Agbéyomé Kodjo : "le CST ne peut être détourné au profit d’une ambition hégémonique dans le mépris des autres composantes en son sein et sans leur consentement"
Le Collectif "Sauvons le Togo" (CST) - un regroupement e partis d’opposition et d’Associations et Ongs de défense des droits de l’Homme - traverse ces dernières une période très difficile, situation liée aux dernières élections législatives du 25 juillet. Que se passe-t-il réellement au sein de regroupement ? Est-ce une guerre de leadership ? Qui domine qui ? etc… autant de questions posées à Kodjo Agbéyomé (actuellement en France), le président de l’Organisation pour Bâtir dans l’Union un Togo Solidaire (OBUTS), dans une interview exclusive à l’Agence Savoir News. Rappelons que le parti OBUTS est membre du CST.
Savoir News : Comment se porte le parti OBUTS au lendemain des élections législatives du 25 juillet dernier ?
Agbéyomé Kodjo : La formation politique OBUTS est un groupement d’hommes et de femmes, citoyens togolais, qui partagent les mêmes idées sur l’organisation et la gestion de la société et qui cherchent à les faire triompher en accédant au pouvoir. La formation politique OBUTS a apporté la démonstration de son implantation sur l’ensemble du territoire national, ainsi qu’en a témoigné la vitalité de sa dernière convention nationale tenue à Lomé au siège du parti les 06 et 07 septembre 2013.
Ce fut le lieu pour les militantes et les militants de la formation politique OBUTS de manifester en toute clarté leur détermination à poursuivre avec pugnacité et résolution le combat au sein du collectif-Sauvons-Le-Togo, pour la délivrance du Togo.
Les militantes et les militants de la formation politique OBUTS (OBUTS étant membre fondateur du Collectif Sauvons-le-Togo) ont par ailleurs fait valoir le droit au respect mutuel auquel peuvent légitimement prétendre chacune des sensibilités politiques représentées au sein de notre regroupement de formations politiques de l’opposition
Q : L’OBUTS est membre du CST qui a engrangé 19 députés. Votre parti n’a rien obtenu. Vous avez d’ailleurs dénoncé certaines choses ces derniers jours. En plus, avez exigé la démission de certains députés CST au profit du professeur Wolou Komi et de Gérard Adja.
R : En effet, à l’issue de la proclamation des résultats provisoires par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) ; résultats définitivement entérinés par la Cour Constitutionnelle, il nous est dit que le CST aurait obtenu l’élection de dix-neuf (19) députés. Or, de graves irrégularités ayant manifestement entaché la sincérité du scrutin et affecté la validité du résultat d’ensemble du scrutin, ils (les résultats) sont de nature à ôter tout crédit et tout sérieux à la portion congrue de députés que le pouvoir en place a consenti à servir au CST.
S’agissant de la préconisation d’une dynamique unitaire au sein du CST, l’idée qui a sous-tendu les investitures des candidats du CST pour ce scrutin législatif fut la suivante : chaque siège gagné, l’est au profit du CST. C’est autour de ce vecteur que tous les sacrifices ont été acceptés et consentis.
Ce n’était pas la recherche d’intérêts partisans, qui fut le moteur des efforts déployés par nous tous, mais plutôt le triomphe du CST, en vue de l’alternance et du changement.
Il se trouve qu’au nombre des partis politiques membres du CST ayant pris part au scrutin du 25 juillet 2013, le PSR et OBUTS, furent privés dans des conditions sujettes à caution, de députés aux couleurs de leur formation politique à la représentation nationale. Nous avons à plusieurs reprises au sein de nos plénières du CST, estimé, à juste titre que ce serait justice que tous les membres ayant pris part au scrutin sous la bannière du CST puisse chacun, avoir au moins un député à l’Assemblée nationale. Des arguments qui justifient cette requête existent et sont légion.
Premièrement, s’agissant de la formation politique OBUTS, aucune raison ne justifie que le Premier Vice-président Gérard Adja, puisse être classé à la neuvième place sur la liste du Grand Lomé, aucune formation politique au sein du CST ne peut prétendre avoir été préalablement, informé avant que la Cour Constitutionnelle ne publiât la liste définitive des listes de candidatures, en dehors de l’ANC. Ensuite, il est établi que Gérard Adja a drainé suffisamment d’électeurs sur la liste conduite par Jean Pierre Fabre. Le décompte des voix par zone établi par la CENI en fait foi. En revanche, il est apparu qu’un candidat de l’ANC sur la liste du Grand Lomé a été régulièrement et sèchement battu par son adversaire de la formation politique UNIR.
Dès lors, trouvez-vous normal que celui qui est battu, donc privé des suffrages populaires, siège à l’Assemblée nationale par le simple fait de son bon classement sur la liste du CST à Lomé, alors que dans le même temps, celui qui dans sa zone a drainé quarante-deux mille quatre-vingt-dix (42.090) voix soit recalé et exclu de siéger au Parlement ? Des motifs éminents justifient et plaident en faveur du PSR pour l’entrée du Professeur Wolou à l’Assemblé nationale.
