Le fait pour le prince-héritier du feu général de vouloir s’accrocher indéfiniment au pouvoir ne vient pas du néant, il tient de plusieurs faits et ratés qui perturbent sérieusement le sommeil de ce dernier.
Certes, l’homme qui au départ jouait à l’innocent et au félin, a fini par prendre un goût inassouvissable au pouvoir au point de se délecter, autant que possible, de ses délices et privilèges sans retenue.
Mais ce n’est pas tout. Au-delà de cette jouissance pleine et entière, le Prince a en réalité peur de lâcher le pouvoir à cause notamment d’au moins trois faits scandaleux.
Le premier tient des évènements de 2005 consécutifs à son arrivée forcée au pouvoir.
En effet, suite au triple coup de force opéré à la fois par l’armée et par l’Assemblée Nationale monocolore d’alors pour l’imposer de go dans le fauteuil de son père défunt, des actes graves et imprescriptibles avaient été posés par l’armée et les milices du pouvoir qui ont fini par décimer la vie de près de 500 citoyens togolais et engendrer plus de 40 mille exilés hors de nos frontières.
Ces actes graves ont été dûment consignés dans des rapports dressés à l’époque par les Nations-Unies et la commission Koffigoh d’alors. De toute évidence, ces faits risquent de le rattraper une fois hors du pouvoir, du fait qu’il en a été l’unique et principal bénéficiaire.
Il faudra alors qu’un jour ou l’autre il réponde de ces faits surtout que jusqu’à présent, il n’a pas trouvé le moyen de mettre en œuvre les recommandations de la CVJR qui pourraient, d’une manière ou d’une autre, atténuer la colère des familles des différentes victimes de l’époque.
Le deuxième fait qui perturbe sérieusement le sommeil du Prince héritier est lié à l’affaire d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat.
En effet, lorsque les éléments de Félix Katanga, à l’époque patron de la Force d’Intervention Rapide avaient pris position au domicile de Kpatcha Gnassingbé, le projet était d’éliminer purement et simplement ce dernier. Les obus et autres armes de guerre tirés directement sur le domicile de celui-ci en sont la preuve.
Heureusement que très tôt, Rock Gnassingbé, un autre fils du père défunt a su extirper Kpatcha Gnassingbé et sa famille de la maison.
Par la suite l’arrestation et le rocambolesque jugement de Kpatcha Gnassingbé et coaccusés qui ont abouti à leur incarcération dans de différentes prisons du Togo n’ont rien réglé de cette affaire, surtout qu’il est aujourd’hui avéré que nombre de ces accusés ont été abondamment torturés pendant leur détention à l’agence nationale de renseignement (ANR).
Et Faure sait très bien que la torture est un crime imprescriptible qui peut le rattraper à tout moment.
Pire, le Prince-héritier a même du mal à libérer ceux-ci malgré l’arrêt rendu l’année dernière par la Cour de Justice de la CEDEAO intimant l’ordre à l’Etat du Togo de prendre toutes les mesures urgentes et nécessaires pour mettre fin à la violation du droit de ces derniers à un procès équitable.
Au final, l’on retient que tôt ou tard, Kpatcha Gnassingbé qui a eu l’heureuse chance d’avoir échappé à ce projet de meurtre contre sa personne, aura à demander des comptes à son frère.
Ce n’est même pas tout, Faure devra aussi rendre compte à ce dernier et à ses frères de la gestion opaque qu’il est en train de faire de l’immense héritage laissé par leur père défunt.
Pour l’instant, il échappe à cette contrainte du fait qu’il est dans le trône et étouffe toute velléité de revendication venant de ces derniers. Tout compte fait, il devra un jour ou l’autre se soumettre à cet exercice dès que les manettes du pouvoir vont lui échapper.
Dernier fait sérieux qui donne du tournis à Faure Gnanssingbé reste l’affaire Bodjona, une affaire à la fois immorale, indécente, lâche et irresponsable que le Prince et ses sbires ont monté de toutes pièces pour démolir le redoutable homme politique qui a tout donné pour offrir une présence et un visage humain au pouvoir que Faure incarne aujourd’hui.
Qui l’aurait cru !!! Qui aurait cru que Faure Gnassingbé, un néophyte en politique dont les doigts brûlaient de toutes parts en 2005 et qui a été sauvé de bout en bout par le fils de Kouméa allait oser 7 ans après, initier un projet aussi lugubre qu’abscond contre ce dernier en vue de le neutraliser politiquement !!!
Finalement, ce combat de David et Goliath que le Prince a cru devoir enclencher constitue aujourd’hui une grosse arrête dans la gorge de ce dernier.
Le coup a littéralement raté. Pascal Bodjona a su démontrer avec élégance et éloquence que loin d’être une affaire de droit commun, cette fameuse et hideuse affaire d’escroquerie internationale dans laquelle le palais de la Marina a cru devoir l’impliquer, n’était rien d’autre qu’un projet immoral visant sa démolition politique.
Mieux, un des principaux concernés par cette affaire, Loïck Le Floch-Prigent a systématiquement éventré ce projet en mettant à la place publique, toutes les demandes malsaines qui lui ont été adressées, pendant qu’il était devant les larbins de juges à Lomé, pour qu’il décrète l’implication forcée de Akoussoulèlou Bodjona dans cette ignoble affaire.
Non seulement il a étalé tout cela sur les principaux médias en France, mais il a aussi pris soin de consigner tous ces faits dans un livre dûment écrit, Le Mouton Noir, qui fait aujourd’hui partie de ses best-sellers.
Qui dit mieux ? Qui dit que Dieu est sourd et muet et qu’il n’agit guère ?
Mais alors, que fera Faure Gnassingbé pour réparer ce lourd tort causé injustement à Pascal Bodjona qui l’a fabriqué de toutes pièces pour faire de lui ce qu’il est aujourd’hui ?
Lui et son pouvoir devront, d’une manière ou d’une autre payer le prix de cette ingratitude flagrante manifestée à l’égard du fils du feu Antoine Lébilaki Bodjona.
Au total, tous ces faits dont nous venons de faire état ne rassurent guère le Prince. Et pendant qu’il n’en a pas encore trouvé une solution, il préfère alors utiliser le pouvoir comme une couverture et un instrument de protection qui le dédouane des comptes qu’il devra faire.
Mais ce sera jusqu’à quand ? L’intelligence et le bon sens ne voudraient-ils pas qu’il profite plutôt de sa position actuelle pour réparer tous ces torts ? Malheureusement, à l’opposé de l’esprit, l’orgueil et le complexe, propres à la chair, l’empêchent manifestement de s’activer dans ce sens.