Disposant d'une majorité de 62 députés au parlement, le gouvernement pouvait compter sur elle pour faire passer le projet de loi sur les réformes constitutionnelles et institutionnelles soumis à l'Assemblée. Au contraire, 63 députés ont voté contre ce projet. Pour son investiture il a voulu et obtenu la confiance du parlement. Aujourd'hui il ne l'a plus. Pauvre gouvernement.
Certes, il n'y avait pas de défiance, mais la raison impose que sur des questions sensibles, un pays sérieux réagisse comme il se doit, en remettant de la cohérence dans les rapports entre ses institutions. Comment va-t-on s'y prendre? A moins que les détenteurs du pouvoir n'aient joué la comédie pour un peuple et une communauté internationale, qui à l'instar du Chef de la Délégation de l'Union Européenne croyait que le Togo enfin voulait être sérieux.
Le problème n'est pas de savoir si l'opposition a bien négocié l'adoption de ce projet à l'Assemblée. Elle était dans les rues, elle ne comprenait pas que selon un adage de chez nous c'est avec une voix polie, calme et non une voix arrogante et suffisante qu'on obtient du roi ce que l'on veut. D'ailleurs le "roi", qui connaissait l'issue de cette comédie jouée ce 30 juin à l'Assemblée avait pris soin de déléguer le gouvernement pour introduire le projet de loi au lieu de l'introduire lui-même selon la constitution. Ainsi il se gardait d'être la risée du peuple et du monde.
Voici le gouvernement togolais aujourd'hui pris entre l'arrogance de l'opposition et le cynisme du roi . L'Assemblée n'a fait que jouer une pièce qu'ensemble les deux ont écrite. Le gouvernement continuera-t-il à accepter d'être la risée d'un tel système?
Pour ne pas avoir clairement dit non aux demandes de l'opposition, pour avoir joué avec les nerfs du peuple au point que la Majorité silencieuse ait décidé de rompre son silence pour sortir aussi dans les rues, comme le Collectif Sauvons le Togo et la coalition Arc en Ciel, les détenteurs du pouvoir ont fait preuve d'un mépris du peuple, qui risque d'enlever plus de crédibilité encore à tout ce qu'on fait dans ce pays avec le peuple (élections) et par ses représentants (les élus).
En parlant de mépris pour le peuple, tout journaliste togolais se souvient de la partie de de l'intervention de Madeleine MOUKABANON, qui a été la plus applaudie par les Etats Généraux de la Presse à Kpalimé: le passage où elle évoquait le mépris des responsables politiques de nos pays à l'endroit de la presse.
Faut-il comprendre que dans nos pays, l'art de gouverner, c'est l'art de mépriser ceux dont on a la charge beaucoup plus qu'autre chose?
Ne serait-ce que pour ce passage de Madeleine MOUKABANON , les assises de Kpalimé s'avèrent utiles, puisqu'enfin elles permettent de comprendre que si les peuples ont les dirigeants qu'ils méritent, les dirigeants ont la presse qu'ils méritent.
Pour le reste, fasse le ciel qu'à Kpalimé on ne joue pas la comédie mais qu'on pense réellement à construire une presse qu'on ne méprise plus, pour un peuple qu'on ne méprise pas non plus.
Dy GILID