Togo - Pour la mise en œuvre des recommandations de la Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR), de Mgr Nicodème Barrigah, la présidente de la Plateforme citoyenne justice et vérité, Mme Kokoè Phanie WILSON-AJAVON vient de saisir par note, le président Faure Gnassingbé. Cette lettre adressée au chef de l’état intervient deux ans jour pour jour après la mise en place de la CVJR. L’objet de cette lettre demande l’Urgence de mise en œuvre des recommandations de la CVJR.
Lecture.
Lettre ouverte à son Excellence Faure Essozimna GNASSINGBE, Président de la République Togolaise
Lomé, le 03 avril 2014
A
Son Excellence, Faure GNASSINGBE, Président de la République togolaise
Lomé-TOGO
Objet : Urgence de mise en œuvre des recommandations de la CVJR
Excellence Monsieur le Président,
La Plateforme Citoyenne Justice et Vérité (PCJV) se souvient que le 03 avril 2012, soit exactement deux ans aujourd’hui, la Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR), au terme de son mandat, vous a officiellement remis son rapport, une réponse à votre volonté de trouver des voies et moyens pour réconcilier durablement les Togolais.
En effet, c’est vous, Excellence, qui aviez mis en place la CVJR afin qu’elle puisse faire la lumière sur toutes les violences qu’a connu notre le Togo de 1958 à 2005, et formuler des recommandations dont la mise en œuvre aboutira à un Togo réconcilié avec son passé et tourné résolument vers l’avenir.
Durant trois ans, la CVJR a ainsi eu la lourde charge d’écouter les victimes et présumés auteurs, de documenter les faits et rédigé un rapport dont le premier volume est à ce jour disponible et consultable par tous les citoyens.
En ce qui nous concerne, nous avons, à travers la PCJV, entrepris d’accompagner le processus dès le début des travaux de la CVJR, et vulgarisé les résultats de ses travaux à travers plusieurs activités.
Excellence Monsieur le Président de la République,
La Plateforme Citoyenne Justice et Vérité salue votre engagement et les efforts que vous consentez déjà pour mettre en œuvre les recommandations de la CVJR. En effet, déjà lors de la cérémonie de remise du rapport, vous avez reconnu la faillite de l’Etat dans son obligation de protéger ses ressortissants, et demandé pardon à toutes les victimes en ces termes : « A toutes les victimes et à tous ceux qui ont souffert de ces violences aveugles, qui leur ont causé tant de torts et de blessures, je voudrais sincèrement leur dire pardon, au nom de l’Etat togolais ».
En outre, depuis la sortie du volume 1 du Rapport de la CVJR, vous avez posé quatre catégories d’actions concrètes notamment :
· La création du Haut Commissariat à la Réconciliation et au Renforcement de l’Unité Nationale (HCRRUN) par décret en date du 24 mai 2013 ;
· L’affectation de la responsabilité de la mise en œuvre des 68 recommandations de la CVJR à un spécifique notamment celui des droits de l’Homme ;
· La prise de la recommandation n°44 de la CVJR avec l’annulation, pour le compte de l’année 2014, de la célébration de la fête du 13 janvier ;
· Le début de la prise en compte de certaines mesures de vetting par le remplacement, à la tête de certaines institutions, de personnalités présumées impliquées dans des violations de droits de l’Homme.
La PCJV tient à vous féliciter pour ces actions. Néanmoins, elle tient aussi à vous rappeler que les victimes attendent réparation et apaisement car les différents acteurs sont unanimes à dire que la vérité, un des piliers de la justice transitionnelle, n’est que partiellement connue à ce jour ; en outre, les trois autres piliers que sont la justice, la réparation et la garantie de non répétition tardent aussi à se traduire dans les faits.
C’est pourquoi, la Plateforme recommande vivement :
· la publication rapide de Livre Blanc censé traduire l’appropriation, par le gouvernement, des recommandations de la CVJR et tracer le chronogramme pour leur mise en œuvre ;
· la nomination des membres du HCRUUN et son opérationnalisation;
· la création d’un Fonds d’aide à la réconciliation afin d’octroyer aux victimes identifiées et recensées par la CVJR une juste et équitable réparation ;
· l’adoption des réformes institutionnelles et constitutionnelles par l’ensemble de la classe politique et sous votre impulsion, pour poser les bases du renouveau et de la revitalisation des institutions consensuelles de garantie de l’Etat de droit au Togo.
La PCJV partage votre conviction que l’application de ces mesures donnera une lueur d’espoir pour une vie meilleure aux citoyens togolais, contribuera à l’apaisement de cœurs des victimes et à leur libération de tout esprit de vengeance.
En effet, qu’il vous plaise, donc, Excellence Monsieur le Président, de vous remémorer vos propos lors de la remise officielle du rapport : « …j’ai la ferme conviction que le processus enclenché n’a de réelle chance d’atteindre l’objectif d’apaisement, de réconciliation et de paix que s’il s’accompagne de réformes institutionnels et sécuritaires renforçant les garanties de non répétition des violences, des atteintes aux droits de l’homme, à l’intégrité physique et à la dignité des personnes.. ».
La PCJV ne doute point de votre engagement à mettre en œuvre les recommandations, mais comme tous les Togolais, elle espère vivement que les dires se traduisent rapidement dans les faits, afin de décrisper le climat sociopolitique au Togo, pour l’instauration d’une paix durable dans une société démocratique et prospère.
Nous vous remercions