Le Togo aurait-il seulement deux catégories de gens: d’un côté ceux qui se font peur et de l’autre ceux qui font peur?
En tout cas, la coïncidence les 26, 27 et 28 juin des manifestations des partisans du Collectif Sauvons le Togo, qui est de l’opposition et de celles d’un autre groupe proche du pouvoir qui s’identifie comme la Majorité Silencieuse permet de le penser. D’ailleurs à en croire certains commentaires autour de cette coincidence, il s’agira de savoir qui de l’opposition ou du pouvoir est majoritaire. Après avoir gagné les élections législatives et remporté 62 sièges, les partisans du pouvoir doutent-ils d’être majoritaires. En tout cas, dans une démocratie, seules les élections disent qui est majoritaire. Douter de soi est le pire défaut qu’on puisse montrer à la veille d’élections cruciales.
S’ils ne doutent pas d’eux-mêmes, alors pourquoi vouloir descendre aussi dans les rues pour démontrer ce que les urnes ont déjà démontré? S’agirait-il d’une démarche pour faire peur au lieu de chercher à convaincre? Un proverbe de chez nous ne dit-il pas que si un fou emporte votre caleçon alors que vous êtes en train de vous laver, gardez vous de le poursuivre nu, car vous paraitrez plus fou que lui?
Il va sans dire que le CST n’est pas fou non plus. Mais à force de refuser de voir la réalité en face, il finit par en donner l’impression. Les faibles, et depuis les législatives de juillet 2013, le CST est du côté des faibles, n’agissent pas sur les forts par la contrainte, mais par la confiance et l’amour. C’est toute la leçon de la foi.
La confiance en soi
Elle est indispensable à l’opposition pour rassurer les électeurs, les détenteurs actuels du pouvoir. Elle passe par des comportements que bien des gens aimant l’opposition ont rappelés: constituer un ensemble uni, cohérent, concevoir un programme de société répondant aux attentes du peuple, désigner le meilleur candidat pour incarner ce programme. C’est difficile à faire, mais depuis quand a-t-on appris aux hommes que les choses sérieuses sont faciles?
L’opposition togolaise a plus besoin de se dépasser que de dépasser en nombre dans les rues les partisans du pouvoir. En plus de cette confiance en soi, le pacte républicain oblige les acteurs politiques à se faire un minimum de confiance, celui sans lequel il n’y a aucun respect réciproque et aucun respect des institutions, qu’on s’est donné et qu’on doit respecter en cherchant à les changer si c’est nécessaire.
La voie royale pour cela justement c’est de faire confiance au Chef de l’Etat, garant de l’intérêt général et arbitre. La coïncidence des manifestations des sympathisants de l’opposition et du pouvoir pour les réformes institutionnelles et constitutionnelles met en exergue ce statut d’arbitre qui doit concilier les intérêts contradictoires.
Faure GNASSINGBE est seul
C’est un abus de confondre le détenteur du pouvoir avec le pouvoir. M. Faure GNASSINGBE détient le pouvoir, mais il n’est pas le pouvoir. Parce qu’il détient le pouvoir en tant qu’élu du peuple pour veiller à son unité, il est seul responsable de cette unité. Seul d’un côté, avec le peuple et le monde qui regarde de l’autre.
Qu’a-t-il décidé avec son gouvernement comme propositions à soumettre à la représentation nationale? Qu’a-t-il négocié avec ses soutiens à l’Assemblée Nationale pour faire passer des réformes jugées peut-être inopportunes par eux? Nul ne le sait, et de ce fait, nul n’a le droit de le juger pour l’instant.
Le Togo se fait peur, et le Président Faure GNASSINGBE qui n’a pas oublié le déficit démocratique ayant conduit à la suspension de la coopération de l’Union Européenne, lui qui n’a pas oublié que des convictions politiques se sont modifiées pour l’aider à sortir le Togo de son état d’isolement, lui qui sait ce qu’il doit aux Togolais et au monde, sait combien il devra faire un choix courageux pour être un chef dont aucun Togolais ne puisse plus sourire.
Faute de quoi, il devra peut-être encore compter à l’intérieur sur les baïonnettes des forces de sécurité, qui face aux menaces de Boko Haram devraient servir à d’autres fins plus utiles.
Sans compter que Napoléon BONAPARTE qui savait de quoi il parlait rappelle aux hommes d’Etat ceci: "on peut tout faire avec des baïonnettes, sauf s’asseoir dessus.’ Son père avait tout fait avec des baïonnettes, tout comme lui dès son arrivée au pouvoir. Sera-t-il tenté de s’asseoir dessus, plutôt que de chercher l’accord de toutes les composantes de la nation qui plus que toute discipline fait la vraie force des Nations?
C’est cet accord, qu’en son âme et conscience il lui faudra chercher. Il ne s’agira pas de plaire à qui ce soit. Il ne s’agira pas de chercher à être aimé, car pour un chef cela conduit à l’injustice. Il s’agira tout simplement pour lui de créer les meilleures conditions pour l’épanouissement d’une véritable République. C’est à ce prix qu’il s’imposera comme un véritable homme d’Etat. C’est à ce prix qu’il peut compter avoir un rendez vous avec l’Histoire.