Le spectacle de l’impossible évaluation des politiques publiques « Non seulement, nous n’avons pas de principes qui mènent au vrai, nous avons d’autres qui s’accommodent bien avec le faux », disait FONTENELLE dans Histoire des oracles. Dans un pays qui vit sous la fièvre de l’opacité, du mensonge permanent, des falsifications, de la d...élinquance économique où foisonne la surfacturation reconnue par le chef de l’Etat qui offre l’asile aux brigands, un relevé de principes corrompus de gouvernance est saillant et aboutit à un robinet d’absurdités, une accumulation de fautes morales, politiques, éthiques qui entretient la normalité d’une criminalité économique avec des postiches d’institution, quelle valeur peut-on accorder à une structure d’évaluation des politiques publiques ?
Si l’anormalité fonctionnelle est la base de la gouvernance au Togo, tous les enjoliveurs institutionnels, structurels sont d’une comédie spectaculaire qui n’échappe guère à la conscience populaire. Cette conscience nationale réprouve le mode de conduite des affaires d’Etat. Elle se manifeste du Nord au Sud, de l’est à l’ouest de façon effervescente contre la dynastie GNASSINGBE, contre ses artifices, ses subterfuges, ses transgressions et abominations, ses fausses promesses, ses violations des Droits humains, sa conception fétide du pouvoir … La lourde abstention égale à la moitié de l’électorat lors des législatives du 25 Juillet 2013 témoigne éloquemment d’un désaveu populaire d’une parodie de gouvernance qui trouve ses fondements dans l’escroquerie de tous genres, dans le faux habillé en théâtre de réussite et dans la faiblesse de la force brutale.
Selon les mots de Kako Nubukpo : « Le processus de la politique nationale d’évaluation au Togo ne peut réussir que s’il est éminemment participatif ». Comment un pouvoir impopulaire dont on connaît le mode d’acquisition d’une majorité factice sous la base d’un découpage inique, sa capacité d’achat de consciences, ses fraudes, ses effractions électorales et son rejet citoyen peut-il encore espérer un accompagnement de la population ? Tous les pouvoirs qui traitent avec mépris les peuples qui violent leurs choix et droits sont dans l’impossibilité de solliciter leur notoriété pour se faire valoir.
Dans la tradition de la brutalité des pouvoirs autocratiques, le banditisme étatique s’installe, des crimes de masses et des crimes économiques tiennent en survie leurs acteurs et la réplique populaire est inévitable à travers le boycott, la résistance citoyenne, la non-coopération, le sabotage parce que la crise de confiance entre le sommet et la base est tenace. L’intérêt citoyen pour les politiques publiques se forge dans la conscience nationale à partir d’un socle de construction participative : la confiance. La culture de proximité des institutions de la République est inexistante au Togo. La preuve en est que la décentralisation est une chimère. Les élections locales sont redoutées par le pouvoir. Il préfère une autorité verticale de nomination des gestionnaires des collectivités locales qui, pour la plupart, sont en conflits ouverts ou larvés avec les populations. Dans ses conditions de terrorisme étatique, il est un leurre de croire à une quelconque participation des togolais, comme par enchantement, à une assistance républicaine de soutien à l’évaluation des politiques publiques.
Les togolais ont acquis une grande expérience politique. Ils connaissent parfaitement ce régime RPT/ UNIR ainsi que les gens qui l’animent. Les valeurs et la vertu n’habitent jamais ceux qui vivent du faux et de la roublardise, de la brutalité. Ils ont éloigné le peuple d’eux-mêmes.
L’exaspération populaire de la tragédie de gouvernance dans notre pays n’a-t-elle pas conduit des collectivités de l’Est et de l’Ouest à hisser des drapeaux des pays voisins sur le territoire de leurs régions ?
Comment Kako NUBUKPO va-t-il procéder pour intégrer à l’évaluation des politiques publiques des gens qui ne se sentent nullement concernés par l’action du gouvernement ?
Kako NUBUKPO n’est-il pas un pantin du pouvoir dans une tâche irréalisable pour dorer une illusion de participation citoyenne aux politiques publiques ?
1) Les éléments objectifs d’une bouffonnerie d’évaluation
La collectivité nationale peut seulement formuler un intérêt à la chose publique que si la gouvernance obéit à des règles de clarté, de justice sociale, de respect du peuple, des droits humains. Quand la délinquance judiciaire et les falsifications des rapports, les transgressions des procédures nous font payer des fortunes, quand les instances de régulation de la vie publique sont en faillite, quand nos institutions ne sont transparentes que par des écriteaux/chichement indicatifs, la révolte est au cœur de la citoyenneté, les lacérations de honte tenaillent les citoyens. Ils sont en situation de conflit avec le pouvoir. L’accompagnement des œuvres d’intérêt public est trop timide voire inexistant.
