L’information était dans l’air
depuis vendredi 28 mars. Un communiqué conjoint des ministres Yark
Daméhame et Gourdigou Kolani avertissait qu’une liste additive serait
publiée (hier) dans le cadre du concours national de la Police dont la
liste des admissibles a été rendue publique et la liste définitive, le 5
mars 2014. Dans la nouvelle liste qui vient d’être publiée, les deux
ministres, non seulement n’ont pas eu le courage de disqualifier les 43
faux admis, mais en plus ont produit une nouvelle liste de 64 admis dans
laquelle on constate encore des irrégularités qui sont de nature à
douter de la transparence des concours au Togo.
Il nous souvient que suite à la
publication de la liste des 43 faux admis du concours national de la
Police, certains médias gouvernementaux ont jugé bon de titrer : « c’est vilain de mentir ».
C’est vrai que c’est vilain de mentir et il revient à chaque citoyen,
après avoir pris connaissance de ce qui suit, de déterminer si c’est le
quotidien LIBERTE qui ment ou si les menteurs sont à rechercher
ailleurs.
Ainsi, dans la parution N°9256 du
quotidien national du 31 mars 2014, c’est-à-dire d’hier, un énième
communiqué conjoint des deux ministres ajoute un résultat additif de 64
candidats dont 24 commissaires, 15 Officiers de police et 25 Gardiens de
la Paix. Nous avons repris notre bâton de pèlerin et entrepris notre
travail de fouine. Il s’est agi de comparer cette nouvelle liste à celle
des admissibles du 15 novembre 2013 d’abord, et ensuite à celle des
admis du 5 mars dernier. Voici ce que nous avons relevé, et n’en
déplaise aux esprits réfractaires à la bonne gouvernance, nous publions
les noms à problème.
Un Officier de police, Kandjitifam
Souguilimpo et un Gardien de la Paix, Oukpédjo Abdoul Nazir ne
figuraient pas sur la liste des admissibles du 15 novembre, mais sont
déclarés admis.
D’un autre côté, et c’est ce qui paraît
plus grave et qui remet sur le tapis la légèreté dont des autorités ou
des agents font preuve vis-à-vis de l’avenir des citoyens. Trois
Gardiens de la Paix qui étaient déjà admis légalement et figuraient sur
la liste définitive du 5 mars, se retrouvent encore dans la liste
additive ! C’est à se demander si ceux-ci ont eu à passer deux fois le
même concours avec succès. Ce sont : Akakpo Kokou (Mle 72), Gbohoun
Kokou M. (Mle 304) et Songuine L. Nounifou (Mle 642), tous Gardiens de
la paix. Comment les deux ministres peuvent-ils expliquer ces trois
doublons lorsqu’on se rappelle les propos du Colonel Yark qui disait que
le quotidien national n’a fait que publier la liste qui lui a été
remise, confirmant que le journal n’a pas commis d’impair ? Ou bien
figurent-ils aussi sur une « liste d’attente des doublons » ?
Qu’est-ce qui peut expliquer la publication de cette liste additive, si
ce n’est pas l’embarras que les révélations des journaux suscitent chez
les responsables ?
Pour ceux qui peuvent encore se le
rappeler, les deux ministres avaient, lors de la conférence organisée
pour tenter de justifier la forfaiture, affirmé qu’ils détenaient une
liste d’attente et parce que 247 admissibles n’avaient pas répondu
présent lors de la visite médicale, ils ont été obligés de puiser dans
cette liste d’attente pour leur faire passer cette visite. Et pourtant,
les admissibles étaient au nombre de 2588 et l’absence de 247 à la
visite n’entamait en rien l’effectif recherché qui, au final, fut de
1032. C’est ainsi que 43 faux admis ont été repêchés. Soit. Mais aussi
bizarre que cela puisse paraître, dans la nouvelle « liste additive » parue hier, sur les 64 candidats toutes catégories confondues retenus ou repêchés, « seuls deux candidats »
ne figurant pas dans les admissibles se retrouvent sur cette nouvelle
liste. Bizarre, très bizarre. Comment les deux ministres se sont-ils « arrangés » pour que les noms de la quasi-totalité des nouveaux admis soient ceux des admissibles et non ceux de la « liste d’attente »?
Seuls les esprits retors penseraient à
un acharnement de notre part. Mais il s’agit justement des résultats
d’un concours dont les admis sont censés porter l’uniforme de la Police
nationale du Togo, et à ce titre, la transparence doit être de mise.
Aujourd’hui, bien malin qui peut affirmer le nombre exact de candidats
réellement admis à ce fameux concours national de la Police au Togo, au
vu des derniers développements. Et pourtant, on rebat les oreilles des
citoyens avec la dernière trouvaille, « transparence, transparence, transparence ».
A quelle conclusion sommes-nous arrivés
avec tout ce qui se passe autour de ce fameux concours de recrutement
dans la Police nationale? Que d’abord, c’est une pratique qui ne date
pas d’hier et les premiers responsables ne s’attendaient pas à ce que le
pot-aux-roses soit découvert cette fois-ci. Ensuite, que les autorités,
confondues, ont voulu « avoir la conscience tranquille »
vis-à-vis des admissibles qui auraient réussi si les faux admis
n’avaient pas existé, en ajoutant cette liste additive ; car, de mémoire
de Togolais, c’est la première fois qu’un tel scénario de cette
envergure se produit dans la cité. Enfin, que les informations qui ont
toujours fait état de candidats que des autorités font passer lors des
concours sans qu’ils soient admis, sont avérées.
Autrement, il est tout de même curieux
que depuis l’éclatement du scandale, aucun des faux admis n’ait cherché à
sortir de l’ombre pour porter à la lumière ses vérités, bien que les
propos du ministre Yark Daméhame brandissaient la menace d’une plainte
contre le journal LIBERTE. Le silence est la réponse que les mis en
cause ont opposée à ce jour. Il est tout de même rassurant que le
Coordonnateur du Collectif « Sauvons le Togo », Me Zeus Ajavon,
ait eu la vista de demander qu’une commission d’enquête soit mise en
place pour établir la vérité. Et pourtant, le CST n’est pas un parti
représenté à l’Assemblée nationale… Si des personnalités s’estiment
incriminées dans ce dossier, loin de nous l’idée de nuire à qui que ce
soit, notre seule ambition est de faire jaillir la vérité, elle seule
capable de conférer de la crédibilité aux institutions de la République.
Abbé Faria
LIBERTE HEBDO