Alors que l'Elysée accueille samedi un sommet consacré au Nigeria, L'Express fait le point sur ce que Paris compte proposer à Abuja pour lutter contre la secte islamiste et libérer les lycéennes.
Alors que l'Elysée accueille samedi un sommet consacré au Nigeria, L'Express fait le point sur ce que Paris compte proposer à Abuja pour lutter contre la secte islamiste et libérer les lycéennes.
Avec une opinion désormais remontée contre le rapt des lycéennes nigérianes par Boko Haram, la France ne peut rester en retrait de ce qui apparaît comme un nouveau front anti-terroriste international en Afrique. A l'initiative de François Hollande, un sommet régional doit se tenir samedi à Paris pour aider le Nigeria et ses voisins à faire face au défi posé par la secte islamiste. Mais concrètement, qu'est-ce que la France peut apporter comme aide à Abuja?
Des forces françaises engagées dans des opérations sur place?
Les autorités françaises, jointes par L'Express, ne préfèrent pas entrer dans le détail "pour ne pas aider l'ennemi".
"L'objectif principal est la formation et l'échanges d'informations", indique-t-on de source diplomatique. D'ores et déjà, une "équipe spécialisée", selon les termes de Laurent Fabius - vraisemblablement issue de la DGSE - s'est déjà rendue sur place pour épauler les autorités nigérianes. Et surtout conseiller les forces spéciales nigérianes, habituées, s'inquiètent plusieurs experts, aux "massacres". Pour le général Vincent Desportes, professeur de stratégie à Sciences-Po Paris et HEC et ancien dirigeant de l'Ecole de guerre, il n'est pas exclu que des forces spéciales françaises, prépositionnées au Burkina Faso, puissent même participer à certaines opérations de "destruction" de noeuds de communication ou d'infrastructures utilisées par Boko Haram, "mais pas de récupération" d'otages. Une action trop risquée vis-à-vis de l'opinion publique occidentale.
Contrairement au Mali, l'armée nigériane, entraînée, est l'une des armées solides d'Afrique. Nul besoin donc de constituer des missions de formation de ses unités, comme la France le fait, sous mandat européen, au Mali. ù
L'arme du renseignement
Autre domaine dans lequel Paris est attendu: le renseignement. La France dispose de deux drones Reaper flambant neufs à Niamey (Niger), mais aussi des Rafale, des Mirage et des avions de renseignement Atlantique-2 dans plusieurs capitales de la région: N'Djamena (Tchad), Niamey et bien sûr Djibouti. Lundi, les Etats-Unis ont annoncé que des avions espions américains survolaient déjà le Nord du Nigeria. La France fera-t-elle de même? "Toutes les options sont sur la table, nous verrons ce qui nous est demandé par les autorités nigérianes", répond le quai d'Orsay qui précise que la France mettra à disposition d'Abuja du "matériel d'interception des communications et de cybersécurité".
"Entre nos satellites, nos drones, nos avions, combinés aux moyens britanniques et américains, on peut avoir une idée précise de ce qui se passe au Nord du Nigeria, souligne le général Desportes. Mais le problème, c'est que nos moyens de renseignement sont déjà limités. On ne va donc pas pouvoir tout faire au moment même où le budget de la Défense, déjà restreint, va encore être réduit." Lors de l'offensive au Mali, l'armée française avait en effet dû s'appuyer sur un soutien américain en matière de renseignement. Depuis, la France s'est engagée également en Centrafrique.
En matière de renseignement humain, la France devrait s'avérer moins incontournable dans un pays anglophone qui n'est pas l'une de ses anciennes zones d'influence. "Pour libérer la famille Moulin-Fournier et le prêtre Georges Vandenbeusch, les Français ont eu besoin des Nigérians, des Camerounais et, selon mes informations, des Britanniques", note l'expert militaire Pierre Servent.
Quelles que soient les limites de l'aide française, Paris voit déjà l'intérêt du sommet de samedi. "Nous avons assuré le leadership au moment de la crise malienne. Pour l'ensemble des Etats africains, la France est le partenaire naturel dans la lutte contre le terrorisme", souligne le quai d'Orsay qui se réjouit de la "coopération plus dynamique que par le passé" entre l'Hexagone et le Nigeria. La première puissance économique d'Afrique.