L’incivisme d’Etat a une interférence immense sur l’éthique citoyenne. Si le chef de l’Etat en personne reconnaît pratiquement la surfacturation et se livrent à l’enrichissement illicite en privant le peuple de ses ressources sans s’engager à sévir, l’onction aux détournements des deniers publics est une certification du désintérêt qu’il porte à la protection des citoyens, à leur bien-être. La gouvernance ne dispose plus d’aucune force de persuasion pour motiver les populations à l’accompagner dans ces choix politiques, dans ses œuvres.
Nos sociétés d’Etat sont, au gré des malversations débaptisées et rebaptisées sans audit. L’OTP, onze (11) années durant n’a pas un morceau de papier comptable. La SOTOCO se renouvelle en opacité sans un compte à la nation. La SAFER est toujours dans la caverne d’Ali Baba et ses quarante voleurs. Depuis plus de dix (10) ans, les communes d’installation du paysage sur nos routes ne savent pas le montant des recettes journalières, mensuelles, ni le pourcentage à rétrocéder aux collectivités locales, aux communes. Après plus de dix (10) années d’exploitation des centres de paysage du réseau routier, on livre quelques tables-bancs à certaines communes qui trop se plaignent. Cette moquerie administrative est si révoltante que le rejet de l’autorité n’est d’aucun doute chez les citoyens. La rage populaire contre la gouvernance conjuguée avec un dépit féroce ne servent guère à préparer l’esprit de la masse et à mettre en condition de soutien à l’évaluation des politiques publiques.
Le monologue de Kako NUBUKPO, dans une aventure solitaire, est clair. Dans notre pays, les administrateurs sont des commerçants assistés par une cour des comptes intelligemment accompagnatrice d’un réseau de libertins de la République. Ce paradoxe étonnant meuble toutes les formes de criminalité. L’homme de la Prospective et de l’Evaluation patauge dans un bourbier et peut encore bavarder, crier dans le désert des certitudes. Nous, peuple togolais, nous sommes très loin de la gesticulation et des mort-nés de nos institutions postiches
Le brouillard de la gouvernance, les malversations étayées par des primes d’excellence et des grades de promotion sont si courants que la fracture entre les jouisseurs du pouvoir et la masse populaire est béante. Elle n’est pas du tout disposée à prêter une quelconque attention à une sollicitation de suivi des politiques publiques. Si le pouvoir manifeste réellement un regain d’intérêt à l’endroit de nos populations pour l’instruire à l’évaluation des politiques publiques, la première étape de sa démarche, c’est d’organiser les élections locales, les préfectorales et les communales. Ce n’est pas dans un ministère ou à la présidence que s’organise l’intérêt des populations aux œuvres publiques. Si l’occasion ne s’offre pas aux collectivités locales de se responsabiliser, de faire des choix de leur propre épanouissement, de répondre aux besoins collectifs de leur milieu, de leur environnement, comment la population peut-elle être disposées à accorder son appui à des actions de ceux qui la méprise?
L’émergence économique, la croissance accélérée, la prospection et l’évaluation des politiques publiques demeurent des évasions contemplatives dans une monarchie rudimentaire et narcissique qui s’applaudit aux petites choses et qui est superposé à tout un peuple qui n’a de défense que le rejet implacable et massif. Toutes les fraudes réussites de gouvernance sont portées par les peuples. Donnez-leur le pouvoir, ils nous le rendront. S’ils en sont privés, les tâtonnements des gouvernants créent des structures inopérantes.
Les hommes d’esprit qui ne sont pas prétentieux ne jouent jamais aux ignorants. Quand ils se vendent aux sots, ils les transforment en des pantins. Marcel PROUST leur adresse un conseil dans Pastiches et mélanges : « Quand on travaille pour plaire aux autres ,on ne peut pas réussir, mais les choses qu’on a faites pour se contenter ont toujours chance d’intéresser quelqu’un ».
2)Les conditions d’une évaluation
Une théorie n’est utile que par les moyens dont on dispose pour la rendre applicable. C’est ce que KANT appelle les « conditions de possibilité » de la réalisation d’un objectif.
