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Interview de Me Yawovi Agboyibo : « A écouter certains, tout se passe comme si l’allié politique est davantage l’adversaire à abattre »
Publié le mardi 1 avril 2014  |  AfreePress


© Autre presse par DR
Me Yawovi Agboyibo, président d`honneur du CAR (Comité d`Action pour le Renouveau)


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Togo - « Le droit au désaccord », c’est le nouveau concept qu’introduit dans le débat politique l’ancien Premier ministre et actuel président d’honneur du Comité d’Action pour le Renouveau (CAR). Pour ce chantre du « dialogue » entre les acteurs politiques togolais, il faut respecter le « droit au désaccord » des uns et des autres.


Cet acteur de première heure de la politique togolaise se dit très « inquiet » en observant la manière dont les partis politiques en lutte pour l’alternance gèrent leurs désaccords sur les stratégies à adopter. « A écouter certains, tout se passe comme si l’allié politique est davantage l’adversaire à abattre (…) Pour la simple raison qu’on n’approuve pas une stratégie qu’il a proposée, on ne recule devant aucun procédé de type fasciste, pour salir le partenaire, notamment des propos injurieux et diffamatoires, des défis sans lendemain, des menaces de lui faire voir du pire s’il s’obstine dans son point de vue », confie-t-il dans une interview exclusive accordée à l’Agence de presse Afreepress.

Lire l’intégralité de l’interview.

Afreepress : Dans votre communication du 21 mars dernier à l’occasion de la célébration par le Cénacle de la 15ème journée mondiale de la poésie, vous aviez lancé la notion du « droit au désaccord ». Que recouvre exactement cette notion ?

Me Yawovi AGBOYIBO : Il ne s’agit pas d’un droit nouveau. C’est un cas d’application de la liberté d’opinion garantie par notre constitution et auparavant par l’article 19 de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Cet article 19 tel qu’il a été libellé a accordé le même traitement à la liberté d’opinion et à la liberté d’expression : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression …».

On s’est aperçu par la suite que les deux libertés n’auraient pas dû faire l’objet d’un traitement pareil. C’est pour cela que 18 ans après, en 1966, à l’occasion de l’adoption du pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Système des nations unies a dissocié leur régime. Il a disposé à l’article 19.3 du pacte que la liberté d’expression et de presse peut être soumise à des restrictions, notamment à l’interdiction de porter atteinte à la réputation d’autrui. L’article 19.1 du pacte international a en revanche affranchi la liberté d’opinion de toute possibilité de restriction : «Nul ne peut être inquiété pour ses opinions ». Cet article a ainsi fait de la liberté d’opinion une liberté de portée absolue à la différence de la liberté d’expression et de presse. C’est du reste en cela que l’article 25 de la constitution togolaise n’est pas en phase avec le pacte en question ratifié par notre pays.

Afreepress : En quoi consiste précisément cette différence que vous faites entre la liberté d’opinion et la liberté d’expression ?

Me Yawovi AGBOYIBO : La différence ne vient pas de moi. Elle est inscrite dans le pacte international ci-dessus rappelé. Elle s’appréhende facilement.

Une opinion est un point de vue. Elle est par essence relative. La personne qui restitue la représentation mentale d’un point de vue ne peut, par application de l’article 19.1 précité, faire l’objet d’aucune inquiétude pourvu que la restitution puisse être censée fidèle.

Il en va autrement lorsque la personne s’en écarte et tombe sous le régime des restrictions concernant l’exercice de la liberté d’expression et de presse. L’opinion est donc une chose, et la façon de l’exprimer, une autre. Il faut savoir exercer l’une et l’autre des deux libertés pour être en mesure de bénéficier de l’immunité absolue attachée à la liberté d’opinion.

Afreepress : Quelle est selon vous la portée politique du droit au désaccord ?

Me Yawovi AGBOYIBO : Elle est extrêmement importante. Déjà au sein des entités extrapolitiques, tel un ménage, une entreprise ou une association, la vie est impossible si les partenaires ne sont pas en mesure de supporter les divergences de points de vue.

A plus forte raison, on ne conçoit pas d’entités politiques qui puissent s’inscrire dans la durée sans garantir le droit au désaccord à leurs membres. Tout régime politique est voué à succomber à un désaveu populaire lorsqu’il s’emploie à recourir à des pratiques de terreur pour empêcher les citoyens d’exprimer leur désapprobation de la façon dont ils sont gouvernés. C’est le propre des régimes dits "fascistes". Le qualificatif est tiré de l’expression "faisceau de cordelettes ", symbole des violences physiques ou verbales auxquelles s’exposent ceux qui osent défier un régime de terreur.

Afreepress : Pensez-vous que le principe du droit au désaccord est aujourd’hui menacé au Togo ?

Me Yawovi AGBOYIBO : Je m’en voudrais de chercher à vous dire que le respect du droit au désaccord, surtout en matière politique, est aujourd’hui acquis au Togo. Il est vrai que la récente ouverture des courants politiques qui se sont jusqu’ici fait applaudir par le refus du dialogue est un déclic de la fin de l’époque où certains s’enfermaient dans leurs opinions au point de les considérer comme non susceptibles de négociation. Cette prise de conscience de la relativité des points de vue est un préalable incontournable de tout dialogue. Il faut s’en féliciter.

Je demeure tout de même inquiet en observant la manière dont les partis politiques en lutte pour l’alternance gèrent leurs désaccords sur les stratégies à adopter. A écouter certains, tout se passe comme si l’allié politique est davantage l’adversaire à abattre pour atteindre cet objectif. Pour la simple raison qu’on n’approuve pas une stratégie qu’il a proposée, on ne recule devant aucun procédé de type fasciste, pour salir le partenaire, notamment des propos injurieux et diffamatoires, des défis sans lendemain, des menaces de lui faire voir du pire s’il s’obstine dans son point de vue.

Afreepress : Que faire dans ces conditions ?

Me Yawovi AGBOYIBO : Il faut œuvrer à la préservation des acquis de notre processus démocratique. Il importe à cet effet d’éveiller nos populations contre les dangers du fascisme.

Propos recueillis par Olivier A.

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