se concentreront sur trois axes principaux : l’interconnexion des réseaux électriques pour mutualiser les ressources, l’intégration accrue des énergies renouvelables dans le mix énergétique et la mobilisation des financements nécessaires, estimés à 30 milliards de dollars d’ici à 2030.
La région dispose pourtant de ressources considérables. Avec une capacité hydroélectrique exploitable de 5 000 MW, seuls 20 % de ce potentiel sont actuellement utilisés. Le solaire et l’éolien, particulièrement prometteurs dans les pays sahéliens, restent encore largement sous-développés. Le gaz naturel, avec des découvertes récentes au Sénégal, en Mauritanie et en Côte d’Ivoire, pourrait également jouer un rôle clé dans le mix énergétique, a indiqué Sediko Douka, commissaire chargé de l’énergie et des mines de la CEDEAO. Pour répondre à la demande croissante – qui augmente de 6 % par an –, le plan directeur des infrastructures énergétiques de la CEDEAO (2019-2033) prévoit la production de 16 000 MW supplémentaires et la construction de 23 000 km de lignes d’interconnexion, pour un coût total estimé à 36 milliards de dollars.
Depuis 2020, plus de 5 milliards de dollars ont été investis dans des projets structurants, notamment dans le cadre du West African Power Pool (WAPP), qui a permis de réduire les coûts de production d’électricité de 30 à 40 % dans plusieurs pays, a précisé Kwawu Mensan Gaba, directeur de la pratique énergie à la Banque mondiale, lors de son intervention. Il a ajouté que des initiatives telles que la ligne Ghana-Togo-Bénin ou le gazoduc ouest-africain illustraient les avancées en matière de coopération régionale :
« Grâce au West African Power Pool, l’intégration des réseaux nationaux progresse et les résultats sont prometteurs. Dans plusieurs pays, cette approche a permis de réduire le coût moyen de production d’électricité de 30 à 40 %. Ces avancées montrent que la mutualisation des infrastructures peut avoir un impact significatif sur la compétitivité énergétique régionale. »
Abdoulaye Sylla, gestionnaire de portefeuille chez EnergyNet, a également insisté : « L'interconnexion de nos réseaux électriques, la mutualisation des ressources et la coordination des politiques énergétiques permettront de maximiser la capacité de l'énergie. »
Le Premier ministre a mis en avant les progrès réalisés par le Togo, dont le taux d’électrification est passé de 52 % en 2020 à 69 % en 2024, avec un objectif de couverture universelle d’ici à 2030. « L’énergie est au cœur de nos ambitions de développement durable… L’énergie est la clé de voûte de notre avenir… une question de justice sociale », a-t-elle souligné. Actuellement, 137 MW de centrales de sources renouvelables sont en cours d’installation.
Les conclusions du sommet devraient aboutir à une déclaration commune, avec pour objectif d’accélérer l’intégration énergétique régionale et de renforcer les partenariats public-privé pour garantir une souveraineté énergétique durable. « Ce sommet n’est pas seulement un cadre de dialogue entre gouvernements et secteur privé. Il doit être un catalyseur pour des actions concrètes. Je vous invite à mettre en œuvre des solutions pragmatiques, à définir des projets prêts à être exécutés et à renforcer les liens entre les gouvernements, les chercheurs, les entreprises et les acteurs de la société civile », a insisté la cheffe du gouvernement togolais.