Pasteur Edoh Komi : « Depuis que le ministre Dammipi a pris l’intérim du ministère des Mines, il n’a daigné répondre à aucun de nos courriers sur le dossier de Momé Hagou »
Afreepress : Bonjour Pasteur Edoh, parlez-nous de l’affaire Momé-Hagou contre la CEB et l’État togolais. Que se passe-t-il réellement dans ce village ?
Pasteur Edoh Komi : Bonjour Afreepress, c’est avec indignation et amertume que je vous parle encore de cette affaire de Momé Hagou qui aurait pu trouver une solution depuis longtemps si ceux qui nous gouvernent étaient réellement soucieux et préoccupés du bien-être des populations.
Le village de Momé-Hagou abrite une station de la CEB et cela il y a plus d’une quarantaine d’années, mais n’a bénéficié d’aucune réalisation de cet organisme. Pire, les propriétaires terriens spoliés de plusieurs hectares de leurs terres pour la construction du site ne sont jusqu’à présent pas indemnisés. À cela s’ajoute le manque d’électrification du village, ce qui a priori ne devrait pas poser de problèmes car c’est à partir de ce village que la fourniture de l'électricité parvient aux autres.
Pour nous, c’est de l’injustice et il faut la combattre par tous les moyens légaux. C’est dans cette optique que nous avons répondu favorablement à la sollicitude des populations de Momé-Hagou à manifester.
Afreepress : Pourquoi le MMLK s’est-il rallié à ce combat ?
Pasteur Edoh Komi : Il n’est de secret aujourd’hui pour personne que le Mouvement Martin Luther King la Voix des Sans Voix est assez sollicité par les citoyens qui sont confrontés à des problèmes et à l’injustice et qui peinent à les exposer.
Les droits de milliers de Togolais sont violés et foulés au pied. Les populations de Momé-Hagou n’ont pas échappé à cette triste réalité. C’est depuis novembre 2012 que le Comité villageois de Développement de Momé -Hagou à travers son président, a contacté le MMLK après des années de démarches stériles et infructueuses auprès des responsables de la CEB pour l’électrification du milieu et les dédommagements à verser aux propriétaires terriens.
Devant un cas si criard d’injustice, nous n’avons pas hésité à répondre présent. Nous avons vu leurs souffrances et nous avons décidé de souffrir avec elles. C’est ainsi que nous avons lancé un sit-in de 3 jours pour les 20, 21 et 22 décembre 2012 sur le site de la CEB en vue de protester contre les traitements qui sont faits aux villageois.
Cet appel à la manifestation a eu un écho favorable et a poussé les autorités de la CEB avec le ministère des Mines à des négociations avec le Mouvement Martin Luther KING et les populations de Momé-Hagou.
La rencontre a eu lieu le 17 décembre 2012 au Siège de la CEB à Lomé. Avaient pris part à cette rencontre la direction générale de la CEB, le ministère des Mines, les responsables de la CEET, une délégation des populations de Momé-Hagou, le MMLK, le préfet de Vo, le régent du canton de Momé, le député APEKEY et les ressortissants de Momé-Hagou à Lomé.
Au terme de ces échanges, un accord a été trouvé pour l’électrification du village au cours de l’année 2013, le dédommagement des propriétaires et l’exécution des travaux de désherbage de l’espace haute tension par les populations et l’emploi des jeunes de la localité dans la société.
Afreepress : Pourquoi avoir décidé d’occuper le poste de transformation de Momé-Hagou alors que selon le ministre des Mines, ce village est pris en compte dans un programme d’électrification ?
Pasteur Edoh Komi : Nous avons décidé de concert avec les populations de Momé-Hagou d’occuper le poste de transformation parce que les autorités de la CEB et le gouvernement ont choisi le mutisme, l’indifférence et la duperie depuis le 17 décembre 2012. Imaginez que depuis que le ministre Dammipi a pris l’intérim du ministère des Mines, il n’a daigné répondre à aucun de nos courriers sur le dossier de Momé Hagou et c’est la même attitude que tous les ministres ont adoptée sans exception.
