Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Le Togo    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article



 Titrologie



Autre presse N° 001 du

Voir la Titrologie

  Sondage


 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment

Politique

Nos certitudes
Publié le jeudi 10 juillet 2014  |  icilome


© aLome.com
Le Drapeau Togolais.


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

NOS CERTITUDES

Hier soir, 8 juillet 2014, l’Allemagne a écrasé le Brésil, cinq fois champion du monde et pays organisateur du Mondial par sept buts à un. Un mythe est peut-être tombé: cinq étoiles piétinées dans la boue! Leçon?

Mon intention n'est pas de faire la liste ou une liste des mythes, de nos certitudes qui persistent ou qui tombent et de les analyser. Mais je crois, à tort ou à raison, que celle qui nuit le plus à notre société est celle du mythe de l'intellectuel, perçu, non pas comme un mythe, mais comme une certitude absolue et immuable.

Lorsque j'étais petit, alors que la lutte pour l'indépendance battait son plein, on parlait à côté de moi d'un militant déterminé de l'Ablodé. Quelqu'un disait de lui : «Quand nous aurons l'indépendance, il sera ministre. Il le mérite pour tous les sacrifices auxquels il a consenti. Un autre demandait, ironique et sceptique : «Celui-là ( il le désignait par son nom, avec une mimique d’ironie teintée de mépris) ? Est-il lettré? Quel diplôme a-t-il ? ».

N’entend-on pas des propos, des échanges de ce genre aujourd’hui ? Genre : « Quand nous aurons la démocratie…Quand notre parti sera au pouvoir… ».


Combien de certitudes fondées sur la pensée commune, sur des mythes y a-t-il dans le simple échange sur le militant de l’Ablodé? Naturellement, nous vient à l'esprit le mythe qui qualifierait automatiquement un lettré pour des fonctions de ministre ou équivalent, c'est-à-dire de leader dans notre société. Et quand on pense que dans notre société, des personnes ont été raillées parce qu'elles parlaient ou parlent mal le français alors qu'elles occupent des fonctions de dirigeants ou y prétendent, on comprend que ce qui est pris pour signe de l'appartenance à l’élite est le beau parler français. J'avais assisté un soir à un spectacle de théâtre au Centre Culturel Français de Lomé, dans les années 70, au cours duquel un spectateur avait voulu faire une blague comme celles que l'on fait souvent dans nos spectacles populaires de concert-party, en ewe-mina.

C'était une représentation de La visite de la vieille dame de Friedrich Durrenmatt, jouée par une troupe dite mixte, c'est-à-dire composée d'Africains et d'expatriés, pour la plupart coopérants français, dirigée par un fonctionnaire de l’OMS, médecin de son état, qui, dans une conversation privée, m'avait confié qu'il faisait de la médecine pour vivre, mais que ce qui le passionnait c'était le théâtre. Le spectateur intervenant en plein spectacle risquait de troubler une belle tirade que la salle écoutait fascinée, religieusement. Un autre spectateur) l’avait sévèrement réprimé : « Tais-toi, ignorant. Ici c'est le beau français! Ce n'est pas le concert-party. » Si je suis d'accord que l'intervention supposée venue du concert-party est mal placée ici, je ne suis pas sûr que la hiérarchie établie par le second spectateur qui placerait le théâtre en français au-dessus du concert-party soit absolument incontestable. Ne nous trouvons-nous pas en face de genres qui ont leurs particularités, chacun devant être respecté par tous, exactement comme dans la société, chacun à son niveau, selon ses talents peut être utile sans qu’on ait besoin d’établir une hiérarchie entre les citoyens ?

Mais, le plus comique de la situation est que, quand quelques jours après j'ai raconté cette histoire à un ami français, il a rigolé et m'a dit: « Le beau français écrit par un Suisse de langue allemande? » Il s’agissait d’ailleurs de la traduction en français d’une pièce écrite en allemand( Der Besuch der alten Dame). Mais, combien de spectateurs le savaient ? Et nos compatriotes s’extasiaient devant ce beau français, même conscients que l’acteur qui débitait si admirablement la belle tirade n’en était pas l’auteur et que, une fois la scène quittée, il pourrait parler comme l’autre spectateur « ignorant ».


Ainsi, derrière la certitude du beau français, lui-même comme signe d'appartenance à l'élite intellectuelle, cette appartenance elle-même, comme preuve de la capacité à bien analyser les situations et à prendre les bonnes décisions pouvant éclairer notre société, que d'ignorances, que de faiblesses du jugement, que d'erreurs passent inaperçues? Le problème n'est pas non plus que le Suisse allemand ne puisse pas écrire en bon français. Personne n'est à l'abri de certitudes, fondées ou erronées, pas plus mon ami français qu'un autre.

Mais, m'adressant à nos concitoyens, aussi bien à nous qui avons la prétention d'appartenir à l'élite intellectuelle qu'à ceux qui n'ont pas ( heureusement, peut-être) cette prétention ou même cette vanité, dirai-je qu'il nous faut assez de discernement pour savoir que ces certitudes, loin de nous faciliter la tâche au moment de la décision, déjà fondées sur des préjugés, ne font que nous enfoncer dans l'erreur? A part les certitudes du diplôme universitaire, du maniement des langues étrangères, du titre, de la distinction honorifique...combien d'autres, de l'argent, du nom que l’on porte, de la richesse etc. peuvent cacher des préjugés et donc être sources de comportements regrettables?
... suite de l'article sur Autre presse


 Commentaires