Togo - Le statut de chef de l’opposition-statut constitutionnel- divise l’opposition togolaise. Les partis opposés au Collectif Sauvons le Togo conteste ce statut du chef à Jean-Pierre Fabre, président national de l’ANC. Pour Me Dodji Apevon, l’ANC a trop créé la division pour prétendre être le chef de qui que ce soit. Pour, le président du CAR, le chef de l’opposition c’est celui qui peut rassembler tous les partis et toutes les coalitions, l’UFC incluse.
Vous êtes élu député dans le Grand-Lomé. Il y a cinq ans, vous avez été élu député dans le Vo. Ça n’arrive pas souvent que l’on soit élu à deux échéances dans différents endroits. Une fierté pour votre parti et votre coalition ?
Tout à fait. Au moment où nous avions pris la décision d’être candidat à Lomé, beaucoup nous ont dit, nous sommes entrain de jouer notre avenir politique. Je suis chef de parti, si à tout hasard je ne suis pas élu à Lomé, l’avenir va être plus difficile et compromis. Mais vous savez, en politique, il faut savoir prendre des risques. Et moi je crois que, je me suis montré suffisamment engagé en politique, apposant les pas qu’il faut dans le sens de ce que nous recherchons, et que je suis convaincu que les populations commencent de plus en plus à comprendre la philosophie, la stratégie du courant que je suis entrain d’incarner. C’est pour ça que j’ai pris le risque d’être candidat à Lomé. J’étais convaincu dès le départ que je serai élu. C’est pour ça que je l’ai fait.
Votre risque a payé. vous êtes élu, vous allez à l’assemblée. La rentrée parlementaire, c’était mardi dernier. Vous y allez avec quelle vision du côté de la coalition Arc-en-ciel ?
Nous allons à l’Assemblée avec l’idée que nous sommes une minorité. Nous avons six députés. Tous ceux qui sont aujourd’hui raisonnablement de l’opposition, constituent un groupe assez important. Lorsque nous nous mettrons résolument au travail, nous allons régler un certain nombre de choses parce qu’il y a des préoccupations majeures, il y a tout un pan de réformes constitutionnelles et institutionnelles que nous n’avons jamais réussi à réaliser. Alors, comment aborder ces problèmes là à l’Assemblée pour que nous puissions obtenir les résultats, trouver les moyens pour poser les vrais problèmes de développement de notre pays. Comment engager la bataille contre la corruption ? C’est dans cet esprit que nous allons. Malgré le nombre que nous avons aujourd’hui, nous sommes convaincus que nous poserons les vrais problèmes à l’assemblée. Et nous nous battrons pour que les gens nous entendent. L’UNIR a 62 députés aujourd’hui. Nous avons contesté justement les résultats des élections, mais une fois les contestations passées et nous entrons véritablement dans le rôle du député, il faut que, absolument, nous puissions voire comment poser les problèmes au niveau de l’hémicycle pour obtenir les résultats. Vous vous rappelez, nous avons sorti un communiqué il n’y a pas longtemps au niveau de Arc-en-ciel pour que rapidement des discussions s’ouvrent. Il faut qu’on trouve un cadre de discussion pour que nous puissions mâcher les problèmes qui sont restés en jachère. Et qu’à l’Assemblée on puisse leur trouver justement l’habillage juridique, et qu’on n’aborde plus 2015 avec ces tensions énormes que nous vivons en période électorale. Et que les discussions soient menées à tant, pour qu’on n’attende pas deux mois ou trois mois ou une semaine des élections pour engager des discussions politiques. Ce n’est pas normal. Il faut faire autre chose. C’est pour ça que très tôt nous avons posé le problème, et nous croyons que le gouvernement va nous entendre pour que très rapidement les discussions politiques s’ouvrent, pour que les problèmes réels qui se posent à notre nation, on puisse les poser, et que l’Assemblée puisse servir d’accompagnement à tout ce qui va être fait pour que nous puissions avancer.
Vous parlez de discussions en dehors du parlement, alors que pour d’autres, désormais les réformes doivent se faire dans le cadre du parlement. Est-ce que là aussi, il ne va pas se poser un problème ?
Non ! Nous avons toujours expliqué ce problème il y a trop longtemps.
Mais aussi est-il vrai que vous n’aviez pas la même compréhension ! Vous, vous avez donné cette position. UNIR s’en sort avec 62 députés contrairement à vos prévisions politiques d’avant élection. Donc la mentalité peut ne pas être exactement la même ?
C’est vrai mais, dans l’esprit de l’accord politique global, le cadre de discussion doit être un cadre qui déblaie le débat politique. Et l’Assemblée qui a son mode de fonctionnement, qui est le mode de la majorité, n’est pas le cas d’un cadre de discussion où, la recherche du consensus est la règle d’or. L’accord politique global a dit que sur les problèmes concernant les réformes, il faut rechercher le consensus. Le consensus n’est pas à rechercher à l’Assemblée, mais c’est dans un cadre de discussion politique. C’est ce que nous avons tous décidé en 2006 au moment où nous signions l’accord politique global.
