Le gouvernement Togolais se lance dans une ambitieuse démarche de prospective. Concevoir la vision du pays à l’horizon 2030, où les autorités pensent que le Togo sera un pays émergent. Effet de mode ou réelle ambition de politique publique et économique?
C’est devenu un effet de mode en Afrique. Presque chaque pays (surtout les francophones) se voit émergent à moyen terme. Même si la chose parait légitime, il y a lieu de voir dans quelle mesure les conditions économiques, politiques et sociales en place dans ces pays pourraient créer les conditions d’une émergence, considérée comme une phase irréversible du développement.
Au Togo, le timing de l’opération, la communication organisée autour, les acteurs et les moyens techniques mis en œuvre par l’exécutif ne semblent pas fournir tous les gages d’une approche de planification crédible. A la veille de la présidentielle de 2015, cela ressemble plutôt à une propagande, destinée à galvaniser les troupes, dessiner le cadre d’un programme politique qui permettrait de mieux bazarder l’offre de l’UNIR aux Togolais.
Il y a plusieurs chantiers sur lesquels le gouvernement Ahoomey-Zunu faute gravement et qui ne permettent pas d’entrevoir avec le système en place, un processus de développement et de croissance économique soutenu sur les 15 prochaines années.
Le premier chantier est celui de la décentralisation et du développement local. La politisation à outrance de ce processus lui a ôté toute crédibilité. Les pouvoirs restent entièrement centralisés à Lomé avec un système de décision assez opaque qui ne libère pas les énergies en termes de créativité et d’initiative entrepreneuriales.
Le deuxième chantier en panne concerne l’industrialisation qui reste engluée dans les rêveries de la ‘’zone franche’’ mise en place par le général Eyadèma et son équipe au début des années 90.
Le troisième se rapporte à la gestion hasardeuse des forces de la diaspora. Toutes les initiatives jusqu’ici pour intéresser nos compatriotes de l’étranger au développement du pays sont mal ficelées. La grande majorité de la diaspora n’a aucune confiance aux dirigeants et ces derniers ne font rien pour les rassurer.
On peut énumérer beaucoup d’autres domaines où la gouvernance dans ses méthodes et ses outils ne permet pas d’espérer un rapide changement sur une base durable. Le nœud du problème reste politique. Il s’agit d’inscrire définitivement le Togo sur la voie d’une démocratie axée sur des institutions solides et viables. Or, les prochaines élections à elles seules constituent une source de menaces réelles sur le pays. Il est dès lors impérieux, avant d’entamer cette démarche prospective de veiller aux conditions de base, renforcer la confiance dans le pays et édifier des institutions qui transcendent les hommes et le temps.
K. Agboglati