L’enjeu pour nous actuellement, réside dans le fait de savoir comment nous mobiliser pour parvenir ensemble à l’alternance en 2015 en déjouant les pièges et les fraudes dont pouvoir en place est coutumier. Telle est notre préoccupation.
Les péripéties liées à la répartition des sièges bien qu’importantes sont secondaires. Cependant elles procèdent d’un engagement résolu à apporter la preuve qu’au sein du CST le combat contre les injustices et les discriminations est solidement ancré dans notre agenda politique et que demain si nous parvenons au pouvoir nous gouverneront dans la justice et dans l’intérêt de tous.
Il appartient désormais à l’ANC de démontrer qu’elle est à la hauteur de ses prétentions et de ses ambitions, et au Coordonnateur Général qu’il a le souci de la cohésion du groupe dont il a la charge et qu’il est en capacité de faire respecter par tous les protagonistes les engagements contractés fussent-ils d’ordre moral.
Q : Confirmez-vous que le CST est aujourd’hui secoué par un grand malaise ? Y-a-t-il une guerre de leadership (entre Fabre et Ajavon) au sein du CST ?
R : Je ne crois pas qu’il existe au sein du CST une guerre de leadership entre Zeus Ajavon et Jean Pierre Fabre. En revanche, il y a entre les deux hommes une forme implicite de complicité qui souvent donne l’impression que Zeus Ajavon, dans l’orientation des activités du CST s’aligne sur les positions exprimées par l’ANC.
Q : Que dénoncez-vous au juste ? (Soyez clair et bien précis pour permettre aux togolais de mieux comprendre ce qui se passe)
R : Le CST est un appareil politique de combat commun et collectif, construit dans la douleur autour d’un pacte fondateur porteur d’une quintessence politique. Il ne peut être détourné au profit d’une ambition hégémonique dans le mépris des autres composantes en son sein et sans leur consentement.
Q : Qui sont ces deux députés du CST qui doivent démissionner au profit de Mr. Adja et Mr. Wolou (vous voudriez bien les nommer) ?
R : Les deux députés selon nos analyses au CST, qui devraient rendre leur tablier sont : Mr Alphonse Kpogo, Secrétaire Général de ADDI, retenu dans les sept premiers de la liste du Grand Lomé, (néanmoins grand absent pendant la campagne électorale à Lomé), dont le parti est déjà représenté à l’Assemblée nationale, et Mr Drah qui fut littéralement et platement battu dans sa zone par le candidat de la formation politique UNIR. Je n’ai jamais ni évoqué ni mentionné le nom de Jean Eklou comme certains medias l’ont abusivement prétendu.
Q : Tout cela ne montre-t-il pas une certaine frustration au sein du CST, un rapport du "dominé-dominant" ? Si oui, qui cherche à dominer ?
R : Votre question étant formulée sous une forme directe, permettez-moi d’y répondre sous la même forme : Oui il y a des comportements qui donnent cette impression et je suis enclin à penser que cela est extrêmement fâcheux et dangereux pour la cohésion de notre regroupement et le succès de la mission dont nous sommes les dépositaires.
Q : D’aucuns estiment que ce vous demandez (démission des députés) est quasi-impossible, du point de vue juridique. Que répondez-vous à ceux-là ? Quels sont vos arguments sur le plan juridique ?
R : Je souhaiterais connaître les arguments qu’ils soutiennent pour mieux y répondre. En l’espèce, il s’agit d’une volonté politique et d’une question de justice dont les conséquences seront bénéfiques à tous et à l’ensemble du peuple togolais. Nul ne peut valablement douter de ce que ces mécanismes parlementaires n’ont aucun secret par l’ancien serviteur de l’institution parlementaire que je suis.
Q : Des informations persistantes font état ces derniers jours de la formation d’un groupe parlementaire ANC au sein du Parlement. Est-il possible pour les députés ANC de se détacher du regroupement de formations politique CST pour constituer leur groupe Parlementaire autonome ?
R : Tout cela révèle au grand jour, les intentions feintes ou inavouées de certains animateurs du CST, que nombreux n’arrivent pas encore à décrypter. Tout cela est illusoire, la seule question essentielle qui vaille reste entière : sommes-nous prêts à réaliser dans une dynamique unitaire et loyale, l’alternance en 2015 ? La réponse se trouve en nous-mêmes, car il ne s’agira plus d’aller à un match de classement, mais d’affronter un adversaire politique retors et le vaincre une fois pour toute.
Q : Dans une déclaration à l’Agence Savoir News, Pedro Amouzu disait : "Il n’y aura jamais un groupe parlementaire CST à l’Assemblée nationale". Pensez-vous qu’il a raison ?
R : Je méconnais le fondement sur lequel prend appui son assertion. Comme il est souvent dans le secret des Dieux, je crois sous toutes réserves, que les évènements risquent de lui donner raison.