Mais ça veut dire que les réformes à faire seront vos priorités. Mais en attendant de trouver des réponses à ces priorités, est-ce qu’il n’y a pas un grand risque aujourd’hui que vous à l’opposition parlementaire, vous passez plus de temps à chercher qui est votre leader ?
Non, moi je ne veux pas perdre de temps sur ce problème. Le leadership qui nous a posé problème depuis des années, doit être repensé autrement. Lorsque, après une élection, on dit qu’on est leader sans mesurer la responsabilité qui est celle justement du leader, je crois que tout ça là ne nous mènera à rien. C’est ridicule tout ça. Et ce qui me surprend moi un peu, c’est qu’on pense au problème et on l’attelle à un texte. Or, le texte qui consacre le statut de l’opposition aujourd’hui, est un texte à combattre. Aucun opposant ne peut accepter véritablement ces textes là, qu’on a pris sans nous, en disant, qu’il y a aujourd’hui un statut de l’opposition. La définition même qu’on a donné de l’opposant dans ce texte là, personne ne peut y faire référence pour dire qu’on est leader de l’opposition.
Vous pensez donc que vos amis de l’ANC font erreur en pensant que Monsieur Fabre est leader de l’opposition ?
Moi je pense même que si on est sérieux, ce texte là, nous devons nous organiser à le réécrire. On ne peut pas accepter aujourd’hui nous focaliser sur ce texte là pour dire que c’est par rapport qu’on est leader ou pas. C’est vrai, les élections ont donné un résultat. Celui-ci peut dire oui, moi j’ai tel nombre de députés, mais ça ne suffit pas pour créer la responsabilité du leader, et qui doit être celui qui est devant pour impulser justement le rôle du rassemblement ! Parce que, c’est de ça qu’il s’agit. Si on dit qu’on est leader de l’opposition aujourd’hui, en réalité le leader doit réfléchir pour dire, mais comment je fais pour engranger plus de monde et d’adhésion autour de moi, pour que l’opposition puisse exister en tant que famille politique. Nous n’avons jamais été une famille politique à l’opposition ! Nous nous sommes détruits, nous nous sommes allés dans le dénigrement, en pleine élection on fait circuler des gens pour dire, si on vote pour nous, on vote pour UNIR et tout ça. Mais, c’est des choses qui sont totalement ubuesques. Je dis, l’opposition doit être reconstruite. Ce que nous avons fait depuis des années jusqu’à aujourd’hui, moi, ne me permet pas de dire aujourd’hui que nous avons une opposition capable de servir d’alternative. Les gens ne nous ont jamais pris au sérieux parce que nous ne constituons pas une alternative.
Le pouvoir ou les gens ?
Mais la communauté internationale ! Interrogez les gens, interrogez les chancelleries, interrogez même les citoyens. Ils disent que l’opposition pose aujourd’hui problème.
Toute l’opposition à ces législatives a plus de voix que le parti au pouvoir UNIR. Cela veut dire déjà que vous avez le poids si vous voulez faire changer les choses.
Oui, mais pourquoi nous avons plus de voix mais les résultats sont restés ce qu’ils sont. Nous disons oui, ceux qui veulent majoritairement que les choses changent dans notre pays sont très nombreux. Ils restent nombreux. Mais comment faire pour leur redonner confiance, de l’espoir ? Comment faire pour les mettre en ordre de bataille ? C’est de ça qu’il s’agit en réalité. Mais lorsque ceux qui veulent le changement existent potentiellement, et que nous ne les verrons pas à une élection, que plus du tiers s’abstient, il y a problème quand même quelque part ! Moi je pense que l’opposition togolaise doit se remettre en cause. Si nous ne le faisons pas, nous allons périr. Nous devons rechercher le résultat de la gagne. Au jour d’aujourd’hui, celui qui va être le leader de cette opposition là, doit chercher à aller convaincre. Même ceux qui hier n’étaient pas dans la ligne de l’opposition, c’est vrai, l’UFC a posé des actes que nous avons tous décrié, ils sont allés aux élections, ils sont revenus avec le résultat. Si ces gens là réfléchissent, ils doivent dire, ce que nous avons fait n’a pas été apprécié par la population. Nous devons nous remettre en cause. Alors, celui qui doit rassembler véritablement l’opposition doit même faire des pas en direction de ces gens là, pour faire en sorte qu’ils puissent comprendre que l’acte qu’ils ont posé n’est pas normal. Mais il faut que quelqu’un le leur dise. Ils ont quand même engrangé des voix. Ces voix là, nous en avons besoin en 2015 pour gagner. Qui est entrain de faire les démarches là en leur direction pour dire, mais, vous vous êtes trompés, revenez à la maison ? Mais je suis sûr que ces problèmes-là, si on les pose aujourd’hui, si vous faites ça là, vous êtes des renégats. Alors qu’en réalité, le sens profond de celui qui veut rassembler, c’est dans cette direction là. Il faut aller chercher ceux qui sont perdus et égarés, pour que l’opposition redevienne une opposition soudée et unie par rapport à 2015. Le leader, ce n’est pas juste des mots. C’est Houphouët qui disait que c’est des comportements ! Un leader doit avoir un comportement digne de ce nom là. Et ce n’est que comme ça que nous allons nous ressouder par rapport à 2015.