Au niveau de la CEB, il nous a été demandé de nous rapprocher de la CEET pour avoir un devis pour l’électrification du village. Ce qui a été fait depuis le mois de juin et qui est dans l’ordre de 34 millions de francs CFA et copie a été remis à la CEB.
Nous sommes inquiets parce que l’année 2013 tire à sa fin et rien n’est fait jusqu’à maintenant et connaissant bien notre régime pour ses innombrables promesses non tenues, nous ne pouvons pas dormir sur nos lauriers.
C’est ce qui a justifié cette massive mobilisation des populations de Momé-Hagou ce 4 septembre qui ont fait le chemin depuis le village jusqu’au poste de la CEB situé à 2 km pour exprimer leurs raz-le-bol et leur déception à l’égard des décideurs.
Les personnes âgées ont également manifesté non pas pour elles-mêmes, mais pour leurs fils et petits fils à qui l’électricité sera d’une grande utilité. Demandez au ministre Dammipi s’il nous a une fois dit que le village de Momé-Hagou était dans un programme d’électrification comme il le prétend aujourd’hui. Au Togo, le ridicule et le mensonge sont érigés en règle de gouvernement. C’est dommage et déplorable !
La manifestation a sa raison d’être parce que les voies de dialogues ont été épuisées depuis longtemps et il ne nous reste plus que l’unique arme de la rue pour se faire entendre.
Heureusement que les dirigeants ont entendu raison et nous ont demandé d’arrêter le sit-in pour revenir au dialogue. La détermination des populations était hors normes et cela était visible sur tous les visages. On peut tromper une personne une fois, deux fois, mais pas toutes les fois…
Afreepress : Quelle a été l’issue des discussions
Pasteur Edoh Komi : Les discussions ont été facilitées avec l’arrivée du préfet de Vo sur le site accompagné de deux officiers de l’armée. Il n’a été question d’autre chose que l’électrification du village, donc cela ne pouvait plus engager de grandes discussions.
Le préfet venu au nom du gouvernement mérite du respect et c’est d’ailleurs ce qui a beaucoup joué et a permis une issue favorable.
Ce qui nous réjouit c’est que le dossier d’électrification de Momé-Hagou n’est plus dans les tiroirs et le préfet en est conscient. Les choses doivent bouger dans les semaines à venir et nous avons demandé aux populations de nous faire confiance en accordant le bénéfice du doute aux autorités.
L’engagement du préfet et la confiance placée en nous ont permis de calmer les populations et de les faire replier alors qu’elles voulaient rester sur les lieux jusqu’à l’obtention de satisfaction.
La situation va s’empirer si rien n’est fait dans les jours à venir et les populations promettent de venir habiter sur le site. Pour empêcher cette éventualité, le chef du poste a l’impérieux devoir de rendre compte à ses chefs hiérarchiques
Afreepress : N’avez-vous pas peur pour votre sécurité et votre liberté lorsqu’on vous voit dans tous les dossiers brulants ?
Patseur Edoh Komi : Écoutez, celui qui cherche le bonheur et l’intérêt des autres ne doit pas avoir peur. Notre engagement est pour la cause des opprimés, des pauvres et des victimes d’injustice. Nous n’avons donc rien à craindre, car Dieu permet aux ennemis de nous faire la guerre, mais ils ne nous vaincront jamais.
Nous savons que nos actions dérangent les gens mal intentionnés et ils ne cessent de nous persécuter et de nous mettre les bâtons dans les roues. Il serait mieux pour eux de se mettre dans la voie de la justice que de demeurer dans cette voie de perdition. Nous n’avons rien contre qui que ce soit, mais nous combattons l’injustice sous toutes ses formes.
Même si les droits de ceux qui sont en position de force aujourd’hui étaient violés, la Voix des Sans Voix sera à leurs côtés pour les défendre. Donc nous sommes là pour tout le monde sans exception.
À l’image du Seigneur Jésus Christ et du pasteur Martin Luther KING, nous avons choisi de servir la cause des autres et nous ne nous résignerons jamais. Tant que nous serons en vie, nous répondrons partout où nous sommes sollicités, car notre engagement est noble et c’est la voie des âmes bien nées. Avec ou sans pasteur Edoh, le
Mouvement Martin Luther KING poursuivra son combat pour un monde juste et équitable.