La propension malhonnête du fils du père à scier les branches par lesquelles il est arrivé au faîte du pouvoir au Togo est effarante et particulièrement révoltante.
En effet, depuis 2005 où il a accédé au piédestal du pouvoir au Togo, suite au décès brutal de son père Eyadèma, le Prince s’est lancé dans un lugubre projet de musellement de tous les Kabyè qui ont une aura ou qui sont susceptibles de lui tenir tête et de lui dire la vérité en face.
L’ensemble de tous les togolais l’applaudiraient si l’objectif d’une telle traque visait à instaurer une certaine forme de justice sociale et un rééquilibrage dans la répartition des richesses de l’Etat.
L’on pourrait alors dire que le fait que les Kabyè aient dirigé le Togo pendant 38 ans à travers son père Eyadema, a nécessairement causé du tort à d’autres ethnies qui composent le pays et qu’il serait juste et judicieux de rééquilibrer les cartes dans le partage du pouvoir et des dividendes qu’il génère. Mais rien de tout cela.
Plus le temps passe, plus l’on se rend compte que le jeune a un plan inavoué derrière la tête qui répond fondamentalement à un désir inextinguible de règne sans fin sur le Togo, exactement ou même pire que son papa défunt.
Pour ce faire justement, il a fini par élaborer au fil du temps, une stratégie sournoise de musellement de toutes les grosses pontes qui ont contribué à asseoir son pouvoir et à l’aider à poser ses premiers pas de Chef d’Etat. Il souhaite ardemment être la seule hirondelle qui devra faire le printemps au Togo.
Le démantèlement de certains directeurs généraux dès 2006 à la douane, au port et dans d’autres sociétés annonçait les couleurs de cette démarche. Il en est de même de la mise sous éteignoir de certains officiers et cadres Kabyè.
Puis vient en 2009, la scandaleuse arrestation de Kpatcha Gnassingbé, frère de Faure Gnassingbé après une vaine tentative de son élimination physique depuis son domicile.
A ce propos, le prétexte de coup d’Etat allégué à cette époque, avait largement contribué à endormir beaucoup de togolais épris des valeurs de démocratie et d’Etat de droit.
Mais en vérité, le problème résidait beaucoup plus dans ce fait que Kpatcha Gnassingbé constituait une vraie gêne pour son frère du fait de la grande marge de manœuvre dont ce dernier disposait, notamment dans les rangs des FAT et dans les réseaux des hommes d’affaires influents dans le pays.
A cela s’ajoutait, la tendance du jeune frère à voir clair dans la gestion de plus en plus opaque que faisait son frère du colossal héritage laissé par le père. Tout cela sera révélé à la face du monde en 2011 par d’autres frères Gnassingbé invités à la barre pour témoigner sur le malaise profond qui déchirait cette famille après le décès du père.
Cet épisode passé, vint alors le tour de Pascal Bodjona, un autre poids lourd politique du régime en place, dont le nom commençait à trop retentir dans les milieux diplomatiques et au sein de la masse populaire comme étant une alternative crédible susceptible de faire l’unanimité entre toutes les tendances politiques du pays en vue d’une transition apaisée qui pourrait aboutir à une réconciliation réelle et effective de tous les togolais.
Ces regards que beaucoup de togolais et diplomates en poste au Togo portaient sur Pascal Bodjona tenaient naturellement du fait des incessants ratés du Prince qui témoignaient clairement de son incapacité à mener la barque Togo à bon port.
Naturellement, cette fulgurante émergence politique du jeune de Kouméa n’était bien entendu pas du goût de son patron qui a commencé à l’épier depuis des années.
Certains jeunes arrêtés dans l’affaire d’atteinte à la sûreté de l’Etat avaient, déjà en 2009, été torturés à l’ANR pour impliquer celui-ci dans ce plan imaginaire de démolition du régime du Prince. Mais sans succès.
Par la suite, toute une fronde a été montée contre ce dernier dans l’entourage immédiat du Prince pour faire de Pascal Bodjona « l’instigateur de la fuite de Kofi Kounté, l’ancien président de la CNDH qui a fait publier un rapport salé faisant état des traitements inhumains et dégradants des personnes arrêtées et détenues dans cette affaire Kpatcha Gnassingbé et coaccusés ».
Aux dires même des tenants du régime, Pascal Bodjona sera ensuite soupçonné d’avoir inspiré la création du CST, de SOS journalistes en danger ou de l’appel des Patriotes, mouvement mis en place par le journaliste et écrivain Fulbert Attisso et qui prône la mutualisation des forces de l’opposition pour une alternance pacifique au Togo.
Tous ces griefs que l’on portait et nourrissait contre Pascal Bodjona à son insu n’ayant pas marché, les dinosaures du pouvoir qui tenaient à tout prix à la démolition politique du fils de Lébilaki Bodjona, ont vite fait de monter une autre affaire, celle d’escroquerie internationale dont la victime serait un émirati du nom d’Abass El Youssef.
Là, le pouvoir s’est investi à fond pour forcer et décréter l’implication de Pascal Bodjona dans cette affaire pendant que, naïvement ce dernier continuait à s’activer pour donner un visage humain à ce pouvoir qu’il a largement contribué à assoir en 2005.
Bien entendu, cette affaire dans laquelle de Prince et ses sbires ont jugé nécessaire de s’impliquer, leur permettait d’éteindre deux puissants Kabyè tous originaires d’un même canton, Kouméa. Il s’agit notamment, de AGba Bertin, richissime homme d’affaire capable de par sa fortune d’inquiéter à tout moment le Prince et de Pascal Bodjona dont l’aura n’est plus à démontrer.
Les dinosaures du pouvoir ont alors joué sur les liens d’amitié et de famille qui existent entre Agba Bertin et Pascal Bodjona pour les lier dans cette affaire qu’ils ont vite fait de transformer en affaire d’Etat au Togo alors même qu’elle est supposée être une banale affaire de droit commun.
En réalité, ils avaient tout prévu sauf la farouche résistance que leur opposeraient Pascal Bodjona et ses conseils par leur rigueur dans la procédure qui a fini par les mettre à nu alors même qu’ils n’ont pas encore atteint leur objectif.
Voilà qui révolte davantage le Prince et qui le met dans tous ses états jusqu’au jour d’aujourd’hui où il espère au moins ramener Agba Bertin pieds et mains liés au Togo.
La mission qu’il vient d’envoyer aux trousses de ce dernier en Europe de l’Est participe à cette aspiration haineuse.
Au total, l’on s’aperçoit sans doute avec désarroi que le fils du père est loin de vouloir démordre par rapport à son plan « d’éternisation » dans le fauteuil dont il a gracieusement hérité. Il n’a alors que faire des valeurs de la démocratie et de l’Etat de droit.
Il n’a juste à faire qu’à ces Kabyè riches et puissants qui lui font ombrage dans son plan de gouvernance à vie du Togo. Mais ceux-ci, leurs frères Kabyè et amis, aspirant à une démocratie affranchie au Togo, le laisseront-ils poursuivre ce prétentieux et malsain projet ?