Togo - « L’internet a révolutionné le monde », dit-on. Même si tous les jeunes intellectuels sur le continent africain s’y accrochent pour s’informer et se former et se divertir, l’internet n’est pas pour autant libre d’accès partout. Et ceux qui y ont accès peuvent aussi être censurés par les Etats mis en difficulté par les publications ou encore les gouvernants anti démocrates. Internet Sans frontière est une association de défense des intérêts des amoureux de l’internet mais aussi de promotion de l’accès à l’internet. cette association basée en France travaille un peu partout dans le monde. Son président Archippe Yepmou nous parle aujourd’hui de leurs activités.
pa-lunion.com : Archippe Yepmou, bonjour !
Archippe Yepmou : Bonjour !
pa-lunion.com : Vous êtes le Président de « Internet sans frontières » basé à Paris, de nationalité camérounaise. Internet Sans Frontières, en fait c’est quoi ?
Archippe Yepmou : Alors pourquoi nous avons choisi ce nom ? C’est parce que lors de notre création il y a six ans aujourd’hui, il nous apparaissait que finalement Internet était un moyen d’abattre les frontières politiques et géographiques. Ce nom vient essentiellement de là. Il fallait dire que finalement « Internet » est le média majeur d’abaissement des frontières entre les frontières géopolitiques et aussi les frontières entre les hommes.
Et deuxièmement, que la circulation de l’information ne doit pas souffrir de frontière. Quelque part on a là, un outil formidable d’avancement des progrès, mais qui peut aussi devenir un frein à ce progrès, dans l’hypothèse où on met des frontières à la circulation de l’information. Les frontières aujourd’hui sont d’ordre territorial à l’idée des Etats qui veulent de plus en plus contrôler ce qui se passe sur Internet, sur leurs territoires et sur leurs réseaux locaux territoriaux. A Internet Sans Frontière, on n’est pas contre les frontières politiques. Par contre, on est pour qu’il y ait une plus grande liberté de circulation de l’information. Pour parler de l’Afrique, le nouveau moyen de communication est l’Internet, le mobile, parce que là, il y a la révolution technologique. C’est déjà le moyen qui permet la circulation de l’information et du savoir, et des relations entre les africains. Jusqu’à ce jour, il y a très peu de routes physiques. Par exemple si vous regardez en Afrique Centrale et en Afrique de l’Ouest, il n’y a pas d’autoroutes entre les pays. En Afrique de l’Ouest, c’est un peu différents, mais les gens voyagent très peu entre les région en Afrique. Mais aujourd’hui, avec l’internet, les populations voyagent. Ils savent ce qui se passe partout dans le monde. Si vous êtes ivoirien, si vous êtes togolais, vous savez ce qui se passe au Cameroun sans y être comme cela peut être le cas ailleurs.
pa-lunion.com : Il n’est pas moins vrai que la difficulté en Afrique demeure que, l’accès à l’Internet est toujours difficile. Que faites-vous pour permettre à nos populations africaines d’avoir accès à l’Internet ?
Archippe Yepmou : Alors, on analyse parfois et on propose des approches de solution par lobbying. Dans le cas du Cameroun récemment, on a fait l’état du réseau. On voit qu’il y a dans ce pays une infrastructure qui permettrait d’avoir une connexion aussi rapide, et aussi moins chère que dans les pays européens par exemple. Mais, on se rend compte que pour une raison liée à la gouvernance, à la corruption, à peut être aussi à l’ignorance de certain, la connexion y coûte très chère, et on pense que c’est l’état de l’infrastructure qui est la cause. Non. Regardez ! En Afrique Sub-saharienne, tous les ans à peu près, le nombre de personnes connectées à internet double. On estime qu’en 2015, 50% des populations seront connectés à Internet, essentiellement via mobile. C’est vraiment une grande révolution. Donc sur l’accès, nous on produit essentiellement des rapports. On fait aussi du lobbying pour que les Etats qui sont liés par des conventions internationales sur l’accessibilité et sur la démocratisation de l’accès aux moyens de la télécommunication, respectent ces conventions. Par exemple quand un Etat a des infrastructures adéquats et que la connexion continue à coûter très chère, il y a une inégalité par rapport aux conventions de l’accès qui est signé avec l’ITU, qui est l’organisation internationale des télécommunications. Nous, ce que nous faisons, c’est d’alerter cette organisation sur les droits de l’homme, parce que le droit économique, le droit à l’information sont des aussi des droits de l’homme, ce que beaucoup de gens ignorent parfois. Alors on pourra tirer sur la sonnette d’alarme en disant tel état X ne respecte pas un droit de l’Homme qui est un droit d’accès.
pa-lunion.com : Quelle est la situation de mon pays le Togo ?
Archippe Yepmou : Elle est contrastée. Je n’ai pas de chiffres sur le Togo, mais ce qui est très certain, c’est que, le Togo est un des pays où il y a une explosion des pratiques de blogging, de la décision de contenus sur les réseaux sociaux, bref une explosion de communication sur les réseaux sociaux. Il y a vraiment une révolution de la parole électronique au Togo. Donc, c’est un pays où finalement la blogosphère et les journalistes en ligne ont réussi à trouver leur marche. Je me rappelle d’une histoire il y a un an et demie, un colonel français avait été filmé par un journaliste. On pouvait voir le Colonel donnert un ordre à un officier de police de tabasser un journaliste. Et cela a fait le tour du monde. Le Colonel français en question a été rappelé à Paris, il a eu même une brimade publique, ce qui est grave. Alors, s’il n’y avait pas internet, quelque chose comme cela ne pourrait pas être possible. A chaque fois qu’il y a une manifestation au Togo, on voit très bien que systématiquement c’est filmé, les abus sont filmés. Je ne connais rien au gouvernement, mais il y a un impact. Donc les autorités font ou feront, par peur d’être mis à la face du monde, tabasser de moins en moins les manifestants et les journalistes. Donc, de ce point de vue, le Togo, c’est un bon exemple pour moi, parce que, c’est un pays dans lequel les activistes en ligne, les journalistes en ligne peuvent utiliser l’internet pour se défendre, et parler de ce qui se passe chez eux.
pa-lunion.com : Est-ce que Internet sans Frontière a des assises au Togo ou a des projets pour le Togo ?
Archippe Yepmou : On a notre correspondant Maxime Domégni avec lequel on a travaillé, on travaille toujours sur certains projets de veille électoral par exemple pendant les élections. On a mis en place avec lui, une instance OUCHAIDI pour que les togolais puissent témoigner de ce qui s’est passé pendant les élections législatives du 25 juillet 2013. Ils avait pu même si la plate forme a été censurée, témoigner de ce qui est arrivé en bien ou en mal. Evidement, on essaye de connaitre un peu mieux tous les journalistes togolais, des bloggeurs, je crois qu’on a plus à apprendre de vous, que vous nous apportez au fait. Je suis un grand passionné de ça.