Quatorze personnes accusées d'avoir pris part aux manifestations contre le régime togolais
en 2018, emprisonnées depuis leur arrestation, ont été condamnées à 10 ans de prison par la
Cour d'assises de Lomé, dans la nuit de lundi à mardi.
Les accusés ont été reconnus coupables de "complot contre la sécurité intérieure de l'État" et
"délit de groupement de malfaiteurs" pour avoir participé à une manifestation de
l'opposition en décembre 2018, malgré l'interdiction des autorités.
Quatre autres accusés en fuite ont été condamnés à 20 ans de réclusion criminelle assortis
d'un mandat d'arrêt international.
En 2017 et 2018, des manifestations organisées par l'opposition et la société civile ont eu lieu
au Togo pour limiter à deux le nombre de mandats présidentiels.
Ces manifestations ont été sévèrement réprimées et plusieurs manifestants ont été tués par
les forces de l'ordre.
"Cette cour d'assises a manqué tout simplement d'audace. Elle n'a pas su tirer la
conséquence des tortures subies par Les accusés", a déclaré mardi à l'AFP Darius Atsoo, l'un
des avocats des accusés.
L'une des personnalités de ce procès, réglé en une journée après six années de détention, est
l'Irlando-togolais Abdoul Aziz Goma.
Installé en Irlande depuis les années 1990, il efectuait des séjours réguliers au Togo pour
afaires.
Sa "détention arbitraire" a été dénoncée à plusieurs reprises par la rapporteuse spéciale des
Nations unies pour les défenseurs des droits de l'homme, Mary Lawlor.
"M. Abdoul Aziz Goma a été arrêté le 21 décembre 2018 après avoir pris en charge les frais de
logement de certains jeunes venus dans la capitale Lomé pour participer à une manifestation
convoquée par le parti politique d'opposition, le Parti National Panafricain (PNP), à laquelle il
n'a, lui-même, pas participé", écrivait-elle en janvier 2024 au gouvernement togolais.
"Depuis son incarcération, l'état de santé de M. Goma s'est dégradé, notamment en raison
d'une pathologie neurologique sévère", ajoutait-elle, mentionnant des "actes de torture".
"La tenue de ce procès constitue en soi un soulagement pour les détenus après des années
d'attente", a commenté à l'AFP Esso-Dong Kongah, Défenseur des droits humains et Directeur
Exécutif du Centre de Documentation et de Formation sur les Droits de l'Homme (CDFDH).
"Toutefois, nous aurions souhaité au regard des débats sur les preuves et certaines
irrégularités dans la procédure en plus de la torture, que les accusés soient simplement
relaxés", a-t-il ajouté.
Le Togo et ses 8 millions d'habitants sont dirigés depuis 2005 par Faure Gnassingbé, qui a
succédé à son père resté près de 38 ans au pouvoir.
Il a été élu pour un quatrième mandat en 2020.
Une nouvelle Constitution a été adoptée en avril 2024. Elle abolit l'élection du chef de l'Etat
au sufrage universel et institue un régime parlementaire, ce qui est dénoncé par l'opposition
et la société civile qui y voient un moyen pour Faure Gnassingbé de se maintenir indéfiniment
au pouvoir.
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