La faute est plus dans les moyens que dans les principes eux-mêmes. Une puissance de représentation d’un but n’a une valeur de fascination. Mais, elle n’est pas une puissance d’action. Ce qui est à priori demeure dans l’imagination. Quand le cadre d’expérimentation souffre du dispositif essentiel à la matérialisation particulière de ce que la raison a tôt fait de concevoir, alors la pensée se limite au stade de l’illusion. A quoi sert de compter sur une population qui rechigne à admettre l’autorité, qui lui tourne le dos, qui la frappe d’indifférence, qui est en conflit avec le système de gouvernance qui s’abstient de respecter ses aspirations, ses choix ?
Les citoyens obéissent à ceux qui ont de la considération pour eux ou qui tiennent compte de leur volonté libre. La duperie et le parjure les irritent, les contraignent à l’incivisme, à la désobéissance, à la non-coopération, à un devoir de révolte. Notre pays n’a pas encore retrouvé le sentier de la concorde nationale pour prédisposer le peuple à accorder sa confiance et une collaboration à des dirigeants d’une rare insouciance et qui sont résolus à commettre tous les sacrilèges, tous les crimes d’Etat pour garder le pouvoir par-devers eux. La volonté de puissance d’un homme est au faîte de la terreur qui guillotine la concorde nationale dont les fondements logiques sont dans notre traité politique républicain, l’APG. Comment un gouvernement antirépublicain peut-il remorquer une assistance participative et significative dans une évaluation des politiques publiques ? Comme l’écrit PROUDHON dans Qu’est-ce que la priorité ?: « Le gouvernement de l’homme par l’homme, sous quelque nom qu’il se désigne, est l’oppression »
La mort de SINANDARE, de SINANLENGUE, d’Etienne YAKANOU et toutes les formes de culpabilité décrétées pour punir les contrariétés suffisent à nous prouver que nous sommes sous l’oppression. Le peuple est témoin des manœuvres sordides dont use le pouvoir pour escamoter la substance du traité politique républicain. Un peuple martyrisé, violé, violenté jamais ne perd conscience. Il ne célèbre pas ses bourreaux ni ne se joins à eux dans un projet sans avoir soldé le passif et l’actif, c’est-à-dire le contentieux qui l’oppose à des tortionnaires. Le dépérissement de l’autorité de l’Etat est certain. Face à ce régime, on assiste à un dédain militant des citoyens togolais parce qu’ils ont de la peine à tolérer le mensonge permanent, les coups de force, les déguisements du pouvoir.
Les gouvernants ont fini par placer les togolais dans la cité des blâmes parce que ceux qui prétendent régenter la république sont toujours hors de leur rôle, du statut dans des immondices pestilentielles et détestables. Ce que les populations attendent du pouvoir, c’est précisément l’observation des conditions de la concorde nationale contenue dans les recommandations de la CVJR, dans l’APG et non une digression malheureuse d’évaluation des politiques publiques.
Combien de fois la conférence des Evêques du Togo est-elle sortie pour prier le gouvernement d’exécuter le consensus national pour refaire les fondements de la République et faire revenir la confiance entre le sommet et la base sans que le « Club du petit » ne daigne prêter attention à ce rappel de fidélité à l’engagement républicain ? Les pasteurs évangélistes et la société civile se mêlent avec insistance à ce rappel ainsi que les partis politiques en vain. La délinquance institutionnelle compromet toutes les possibilités d’évaluation des politiques publiques. C’est une honte national que le Tribunal communautaire d’Abuja écrive, noir sur blanc, dans l’arrêt de l’affaire des neuf (9) députés ANC que « la cour constitutionnelle du Togo a ignoré le droit ». L’Etat togolais perd tous les procès qui passent par Abuja dont notamment, le contentieux ANC, le procès Kpatcha GNASSINGBE, l’affaire AGBA Bertin. Jusqu’à ce jour, quelles sont les activités publiques que le peuple connaît de la cour des comptes ? L’autorité de régulation des marchés publics, la direction des examens et concours sont régulièrement indexées par la presse nationale et internationale, plus particulièrement, par « La lettre du continent » parce qu’elles se vautrent dans le flou…
Partout ce pouvoir se nourrit du vide. Ce tohu-bohu d’évaluation des politiques publiques est un greffon du néant en ce que l’évaluation n’est possible que dans la cogestion des actions du gouvernement : collectivités locales et pouvoir. Ce peuple est mûr en expérience. Il connaît parfaitement les vétilles auxquelles s’agrippent la dynastie GNASSINGBE et ses girouettes pour le détourner des vraies aspirations qui sont les siennes. L’accompagnement populaire de la gouvernance a pour socle la concorde nationale. Il faut d’abord la restaurer pour l’ensuite envisager, à partir de la confiance retrouvée, l’évaluation des politiques publiques.